Le care est sur toutes les lèvres. Soin, sollicitude, souci des autres (et de soi), compassion, dévouement… Une sorte de bruissement s’empare du langage politique et universitaire. L’ère de l’individualisme effréné, c’est fini. Place au décentrement du regard. Il est temps de prendre soin les uns des autres.

La droite britannique arrive au pouvoir en jurant de réparer une société brisée ("a broken society") en partie grâce au conservatisme compassionnel. Martine Aubry défend une société du soin mutuel : "La société prend soin de vous, mais vous devez aussi prendre soin des autres et de la société." Si Nathalie Kosciusko-Morizet y voit "un triomphe des bons sentiments", Manuel Valls considère que c’est "une erreur profonde, et même […] un recul pour la gauche et pour le pays." Jack Lang, quant à lui, préfère le "Yes, we can" d'Obama au "Yes, we care !".

Pour défricher le terrain, et prendre un peu de recul, nonfiction.fr vous propose cette semaine de revenir sur les racines de la notion de care, rejeton lointain de la philosophie morale d’Adam Smith, véritablement travaillée à l’aune de la psychologie morale américaine et théorisée dans ses aspects éthiques, politiques et sociales par les penseuses féministes américaines Carol Gilligan et Joan Tronto.



Ce dossier complet comprend :
 

- Un entretien avec Dominique Méda, sociologue du travail, sur les raisons de l’émergence de cette notion dans le débat d’idées.

- Une recension du livre de Marie Garrau et Alice Le Goff, Care, justice, dépendance. Introduction aux théories du care, par Florian Cova.
 
- Une présentation de l’ouvrage collectif coordonné par Vanessa Nurock (dir.), Carol Gilligan et l'éthique du care, par Pierre Testard.

- Une recension croisée de Claire Lévy-Vroélant sur les livres de Joan Tronto, Un monde vulnérable, et de Phillipe Chanial (dir.), La société vue du don. Manuel de sociologie anti-utilitariste appliquée et du numéro de la Revue française de socio-économie : "Entre transactions familiales et économie de services".

- Une critique du livre de Christine Clavien, Je t’aide…moi non plus. Biologique, comportemental ou psychologique : l’altruisme dans tous ses états, par Florian Cova.

- Un compte-rendu d’une étude sur le travail de care parue dans la Revue française de sociologie, par Clémence Niérat.

- Une mise en perspective du care à partir du concept japonais d’amae, par Mathieu Gaulène