En quelques années, le terme s’est généralisé. Au point de désigner à peu près tout. Voire plus rien. Aujourd’hui, le mot "mook" est utilisé autant pour parler d’un magazine à la pagination plus conséquente que celle de ses principaux concurrents, que pour une revue qui fait une large place au visuel, aux illustrations ou aux iconographies. "Le terme anglo-saxon quaterly me semble plus approprié que celui de mook, un peu marketé", avance Adrien Bosc, fondateur de Feuilleton et Desports.

Mais si tout le monde ne tombe pas forcément d’accord sur la dénomination de l’objet, les intervenants de ce deuxième atelier se rejoignent sur un point : l’incapacité du livre et du magazine, dans leurs formes classiques, à rendre compte ou à exprimer la pensée de leurs concepteurs. "Avec France Culture papiers, l’idée était de mettre sur du papier ce qui n’avait pas l’habitude de l’être : la radio", explique à l’auditoire Jean-Michel Djian, son rédacteur en chef. "On souhaitait fixer la fulgurance, avec une temporalité équivalente à celle d’une radio comme France Culture". Feuilleton, lui, est né d’une volonté de "traduire des textes qui ne trouvent leur place nulle part ailleurs en France, en particulier faute de place". Avec comme modèles affichés le Harper's ou encore le New Yorker.
 
Un choix également économique

Mais le choix du mook ne tient pas seulement à la forme ou aux contenus. Pour Jérémy Ruskin, fondateur d’Usbek et Rica, "quoi de mieux pour fédérer qu’un gratuit ? Mais avec la crise des annonceurs, ce n’est plus possible. En kiosques ? Se démarquer devient de plus en plus complexe. Le Mook d’Autrement et XXI avaient un système qui marchait, alors on a tenté le coup". "C’est vrai que XXI a donné le la francophone, admet Adrien Bosc. Sans eux, on n’aurait peut être rien fait".
 
"Nous avons un point-mort à 18 000 exemplaires. Après, le numéro est rentable, explique Jean-Michel Djian. Et aujourd'hui, les ventes de France Culture papiers se sont stabilisées à 21 000 exemplaires". Initialement, Feuilleton avait quant à lui un point-mort à 12 000 exemplaires. Le deuxième numéro ne l'ayant pas atteint, l'équipe a effectué plusieurs ajustements, en particulier en baissant la pagination, de manière à pouvoir réduire celui-ci à 8 000 exemplaires. Usbek et Rica n'est paru de son côté que quatre fois en format mook. Avant de faire le pari de s'imposer... en magazine !

Quid du net ? Les mooks et la toile sont-ils forcément incompatibles, comme pourrait le laisser penser l'absence de sites de la grande majorité des représentants de ce format ? Pour Jean-Michel Djian, "il faut désacraliser la technologie pour apporter le sens". Adrien Bosc abonde, acquiesce : "ce n'est pas le support qui compte, c'est le sens qui est donné". "Le web nous a obligé à nous radicaliser dans ce que nous faisons de mieux", tient-il bon de préciser

 

* Lire aussi sur nonfiction.fr : 
- Les comptes-rendus des autres ateliers de la journée d'étude sur les revues, "Revues en stock", organisée au CNL
- Le compte-rendu de cette journée par Livres Hebdo