Alors que les commentateurs surenchérissent dans les qualificatifs catastrophistes sur le congrès du PS, Olivier Duhamel livre une analyse discordante dans sa chronique de l’émission "Les Matins" de France Culture.

Filant sa métaphore du "zèbre socialiste" qui mélange le scrutin proportionnel pour élire ses délégués (les bandes blanches) et le scrutin majoritaire pour élire son dirigeant (bandes noires), le politologue affirme que ce congrès a apporté une nette clarification sur le PS à venir.

Un choix entre deux conceptions du parti :

•    La conception traditionnelle de Martine Aubry d’un parti "de militants", préférant un petit noyau d’adhérents (rappelons que le PS français a moins d’adhérents que le PS wallon…) constitué majoritairement d’élus et de collaborateurs d’élus, qui voient d’un mauvais œil l’arrivée d’éléments exogènes.

•    La conception normalisatrice de Ségolène Royal d’un parti "de masse", souhaitant ouvrir la formation politique au plus grand nombre de groupes sociaux, professionnel et de classes d’âge, pour pouvoir mobiliser des relais dans la société comparables à ceux de l’UMP.

Un choix entre deux modes de fonctionnement :

•    Le strict respect des règles de la "démocratie interne" du PS pour Martine Aubry, où le vote des adhérents pèse moins que les accords entre les instances dirigeantes et les savants équilibres de courants. Les décisions finales se prenant tard dans la nuit au gré de l'usure des nerfs de tel ou tel chef de clan.

•    La "démocratie directe" ou "participative" pour Ségolène Royal, où le premier secrétaire, en adéquation avec la logique présidentialiste de la Ve République, s’adresse directement aux adhérents pour leur demander de trancher sur les orientations stratégiques et les points programmatiques, comme le montre la proposition d’un référendum interne sur les alliances.

Un choix entre deux stratégies électorales :

•    La vision des alliances "à gauche, d’abord à gauche, et seulement à gauche" pour Martine Aubry, obéissant (du moins dans l’affichage) à l’orthodoxie d’Epinay, et qui ignore avec application la chute du mur de Berlin et la quasi-disparition du PCF.

•    La vision "à l’italienne" ou "de triangulation" pour Ségolène Royal, qui veut construire une majorité arc-en-ciel sur l’exemple de la refonte du spectre politique italien autour d’un parti de centre-gauche qui agrège les formations du centre et de la gauche de gouvernement. 

Pour finir, un choix entre deux personnalités, toutes ces différences aboutissant assez naturellement à choisir entre deux dirigeants et leurs équipes, qui incarnent ces deux visions du devenir du PS. Celui-ci sortant enfin de sa négation pavlovienne des réalités présidentialistes de la Ve Républiques qui privilégient un combat ouvert et assumé pour le pouvoir entre des dirigeants à l’identité bien définie et lisible pour les électeurs.

Reste à savoir qui des bandes blanches ou des bandes noires gagneront le Grand Prix hippique de jeudi/vendredi prochain

 

 

* À lire également sur nonfiction.fr :

- l'article d'Yves Semnoz, "Les intellectuels au chevet du PS".

- Vincent Peillon, La Révolution française n'est pas terminée (Seuil), par Laurent Bouvet

- Bertrand Delanoë, De l'audace ! (Robert Laffont), par Yassir Hammoud.

- Gaëtan Gorce, Choisir ! Lettre ouverte à ceux qui veulent encore espérer de la gauche (Lignes de repères), par Laurent Bouvet.

- Martine Aubry, Et si on se retrouvait... (L'Aube), par Aquilino Morelle.

 - Louis Gautier, Table rase. Y a-t-il encore des idées à gauche ? (Flammarion), par Alain Bergougnioux.

- notre dossier sur les nouveaux think tanks français.

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