Nous sommes tous fatigués d’entendre parler de la tecktonik, ce mouvement de jeunesse, prenant prétexte d’une danse fédératrice pour marquer un nouveau territoire urbain. D’autant plus fatigués que nous n’avons toujours pas compris ce que tout cela signifiait…

Heureusement, sur le site e-clubber.com, point de rencontres tecktoniciennes, on y trouve un peu d’aide: "son créateur, Cyril Blanc, définit la tecktonik comme étant le point d'impact entre la musique hardteck des pays du nord de l'Europe tels que la Belgique, les Pays-Bas, voire l'Allemagne, et les mouvements de tendance techno issus principalement d'Italie, constituant ainsi le mouvement musical hardstyle". Traduction : il s’agit donc de musique électronique aux accents garage, présente depuis une dizaine d’années dans la programmation de festivals comme le NordikImpact. Rien de neuf, donc… Quant à définir la danse en elle-même, cela relève de la citation multi référentielle :  "Cette danse résulte d’un mélange de voguing, pop et breakdance et se pratique aussi bien sur les dancefloors que sur des spots urbains". On peut alors se demander où se trouve la nuance entre l’influence et le plagiat. Et nous souvenir de l’importance du voguing.

Né dans les années trente, à Harlem, le voguing connut une très forte popularité au sein de l’underground américain, notamment chez les drag queen, qui se jouèrent des codes de cette danse aussi précieuse que performante. Caractéristiques : des mouvements angulaires, des contorsions relevant presque du mime, et surtout la synchronisation des arms control. Quelques mots-clefs : fluo, suburbs, street culture, noir et blanc, battles, androgynie. Si cela ne vous évoque toujours rien, il suffit de visionner le clip Vogue, de Madonna. Sublime d’élégance et de précision, le danseur Willi Ninja s’y détache singulièrement. Il est celui qui révolutionna le voguing dans les années quatre-vingt, et le personnifia dans le documentaire Paris is burning (1990). Willi Ninja est mort l’année dernière des suites du SIDA. Madonna a d’ailleurs déclaré lors de sa mort : "Il a été une influence majeure pour moi comme pour des centaines d'autres personnes". Des milliers d’autres personnes même, mais qui ne le savent pas toujours. Come on, Vogue…


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Crédit photo : Romano2k / Flickr