Trois questions à la journaliste Chloé Andries sur le projet MEDOR, un magazine trimestriel belge et coopératif d'enquêtes et de récits.

Vous êtes à l'initiative du projet de magazine MEDOR qui se déclinera en version papier et sur internet... Votre parti pris est de privilégier un travail d'enquête... 

Oui, cela fait deux ans que nous réfléchissons à ce projet qui a muri d'abord entre journalistes indépendants confrontés à la crise de la presse. On se demandait comment parvenir à financer correctement un travail d'investigation, d'enquêtes qu'on trouve rarement dans la presse aujourd'hui. Or, c'est le cœur du métier. Nous voulions sortir du dilemme qui se pose aux journalistes qui s'ils veulent faire des enquêtes fouillées sont obligés de travailler à perte.... Nous pensons qu'il y a de la place pour un journalisme de qualité et rétribué justement à ce titre...

En quoi votre modèle est-il original ?

Il est clair qu'aujourd'hui le schéma traditionnel avec un rédacteur en chef qui anime la rédaction et qui est bien souvent soumis aux actionnaires et aux annonceurs a du plomb dans l'aile et ne répond plus toujours, nous semble-t-il, aux attentes des lecteurs. Nous avons aussi été influencés par divers travaux, comme ceux du philosophe Bernard Stiegler sur les effets de la révolution numérique ou l'économie de la contribution. Nous avons donc essayé de bâtir un autre modèle.

MEDOR est une coopérative à finalité sociale. Concrètement, notre idée est de décloisonner les pratiques et la distribution du pouvoir au sein de la rédaction. Nous supprimons le poste de rédacteur en chef pour en faire une charge tournante, nous travaillons avec des logiciels libres et les lecteurs, qui financent, ont la possibilité d'envoyer un représentant aux conférences de rédaction. Ils sont garants du respect de la philosophie du projet. Ce qui nous anime, c'est de ne sacrifier ni à l'urgence ni au paiement au lance-pierres... Nous voulons une transparence et une indépendance éditoriale totale.

Quid de votre financement ?
Nos financeurs sont les lecteurs. Nous avons imaginé trois possibilités de participation (don, participation à la coopérative par la prise de parts sociales, abonnement de 60 e par an pour 4 numéros). Notre plan financier a été établi sur une base de deux années pour garantir plus de stabilité. Nous devons réunir la somme de 226 000 euros à terme. Pour l'instant, en un peu plus d'un mois, nous avons rassemblé 48 000 euros. C'est un bon signal.

Medor s'intéressera essentiellement à la Belgique. Chaque numéro comprendra deux enquêtes de 18 pages chacune, 3 reportages ou récits longs, des rubriques et un article flamand qui sera traduit. Nous envisageons des partenariats et formules qui nous permettront d'aborder la Belgique dans sa globalité. MEDOR ne veut pas être un magazine de francophone pour les francophones. Enfin, nous ne refusons pas la publicité, qui sera présente de façon marginale, à hauteur de 10%, mais qui sera "choisie" pour son adéquation à nos valeurs.



Plus d'infos :

https://medor.coop/
http://www.kisskissbankbank.com/medor-le-trimestriel-cooperatif-belge-enquetes-et-recits