Si les pourparlers entre dirigeants conservateurs et libéraux-démocrates étaient officiellement présentés comme "constructifs et amicaux" dimanche soir, la route vers la formation d'une éventuelle coalition demeure pourtant incertaine.

L'Observer a ainsi révélé, dans son édition du 9 mai, l'existence d'une note adressée à David Cameron par celui qui pourrait logiquement prétendre au poste de ministre des Affaires étrangères dans un gouvernement tory, le député William Hague. Ce document, rédigé avec l'aide de hauts-fonctionnaires avant la tenue de l'élection, ne laisse en effet aucun doute sur les orientations particulièrement eurosceptiques d'un exécutif emmené par les conservateurs, ce qui ne manque pas d'inquiéter au sein du très europhile parti libéral-démocrate de Nick Clegg.

Les réticences d'un certain nombre de responsables libdems à l'idée de rejoindre les conservateurs peuvent par ailleurs se nourrir du flou qu'entretient David Cameron sur l'une de leurs principales revendications : la réforme du mode de scrutin via l'introduction de la proportionnelle. Le leader conservateur propose en effet la création d'une commission d'enquête sur la question, manière comme une autre de la repousser aux calendes grecques. En outre, même s'il est parfois rapidement campé en parti de "centre-gauche" par certains journalistes français un peu pressés, le parti libéral-démocrate compte dans ses rangs de nombreux parlementaires et militants que la perspective de travailler avec les tenants d'un conservatisme social même "compassionnel" n'enchante guère. C'est à tout le moins la position adoptée par les membres du Social Liberal Forum   , un groupe pouvant revendiquer la proximité politique de près d'un tiers des parlementaires libdems. Dans un communiqué rendu public samedi, le SLF a ainsi affirmé ne pas vouloir collaborer à un gouvernement oeuvrant à "accroître le fossé entre riches et pauvres" ou "aggravant le traitement des demandeurs d'asiles"... deux domaines dans lesquels il y a certainement peu à attendre d'un pouvoir conservateur.

Mais les prises de position les plus radicales, ce week-end, sont certainement à mettre à l'actif de Shirley Williams (membre libdem de la Chambre des Lords), pour qui un accord avec les conservateurs est tout simplement impensable, et de Lord Ashdown, ancien leader du Parti. Sans remettre en question les négociations actuelles, ce dernier a en effet enjoint son Parti d' "écouter également le Labour"...

L'hypothèse d'une coalition entre les partis arrivés en deuxième et troisième positions jeudi ne doit, par conséquent, pas être négligée. L'un des stratèges du mouvement de Nick Clegg rappelait ainsi à un journaliste de l'Observer qu'une telle alliance pourrait s'appuyer sur 315 sièges à la Chambre des Communes (contre 305 pour les conservateurs), auxquels pourraient éventuellement s'ajouter six des 28 députés ne relevant d'aucun des trois grands groupes. Enfin, preuve d'un possible retournement de situation dans les prochains jours, le 10 Downing Street confirmait dimanche soir que Gordon Brown et Nick Clegg s'étaient bien rencontrés dans l'après-midi, au Foreign Office

 

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