Ancien directeur des études de l’UMP
Directeur de cabinet du président de la République
Première partie de l'entretien
(pour lire la seconde partie)
"La petite Mignon, elle fera très bien l’affaire chez Sarko." (Le vice président du Conseil d’Etat)
Les portraits qui vous sont consacrés dans la presse sont peu nombreux, les interviews sont rarissimes, vous vous exprimez peu, voire pas du tout…
Oui, c’est un choix.
Pouvez-vous revenir sur les circonstances de votre arrivée au service de Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur puis sur votre parcours auprès de lui au ministère de l’Economie, puis à la direction des études de l’UMP ?
Mon arrivée au sein de l’équipe de Nicolas Sarkozy est faite d’une succession de hasards et de chances, mais qui s’inscrivent dans une cohérence. Car ce que j’ai fait depuis 5 ans, en particulier lorsque j’étais directeur des études de l’UMP , où j’étais en charge de la rédaction du projet présidentiel, correspond exactement à ce que je souhaitais faire depuis l’âge de 15 ans.
Être la "plume" d’un homme politique ?
La "plume", oui, mais surtout être le conseiller d’un homme politique, si possible pas trop marginal et ayant une certaine influence dans le pays, être à l’origine ou un coordinateur des idées, au cœur de la définition d’une politique. J’ignorais à l’époque en quoi cela pouvait consister et comment arriver à cela, mais je savais que c’est ce que je voulais faire.
Être major de l’ENA doit aider pour arriver à cela ?
Oui, c’est sûr… Mais après c’est une succession de chances. Et ma grande chance, ça a été 2002. Après 7 ans au Conseil d’État, je souhaitais le quitter et j’ai été nommée au cabinet du ministre de la Culture. Je n’y ai travaillé que 24 heures puisque j’ai été "rattrapée par le col". Sarkozy cherchait quelqu’un du Conseil d’État, et comme il y a peu de gens de droite au Conseil d’État, Renaud Denoix de Saint Marc, le vice-président du Conseil d’État, s’est dit, "la petite Mignon, elle fera très bien l’affaire chez Sarko". J’ai été recrutée formellement par Claude Guéant, son directeur de cabinet, et n’ai d’ailleurs pas vu Sarkozy, à ce moment là, lorsque j’ai commencé à travailler au ministère de l’Intérieur. Rapidement, toutefois, la question des musulmans et du CFCM s’est retrouvée sur le bureau de Nicolas Sarkozy : il ne connaissait rien au dossier, je n’y connaissais rien non plus. Mais la question des cultes est d’ordinaire traitée par le conseiller juridique. Ce dossier était très politique, j’ai donc la chance, très rapidement, de travailler dans le cabinet directement avec le président… je veux dire avec le ministre, et au bout de quinze jours, alors que j’étais une petite nouvelle censée écrire des lois dans l’obscurité d’un bureau, je me suis retrouvée en tête à tête avec Nicolas Sarkozy dans son bureau. Là, il y a eu une espèce de sympathie réciproque entre nous. Le courant est tout de suite passé : lui a apprécié ma méthode de travail et mon caractère. Ce n'’était pas du tout un accord sur les idées au départ. Cela ne concernait pas les idées puisque je n’étais pas chargée d’arriver avec des idées. J’étais seulement de droite, sympathisante RPR depuis longtemps, sinon adhérente, tout en reconnaissant d’ailleurs mes erreurs puisque j’ai soutenu Chirac en 1988 et en 1995… mais cela appartient au passé. Ce qui a plu à Nicolas Sarkozy, au départ, c’est ma détermination, mon caractère et mon sens du perfectionnisme. Je ne laisse rien au hasard et il avait besoin de cela.
Parce que lui laisse les choses au hasard ?
Non, il ne laisse rien au hasard non plus. Il a besoin d’être entouré de collaborateurs qui ont le même souci du détail que lui. Il sait très bien que le diable est dans les détails. Il y a eu une adhésion réciproque. Après le ministère de l’Intérieur, j’ai suivi Nicolas Sarkozy au ministère de l’Economie puis à l’UMP, comme directeur des études.
À quel moment votre rôle change-t-il et passez-vous de conseiller juridique à "boite à idées" de l’UMP ? Qui est à l’initiative de cela ?
C’est à sa demande - et ça a d’ailleurs gonflé certains de mes collègues du cabinet – moi, je n’ai jamais rien demandé. C’est lui qui m’a chargée de cela. À l’Intérieur, nous avions travaillé sur des dossiers assez lourds, comme le projet de loi sur l’immigration ; j’avais, par exemple, proposé de faire passer le délai de rétention de 5 à 30 jours, et lorsque j’ai dit ça, tout le monde s’est dit "elle est tapée, cette fille". Le fait est qu’on a réussi, qu’on a fait des choses très innovantes. Je ne veux pas paraître arrogante, parce que je ne crois pas que je le suis, et je ne veux pas en tout cas donner le sentiment de l’être, mais je crois que Nicolas Sarkozy a apprécié le fait que je n’avais pas peur d’avoir des idées, de faire des trucs, de prendre des risques…
De casser les idées reçues…
Oui, c’est ça. C’est lui qui a eu l’idée du concept de la "rupture". Et nous avons fait avancer des idées assez fortes, sur l’immigration par exemple.
À partir de quel moment se structure le réseau des experts et des intellectuels ? À quel moment un besoin en la matière se fait-il sentir ?
Ça, c’est à partir de novembre 2004. Nicolas Sarkozy sait à partir d’octobre 2004 qu’il va prendre l’UMP, et il sait qu’il doit structurer son équipe à l’UMP. Là, moi je ne demande rien mais il me dit : "Je vous propose de devenir directeur des études chargée de mon projet". La commande est très claire.
"A la direction des études de l’UMP : je les ai presque tous virés ! Et nous avons tout reconstruit."
Quand vous arrivez, les études à l’UMP sont dans quel état ?
Il n’y a rien, la situation est catastrophique. D’abord, l’UMP est à l’époque traumatisée par l’affaire Juppé, la condamnation d’Alain Juppé. En plus, il se trouve que dans les partis politiques, en France, on n’a jamais accordé beaucoup d’importance aux idées. J’ai d’ailleurs eu des pressions du Conseil d’État qui estimait que ce poste n’était pas de mon niveau : "qu’est-ce que c’est cette histoire ? C’est pas assez bien pour la maison, il n’en est pas question, vous n’allez pas devenir un aparatchik de parti politique, etc." Mais moi, je ne suis pas allée à l’UMP pour être directeur des études ! J’y suis allée pour faire le projet de Sarko ! Directeur des études, c’était juste le titre.
Donc, j’arrive dans un truc, la direction des études à l’UMP, où il y a huit collaborateurs que je décide de rencontrer l’un après l’autre. Deux sur trois me disent alors qu’ils vont être "loyaux". Ca m’a fait rigoler ! Le premier qui me dit ça, je me dis : "Bon, très bien". Le deuxième, le troisième qui me dit qu’il va être "loyal", ça m’étonne et je me dis : "Qu’est-ce que c’est que ce truc ?" En fait, je comprends que cela signifiait qu’ils avaient été chiraquiens, n’avaient cessé d’envoyer des coups de poignards à Sarkozy entre 2002 et 2004, mais qu’ils seraient loyaux… Une bonne partie m’a aussi dit qu’ils ne savaient pas rédiger des notes ! Et vous êtes dans une direction des études !
Cela me rappelle le PS de 1993 !
Bref, en deux jours, je les ai presque tous virés ! J’en ai gardé trois, ou peut-être deux, je ne sais plus, et nous avons tout reconstruit. On a tout reconstruit.
Les propos suivants, les vôtres, ont été rapportés par le Figaro : "Grâce à la rupture, Nicolas Sarkozy nous a décoincés. J’ai dit à nos experts, à nos consultants : on se lâche. Il n’y a plus de limite à l’imagination." Que signifie "plus de limite à l’imagination" ?
C’est la commande qu’il m’a passée. Le 10 décembre, il m’a dit qu’il fallait aborder tous les sujets : "aucun sujet n’est tabou, aucune proposition n’est taboue, vous m’apportez tout, et après, le tri, je le ferai."
À ce moment là, au tout début, Nicolas Sarkozy vous a-t-il demandé d’impliquer des intellectuels en particulier, ou partiez-vous de rien pour constituer vos groupes de travail ?
Vous savez, des gens qui souhaitent participer à des groupes de travail de ce genre, il y en a plein, mais vous vous apercevez rapidement qu’il n’y a que des zozos, des gens qui cherchent à se faire valoir et qui n’ont rien à dire. C’est toujours les mêmes. Nicolas Sarkozy m’a indiqué quelques personnes à aller voir sur certains sujets ; mais pour l’essentiel je suis allée chercher les gens moi-même.
On a le sentiment, certainement à tort, à gauche, que peu de normaliens, de chercheurs à Sciences Po, d’énarques ont l’habitude de travailler pour des hommes politiques de droite. Il me semble qu’à une certaine époque cela aurait été impensable que ce genre de personnes vous rejoigne en nombre. On a l’impression qu’il y a eu une évolution qui a amené ces personnes à travailler pour quelqu’un de droite. Qu’en pensez-vous ?
C’est moins poétique que ça ! Notre chance a été de commencer en novembre 2004. Nous avons commencé très tôt à bâtir notre programme, et j’ai senti une immense attente d’un débat d’idées. Beaucoup de choses s’écrivaient déjà sur la situation du pays. Nicolas Sarkozy, de son côté, pense que ce ne sont pas les Français qui se désintéressent de la politique mais que c’est la politique qui n’offre rien aux Français. Pour Sarkozy, il faut faire du débat d’idées, la politique, c’est des idées. Il pense qu’il faut avancer des idées et que les gens seront alors attirés par la politique, et c’est ce qu’il a merveilleusement bien réussi en imposant des débats sur les sujets sur lesquels on n’avait plus le droit de parler. Notre chance, c’est ce calendrier très précoce. Il est élu à la présidence de l’UMP en novembre 2004, prend ses fonctions le 1er décembre 2004 et me propose, dès le 10 décembre, d’organiser des conventions. C’est lui qui a eu l’idée des conventions.
Les fameuses 18 conventions thématiques…
Oui, il me dit : "On va faire des conventions." Et il souhaitait que la première convention soit consacrée au social. Je suis alors retournée dans mon coin, j’ai fait ma petite tambouille, et j’ai réfléchi de mon côté. J’ai décidé d’inviter tout le monde. Pour ce premier rendez-vous, j’ai invité tous ceux qui comptaient dans la réflexion sur les politiques sociales. Quasiment tous les gens de gauche ont accepté de venir parce qu’ils souhaitaient participer au débat d’idées que l’on ouvrait. Les gens viennent, donc. Nous ne sommes pas encore dans la campagne et la première convention est un succès qui permet de convaincre d’autres gens de venir aux conventions suivantes. J’ai toujours fait attention dans les conventions que toutes les personnes importantes qui avaient quelque chose à dire soient présentes. Et du coup, c’est vrai qu’il y avait pas mal de mecs de gauche dans nos cercles de réflexion. C’est à partir de novembre 2006 que la situation s’est crispée et que le clivage est réapparu.
Quand Ségolène Royal a été désignée…
Oui, c’est à partir de ce moment là que les choses se sont un peu crispées. Mais cela nous a néanmoins permis de travailler pendant deux ans.
"Notre chance c’est que nous avons eu le temps. Nous étions sur le temps long."
Y avait-il une méthode pré-déterminée dès le départ, ou la démarche s’est-elle construite en chemin, au fur et à mesure ? Comment avez-vous bâti ce réseau d’intellectuels et d’experts ?
Nous avons trouvé tout de suite une méthode. Je me suis fait l’obligation de voir tous les intellos, tous les experts, tous les intervenants pressentis pour chaque convention. Cela correspondait à 50-80 personnes chaque fois.
Vous organisiez ces rencontres à l’UMP ?
Dans un café, plutôt, ou bien je me déplaçais chez eux, car je préfère voir les gens dans leur environnement. C’est plus convivial. On voyait beaucoup de monde et on a fait aussi des voyages à l’étranger lorsque des sujets le nécessitaient ou que des expériences intéressantes étaient menées. On faisait un dossier de synthèse ; 15 jours avant chaque convention, on se réunissait avec les politiques de l’UMP – d’une part, les leaders, donc toujours les mêmes, quel que soit le thème de la convention – d’autre part, ceux qui étaient plus particulièrement connaisseurs du sujet. Nous procédions à l’élaboration d’une motion entre les préconisations des experts et ce que disaient les politiques. La motion définitive était validée par Nicolas Sarkozy à l’issue de chaque convention. Tout cela était très préparé.
Le travail du chercheur est complexe et demande du temps long, tandis que le politique se trouve dans le temps court et demande des simplifications. Comment faire pour articuler ces deux rythmes ?
Non, là, ma chance, encore une fois, c’est qu’on a eu du temps. Dans la tête du patron, on avait deux ans, on devait y consacrer deux ans. Moi, j’étais sur le temps long. Il est vrai que certaines conventions ont été très médiatisées, comme celle consacrée à l’économie. Elle a eu lieu lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2006. Là, elle s’inscrivait dans une rivalité très claire entre Villepin et Sarkozy. Mais sinon, j’avais un mandat long, cela a été ma chance. Je n’étais pas tenue par le temps politique. Et si j’ai pu consacrer tout ce temps, c’est que Sarko avait bien compris que le "produit fini" ne sortirait qu’en novembre 2006.
Ce travail de refonte idéologique aurait-il été possible sans les experts ?
Non. Bien sûr que non.
Je pensais bien que vous me répondriez "non" ! Mais en quoi était-il nécessaire qu’ils soient présents ? On pourrait penser qu’il est suffisant de lire leurs livres, leurs articles, de trouver des politiques pour faire les synthèses et qu’il n’est pas nécessaire de les rencontrer et de les mobiliser…
Même si, à mes yeux, et c’est une parenthèse – on ne l’a pas assez mis en œuvre depuis que nous sommes au pouvoir –, j’ai toujours pensé qu’il était nécessaire et utile de dialoguer avec les experts. Notre pays perd beaucoup à ne pas faire travailler les intellectuels. Concernant l’immigration par exemple, quand j’étais conseiller place Beauvau, j’avais effectué des déplacements aux Pays-Bas et en Allemagne pour préparer le projet de loi. C’est un travail de technocrate, entre technocrates. Et là, Patrick Weil m’appelle et me dit : "On peut se voir ?" Je lui dis : "Oui, d’accord." Il me fait plein de remarques sur le projet : j’étais d’accord avec certaines d’entre elles et en désaccord avec d’autres. C’était très précieux… Je reconnais même que, sur certains sujets, j’aurais dû l’écouter davantage. (* Voir à la fin de cet entretien le droit de réponse de Patrick Weil qui dément cette information).
Là, vous venez de compromettre Patrick Weil…
C’est là que j’ai compris qu’il était nécessaire de faire travailler les intellectuels, qu’on avait besoin d’eux, parce qu’ils ont le temps de creuser les sujets, parce qu’ils les voient avec des yeux différents. C’est pourquoi j’ai été assez déçue de l’attitude d’Eric Maurin par exemple, quand je l’ai contacté le 10 mai dernier. Je lui ai dit que l’éducation constituait un sujet majeur et que nous souhaitions qu’il soit un des experts auprès de Nicolas Sarkozy, un peu comme l’est Arnold Munnich pour les questions liées à la santé. Il m’a répondu qu’il était un chercheur, un intellectuel, et qu’il n’était pas un type qui peut produire des actions concrètes. Je pense qu’il a tort. Et j’ai été un peu déçue par sa réponse.
On dit que 750 experts ont participé au projet…
Non, cela doit être moins. 250 peut-être.
"Le Boston Consulting Group a eu un rôle d'ordre méthodologique"
Mais qu’appelez-vous "expert" ? Vous avez eu recours à des chercheurs, des chefs d’entreprises, des hauts fonctionnaires, des sportifs de haut niveau, par exemple. Quel était le périmètre de l’expertise ?
L’expert, c’est beaucoup de gens à la fois. Ce sont tous les gens qui ont une compétence réelle à faire valoir sur un sujet. J’étais généraliste dans une mission généraliste, et j’avais besoin de m’entourer de spécialistes sur des sujets précis. Nous rassemblions donc une grande diversité d’experts : des chercheurs, des intellectuels, des chefs d’entreprise, des technos, des hauts fonctionnaires, des personnalités médiatiques… C’est avec cette diversité qu’on a pu produire des choses intéressantes, des choses qu’on a considérées, nous, comme intéressantes.
Les journaux se sont fait l’écho de l’intervention, lors de la préparation du projet, d’un cabinet de conseil en stratégie, le Boston Consulting Group. Le BCG ! Qui n’est pas un vaccin ! Cela a pu surprendre car ce type de cabinet travaille d’ordinaire pour conseiller des directions générales d’entreprises.
Ouais… C’est assez marrant parce que l’on reproche souvent aux hommes politiques ou aux technocrates de ne pas faire appel aux compétences du privé. Le BCG a eu un rôle très clair qui a été d’ordre…
Méthodologique…
Oui, c’est ça, d’ordre méthodologique…
Vous voyez, vous ne vouliez pas le dire !
Oui, c’est exactement ça, d’ordre méthodologique. Il y a eu un moment où, après les conventions, nous disposions d’un matériel abondant qui devait permettre de produire un projet politique. Mais les réunions que nous avons organisées avec les responsables politiques pour faire la synthèse de toutes motions n’étaient pas satisfaisantes, car on a senti qu’on n’arrivait pas à créer un groupe homogène. L’UMP est une famille complexe, compliquée, qui a son histoire, et entre un Pierre Méhaignerie, un François Fillon, un Gérard Longuet, un Michel Barnier, une Nadine Morano, chacun restait sur ses positions. Les politiques ne parvenaient pas à dépasser leurs idéologies, leurs querelles, leurs rivalités ou juste leurs sensibilités, pour aller dans le sens d’un projet. Les technos ne parvenaient pas à faire confiance aux politiques, à accepter qu’ils n’ont pas forcément raison sur tout seulement parce qu’ils ont la compétence, à comprendre qu’un projet politique, ce n’est pas seulement une somme de réformes structurelles à mettre en oeuvre, mais aussi des valeurs, un idéal, un modèle de société. Le BCG nous a fait faire des exercices de créativité, des jeux de rôle pour que la rencontre entre ces deux mondes se fasse, pour que chacun apporte aux autres le meilleur de lui-même. Le BCG n’a produit aucune idée.
Vous avez dit dans Le Monde : "Nous avions des experts, des députés avec des idées, mais pas de méthode de travail. BCG a comblé ce manque."
Exactement.
Les jeux de rôles, cela peut sembler un peu ridicule, non, pour une campagne présidentielle ? Pourquoi pas les faire marcher sur des braises ardentes comme à HEC ?
Moi, dans l’idéal, j’aurais aimé qu’on aille faire un séminaire de travail à la montagne. On aurait pu aller à Chamonix : on en aurait bien bavé à faire un ou deux sommets de 4.000 mètres, chacun aurait dépassé ses problèmes, son ego, et on aurait pu créer une dynamique de groupe. Le BCG a permis cela. C’est pourquoi il n’est intervenu qu’en juillet 2006, au début du processus, alors que le projet a été écrit concrètement entre septembre et novembre 2006.
Que faisaient ces consultants, concrètement ?
Eh bien… ils nous faisaient faire des exercices, ils nous faisaient travailler sur des mots clés par exemple. "Pouvoir d’achat", ça vous inspire quoi ? Ou alors, ils nous mettaient en situation avec des hypothèses complètement invraisemblables. Par exemple : "nous sommes en mai 2008. La France fait face à une vague d’émigration massive vers l’Australie." Et là, plutôt que chacun parte sur de grands raisonnements…
Combien étiez-vous dans ces séances ?
Une vingtaine de politiques et quatre ou cinq technocrates. Et donc on faisait ce genre d’exercices. Ils avaient aussi interviewé des Français. Ça, c’était pas mal. On avait des petits films et l’exercice c’était "que répondez-vous à Mme Michu ?" Un jour, nous devions répondre à une préoccupation de quelqu’un, et le lendemain nous refaisions cet exercice sur un autre sujet avec une question de M. Bidule qui était en contradiction totale avec la question de la veille. Du coup, la réaction normale, c’est de répondre des choses complètement différentes de ce qu’on avait dit justement la veille ! Alors là, les gens du BCG nous disaient que notre réponse était totalement incohérente par rapport à celle de la veille. Et ils nous obligeaient à être cohérents !
(*) Droit de réponse : Patrick Weil (Universitaire, professeur à l’université Paris I, spécialiste de l’immigration) dément catégoriquement l'information de Mme Mignon. Il dément avoir contacté Mme Mignon du cabinet de Nicolas Sarkozy. C'est au contraire Mme Mignon qui l'a contacté et l'a invité à venir le voir au ministère de l'Intérieur - ce que, en tant que chercheur au CNRS, il a accepté. (Patrick Weil à nonfiction.fr ce lundi 7 janvier 2008 à 13h00).
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> La critique du livre de Yasmina Réza, L'aube le soir ou la nuit
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