Y a-t-il un risque à laisser les mots venus de l’étranger, et notamment les termes issus de l’anglo-américain, se répandre et s’imposer ? La langue française est-elle par là menacée ? Et quelle peut bien être cette menace qui pèse sur une langue ? Faut-il la défendre ? Son identité est-elle en jeu ? Mais qui saurait dire ce qu’est l’identité d’une langue ?

Ces questions sont toujours difficiles et délicates, car très vite chargées d’idéologie mais aussi de réels enjeux politiques; les nombreuses défenses de la langue française, de son génie, témoignent souvent d’une peur de l’autre et de l’étranger, et d’une tentation du repli sur soi.

Bref, que penser de la musique podcastée sur son iPod, des conseils de son coach, des productions des gender studies, de notre accès wireless à internet, de la technologie bluetooth, des talkshow où ça n’en finit pas de discuter, et en prime, des émissions en prime time ?
Faut-il systématiquement chercher ou inventer un équivalent en français ? 

Il existe au sein du ministère de la culture une Délégation générale à la langue française et aux langues de France, chargée de réfléchir à ces questions-là. Le ministère vient ainsi de lancer un site internet, dont les missions sont aussi bien d’assurer la diffusion du français que de combler les lacunes de vocabulaire : www.franceterme.culture.fr

L’idée de  ce site est d’une part d’être un écho de la vitalité et de l’inventivité du français, et d’autre part de contribuer à l’enrichissement de la langue, en proposant des équivalents pour les termes étrangers. 

Le projet est intéressant, car précisément il prend acte de l’évolution de la langue, et ne cherche pas à faire du français une entité figée, qu’il faudrait défendre coûte que coûte contre toute invasion.  Trouver des mots nouveaux pour éviter que le monde, l’économie, les rapports sociaux, la vie culturelle ne s’interprètent qu’au prisme de termes issus de l’anglo-américain, et d’une certaine vision du monde qu’ils véhiculent inévitablement, c’est faire preuve d’une saine résistance.

Toutefois, jusqu’où faut-il pousser cette recherche de mots équivalents, notamment lorsque certains termes étrangers sont déjà passés dans l’usage courant ? Faut-il s’obstiner à écrire des courriels alors que tout le monde consulte sa boîte mail ? Faut-il parler de baladeur numérique ou écouter son iPod ?

Et surtout, devant l'ampleur du phénomène, dans quelle mesure ce type d’initiative ministérielle peut-il avoir une réelle efficacité ? Et modifier quelque peu nos comportements langagiers ? Car si la langue n'est pas un simple instrument de communication, mais est aussi, précisément, une manière de voir, comprendre, sentir le monde, il ne faut sans doute pas trop attendre de l'Administration en ce domaine, ni espérer d'un tel projet.

Il n'empêche que l'initiative est louable, et que le site est ludique et instructif.



Le site FranceTerme : www.franceterme.culture.fr
Le site de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France : www.culture.gouv.fr/culture/dglf/
Un article sur lemonde.fr
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