Cette chronique revient sur des relations indo-pakistanaises, de nouveau tendues. Vers la fin du mois de septembre 2016, nombre d’observateurs se sont interrogés sur la volonté de deux vieux adversaires d’en découdre une fois pour toute. L’Inde avait, il est vrai, décidé de réagir publiquement à un phénomène qu’elle qualifie de terroriste et dont son Etat du Jammu-et-Cachemire est, depuis la fin des années 1980, coutumier. Le Pakistan a eu, quant à lui, beau jeu de faire montre de modération, s’affirmant néanmoins prêt à défendre l’honneur national.

 

 

Depuis la partition des Indes britanniques, la problématique de l’ancien État princier du Jammu-et-Cachemire, aujourd’hui l’Etat le plus septentrional de l’Union indienne, n’a cessé d’empoisonner les relations indo-pakistanaises. Tout récemment, les deux pays ont à nouveau semblé sur le pied de guerre.

Cherchaient-ils un soutien plus franc des puissances mondiales aux thèses qu’ils défendent ? Ils ont (sans doute bien plus que durant le court conflit de Kargil de 1999) recours à l’argument d’une arme nucléaire défensive qui, si elle était employée par l’un puis (en réplique) par l’autre, pulvériserait la moitié de la couche d’ozone de notre planète… et mettrait en danger une immense population de part et d’autre. L’Inde, d’une superficie de près de 3 millions de kilomètres carrés, comprend 1,26 milliards d’habitants, lesquels constituent un sixième de l’humanité ; les quelques 770 millions de kilomètres carrés qui composent le territoire pakistanais accueillent 201 millions d’habitants.

Cette chronique débute par l’attentat du 18 septembre 2016 qui a visé une base militaire indienne dans la région d’Uri (Vallée du Cachemire indien). L’État indien du Jammu-et-Cachemire est, depuis la fin des années 1980, le théâtre de ce que le sous-continent nomme tour à tour militance et terrorisme. Les attentats y sont aujourd’hui moins fréquents qu’auparavant. L’Inde cependant semble s’être saisie du drame du 18 septembre 2016 (plus meurtrier, il est vrai, que bien d’autres) pour tenter une épreuve de force qu’elle déclare ultime avec son voisin pakistanais. Il est vrai que le Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du Peuple indien) qui détient une majorité absolue au Lok Sabha (la Chambre du Peuple, chambre basse du Parlement) s’inquiète de ses piètres résultats économiques, et cherche ainsi à mobiliser ses électeurs. De plus, l’Inde a, au milieu de l’année 2016, éprouvé bien des difficultés à venir à bout d’un nouveau mouvement de protestation cachemiri dont elle cherche - aujourd’hui encore - à nier le caractère spontané.

Le deuxième volet de cette chronique se penchera sur une analyse courageuse de la politique extérieure du Pakistan que trois personnalités (pakistanaises) tentèrent au lendemain de l’attentat. Cette prise de position témoigne de l’atmosphère bien étrange qui règne dans ce pays. Les divers acteurs sont libres de s’exprimer, mais à leurs risques et périls ; ils tentent ainsi un dangereux exercice puisqu’ils sont conscients que le pouvoir politico-militaire (et bien plus, l’Armée et le très puissant service de renseignement – l’Inter-Services Intelligence, ou ISI) tolèrent les critiques lorsqu’elles se confinent à des limites acceptables qui ne sont cependant pas définies clairement.

Les troisième et quatrième volets envisageront, tour à tour, des positions pakistanaise et indienne divergentes. Le quatrième volet se penchera sur les frappes chirurgicales que l’Inde se vante d’avoir conduit en Azad Jammu and Kashmir le 27 septembre 2016. et qui ont visé - d’après New Delhi - les camps d’entraînements qui forment les militants opérant dans le Jammu-et-Cachemire indien. Le Pakistan, pour sa part, a nié qu’une telle attaque ait eu lieu, insistant sur la recrudescence des tirs indiens le long de la ligne de contrôle qui sépare les deux Cachemire. Le gouvernement Modi a, du reste, été confronté aux questionnements de l’opposition indienne qui a réclamé des preuves d’une telle intervention militaire.

Enfin, le cinquième volet reviendra sur l’opération de démonétisation que l’Inde a entamée le 8 novembre 2016, retirant de la circulation (d’une minute à l’autre) les billets de 500 et de 11000 roupies. Le Centre (New Delhi) a notamment argué de ce que le Pakistan imprimait de la fausse monnaie indienne, l’utilisant tout particulièrement pour susciter l’enthousiasme des lanceurs de pierre cachemiris. Reste que de telles mesures mettent en péril une démocratie indienne dont la réputation est davantage entachée, tandis que ce que l’on nomme les nationalistes hindous   usent volontiers d’un nationalisme sourcilleux pour annihiler toute critique.

 

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