Ce vendredi 28 novembre, le prix du livre d’économie 2008 a été remis par Christine Lagarde à Jacques Mistral pour son ouvrage La troisième révolution américaine. L’auteur y analyse le reflux des idéologies conservatrices et la montée en puissance des préoccupations écologiques sur fond de questionnement existentiel quant à la vocation mondiale des États-Unis, et de retour de l’État en réaction à la crise financière. La troisième révolution américaine, ouvrage de science politique plus que d’économie, semble pouvoir revendiquer le titre de livre de chevet idéal pour américanophile décomplexé par l’élection d’Obama.

Réciproquement, c’est sûrement son insertion parfaite dans l’actualité politique qui lui vaut cette distinction. La concurrence était pourtant rude sur ce plan, puisque deux des trois autres livres nominés (Les pirates du capitalisme de Solveig Godeluck et Philippe escande, et La crise de Paul Jorion) constituaient des lectures polémiques de la crise financière. À croire qu’au petit jeu de la conformité à l’air du temps, la célébration de la victoire d’Obama rapporte plus que la critique radicale du capitalisme. Le palmarès 2008 fait ainsi deviner, à côté bien sûr de la qualité intrinsèque des ouvrages, les critères implicites du prix : political correctness, succès de librairie, visibilité de l’auteur, voire proximité avec les pouvoirs politiques. La liste n’est pas exhaustive, mais elle fournit une grille de lecture assez féconde de l’historique des lauréats : Jean Pisani-Ferry en 2001, Pascal Bruckner en 2002, Alain Minc en 2004, Erik Orsenna en 2006…Le jury, majoritairement composé de journalistes et de hauts fonctionnaires, ne prétend donc pas dénicher de jeunes talents.