101 films pour évoquer 120 ans de cinéma.

Raconter l’histoire du cinéma français en 101 films, tel est le défi que s’est lancé l’historien du cinéma Michel Marie qui, avec cette anthologie, dresse une chronologie de la production de films dans l’Hexagone de 1895 à nos jours.

Le livre repose sur la sélection de ces 101 films et leur mise en valeur. Car si cela commence bien en 1895 avec La sortie des usines Lumière, Michel Marie choisit ensuite de se frayer un chemin et de naviguer entre les « classiques », les films qui « ont marqué l’histoire pour des raisons particulières », « les grands succès populaires » sans oublier « les films méconnus à redécouvrir ». Une contrainte et pas des moindres : se limiter à un film par réalisateur. Il ne s’agit pas ici de faire l’apologie des auteurs importants mais bien de rendre hommage à la diversité des images et des histoires racontées par les films et à leur contribution à l’évolution du cinéma français.

 

Un chapitrage thématico-chronologique

Michel Marie nous invite à redécouvrir notre héritage cinématographique national à travers huit périodes différentes. Ce découpage chronologique suit les innovations techniques, les changements politiques et les préoccupations esthétiques qui ont façonnés la production audiovisuelle française : 

1895-1929 : Le cinéma muet, de l’invention au passage au parlant ;
1930-1944 : des débuts du parlant à la libération ;
1945-1958 : Le cinéma de la IVe République ;
1959-1969 : Autour de la Nouvelle Vague ;
1970-1980 : Les années politiques ;
1981-2000 : Cinéma d’auteurs et industrie culturelle ;
2001-2012 : Les vétérans et les jeunes cinéastes du second siècle ;
2013-2016 : Épilogue. 

Chaque partie est introduite par une mise en contexte historique et économique du cinéma de la période racontée. L’ouvrage de Michel Marie offre une pléiade de détails, d’informations qui permettent, mis bout à bout, de reconstituer tous les reliefs de l’époque évoquée avant de se plonger dans la description de chacun des films la représentant.

 

Documenter les facteurs d’évolution du cinéma français

Au-delà des genres et des courants artistiques, ce chapitrage permet d’éclairer différentes facettes de l’histoire du cinéma français. En premier lieu, l’ouvrage tente de réhabiliter des filmographies et des films éclipsés par l’histoire classique. Par exemple, le chapitre consacré au cinéma de la IVe République permet de revaloriser une période de la cinématographie française souvent restée dans l’ombre de la future Nouvelle Vague. A coups de chiffres et de bilans comptables, le livre documente l’évolution de l’économie et du rayonnement international du cinéma français d’une période à l’autre. Nombre de films produits, fréquentation des salles et développement de politiques culturelles et d’instances publiques de réglementation du secteur, comme le CNC, sont autant de données qui sont évoquées de part en part de l’ouvrage. L’évolution de la place des femmes dans le secteur cinématographique semble également une problématique mise en avant de période en période. Après les différentes polémiques qui ont secoué l’industrie ces derniers mois, il est bon de pouvoir tracer la généalogie de la féminisation du cinéma français.

Avant de détailler les films choisis, Michel Marie établit une liste des « autres films importants », permettant ainsi au lecteur de se situer par rapport à sa cinéphilie personnelle.

 

101 films

Chaque partie suit ensuite une structure répétitive d’où l’ouvrage tire sa force encyclopédique. A chaque film sa double page. Une « fiche film » est composée d’un rappel des informations techniques, d’un texte résumant l’intrigue, analysant la mise en scène et valorisant l’originalité du métrage au regard de l’histoire et pour finir,  une série de photogrammes tirés du film ponctue le bas de page.

Le lecteur peut donc choisir de suivre la chronologie de l’ouvrage, de se pencher sur un film au hasard des pages ou bien de se référer à un titre précis pour en tirer des informations. Il pourra alors redécouvrir les subtilités de classiques intemporels comme Hôtel du Nord (Marcel Carné, 1938), Les vacances de Monsieur Hulot (Jacques Tati, 1953), La Collectionneuse (Eric Rohmer, 1967), Le cercle rouge (Jean-Pierre Melville, 1970), A nos amours (Maurice Pialat, 1983) jusqu’à des longs métrages récents comme La Haine (Mathieu Kassovitz, 1995), Polisse (Maïwenn, 2011) et Divines (Houda Benyamina, 2016). Mais le livre est surtout l’occasion de découvrir quelques films moins connus, qui témoignent d’autant plus de leur époque, des préoccupations artistiques qui la traversent et des problématiques économiques qui la forgent.

L’intérêt de cette belle histoire du cinéma français est donc de réunir ces œuvres sur le papier et de témoigner ainsi de l’apport de chacune à l’édifice du cinéma français. Plus qu’un véritable ouvrage analytique, le livre de Michel Marie est un geste patrimonial à la cinéphilie contagieuse