Une étude des voyages du musicien Camille Saint-Saëns qui démontre l’intérêt d’une géomusicologie historique.

Stéphane Leteuré est professeur agrégé d’histoire-géographie. Après des études d’histoire à Paris I sous la direction d’Alain Corbin, il a entrepris un doctorat en musicologie sous la double direction de Guy Gosselin et de Joël-Marie Fauquet à l’université François Rabelais de Tours (soutenance en 2011, qualifié en section 22).

Il s’est attaché à analyser la pluralité des liens entre le compositeur Camille Saint-Saëns et le politique de 1870 à 1921   . Intéressé par la manière dont la production musicale s’insère dans les problématiques historiques de son époque, il a participé à l’ouvrage collectif Camille Saint-Saëns and his World   et a publié divers articles dans des revues à comité de lecture. Chroniqueur pour le site Nonfiction, il s’investit également dans l’édition scolaire (Ellipses, Hatier, Foucher, Encyclopaedia Universalis).

Son dernier livre, Camille Saint-Saëns le compositeur globe-trotter 1857-1921, paru en 2017 chez Actes Sud - Palazzetto Bru Zane, se fixe pour objectif d’éclairer le sens politique, voire géopolitique, des voyages que le compositeur Camille Saint-Saëns (1835-1921) a entrepris tout au long de sa vie (de 1870 à 1921) à un rythme effréné. En effet, l’incroyable fréquence des voyages du compositeur interpella ses contemporains et constitue jusqu’à nos jours un objet de curiosité.

 

 

Ce goût de l’ailleurs apparaît comme l’un des fondements de l’existence même de l’individu et comme un enjeu de carrière particulièrement fort. Saint-Saëns ne fut jamais autant à sa place qu’en déplacement à l’étranger, lui qui acquit une renommée internationale et qui incarna mieux que quiconque l’école française de musique à la Belle Époque. Pour qui cherche à en établir les significations, cette extrême mobilité de l’artiste offre un champ d’étude étonnamment large et propice au décloisonnement dont s’inspirent de plus en plus les disciplines universitaires.

Cet essai en faveur d’une géomusicologie historique aborde en quelques étapes le sens des pérégrinations du compositeur considéré comme un acteur de la géopolitique musicale qui se met en place à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Les voyages dans le monde anglo-saxon, en Amérique latine et en Grèce ancrent l’action de Saint-Saëns au cœur d’un grand nombre d’enjeux extramusicaux et de nature politique. Premier musicien orientaliste de France, Saint-Saëns insère l’Égypte et l’Algérie à cet Orient fantasmé où se pose la question du colonialisme et de l’altérité. Mais c’est vis à vis de cette Allemagne admirée et détestée que se joue, selon une stricte chronologie, l’articulation entre le nationalisme musical et l’interculturalité