Prologue
Ca y est, Standard and Poor’s a fait tomber notre triple A. Après la Grèce, l’Irlande, l’Espagne et l’Italie, les agences de notation dégradent aujourd’hui la France.
Ces agences qui osent depuis deux ans déjà annoncer sans sourciller que si telle ou telle mesure n’est pas respectée dans tel ou tel pays, si telle ou telle réforme n’est pas mise en œuvre, alors la dégradation est inévitable et l’augmentation des taux d’intérêt – ainsi que ses corollaires, creusement du déficit public et explosion de la dette – inéluctable.
Ces agences qui osent dicter la politique fiscale et budgétaire – pourtant premier des attributs de la souveraineté nationale – à adopter. Comme si de rien n’était. Comme s’il était normal qu’il en soit ainsi. Comme si une simple dépêche envoyée à une agence de presse pouvait venir bouleverser les grandes orientations politiques décidées par les élus de la nation.
Ces agences qui avaient par erreur annoncé début novembre une dégradation de la note française, démontrant par là même leur grand professionnalisme et leur crédibilité.
Mais maintenant que la dégradation française est effective, que Standard and Poor’s a réellement fait tomber notre triple A, va-t-on une nouvelle fois voir nos responsables politiques céder sous la pression de ces harpies modernes dont nous ne connaissons que le nom ? Va-t-on les regarder passivement céder ou va-t-on enfin assister à la révolte des citoyens contre les marchés ?
Qui sont en effet ces agences de notation qui veulent nous imposer leur volonté, décider des orientations politiques de la France à coup de communiqués surmédiatisés, et aller à l’encontre de la souveraineté des peuples ? Comment faire pour mettre fin à leur diktat illégitime et infondé ?
Ces questions sont essentielles, et il faut bien avoir conscience d’une chose : le problème des agences de notation n’est pas un problème économique. C’est un problème entièrement politique, qui vient interroger la souveraineté des peuples. Et seule la protestation des peuples, face à ce diktat qui leur est imposé et à la faiblesse de leurs gouvernements soumis, permettra d’en venir à bout.
Si individuellement les Etats européens sont trop faibles face à la puissance des marchés, ensemble ils seront assez forts pour leurs résister. Si les gouvernements européens sont trop timides pour essayer de leur résister, alors les citoyens unis devront les mettre devant leurs responsabilités.
Il est temps de se battre pour plus de fédéralisme budgétaire, pour plus d’Europe, pour plus de démocratie, pour plus d’autorité face aux marchés financiers, et pour la mise en place d’euro-obligations. Il est temps de tirer pleinement partie de l’existence de ces marchés financiers, qui ne doivent que nous servir, alors qu’aujourd’hui ce sont eux qui se servent ! Il est temps de lutter contre la toute-puissance des agences de notation.
Après le printemps arabe, qui a vu des millions de citoyens s’élever contre les régimes autoritaires en place, et dans la lignée du mouvement des indignés comme de celui d’ Occupy Wall Street , qui voient des citoyens manifester partout dans le monde occidental pour protester contre la toute puissance des marchés, voici venu le temps de l’ " hiver occidental ". Voici venu le temps de dire enfin non aux diktats des agences de notation.
Un hiver occidental en trois actes – la prise de conscience, le temps de l’action et la victoire citoyenne –, qui permettrait à la démocratie et au pouvoir financier de reprendre chacun leur place légitime
Julia Cagé pour Cartes sur Table
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Acte 1 - La prise de conscience ou le début de l'hiver occidental, par Julia Cagé
Acte 2 - Le temps de l'action: la volonté politique de dire enfin "merde aux agences de notaiton, par Julia Cagé
Acte 3 - La victoire citoyenne,bientôt le printemps, publication le 7 mars