Les diplomates français n’en peuvent plus. Face à l’incurie de plus en plus patente du gouvernement en matière de politique étrangère, un collectif de diplomates actifs au sein du Quai d’Orsay ou retraités, le groupe Marly, a pris la plume dans Le Monde du 23 février pour exprimer son ras-le-bol. MAM s’enlise dans ses propres contradictions vis-à-vis de la Tunisie, Nicolas Sarkozy créé une crise diplomatique largement évitable avec le Mexique autour de l’affaire Cassez, les budgets du Quai d’Orsay fondent d’année en année   .


Cette situation serait la conséquence du "mépris ostensible" du chef de l’Etat pour le corps diplomatique dont il ignore les préconisations tout en le rendant responsable des graves failles de la politique étrangère de la France. Celle-ci devient illisible parce qu’elle ne se distingue plus de la ligne américaine depuis le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN. Le constat est accablant : non seulement l’Elysée navigue à vue face aux soulèvements des pays arabes, mais elle n’écoute tout simplement pas le Quai d’Orsay et ses ambassadeurs. "Or, à l'écoute des diplomates, bien des erreurs auraient pu être évitées, imputables à l'amateurisme, à l'impulsivité et aux préoccupations médiatiques à court terme."


L’Union pour la Méditerranée est un échec à cause de la méthode et de l’objectif choisis précipitamment par le président de la République. La France et l’Europe n’ont absolument pas pesé sur la conférence de Copenhague sur le climat car sa préparation a été confiée au ministère de l’environnement. Le dossier Florence Cassez aurait dû être traité dans la discrétion : c’est son exposition médiatique qui ruine ses chances de dénouement heureux. Les priorités de la France, comme les relations bilatérales avec l’Afrique francophone sont marginalisées au profit d’une politique incohérente et incompréhensible au Moyen-Orient.


Au passage, cette tribune ne manque pas d’égratigner les réseaux d’intérêts privés écoutés par le pouvoir et l’influence de Claude Guéant et Henri Guaino. Ce dernier a répliqué ce matin sur France Info en qualifiant ce texte de "tract politique" et en rappelant sa conception du partage du pouvoir en matière de politique étrangère : "La politique étrangère de la France, c'est le domaine réservé du président de la République depuis le début de la Ve République. […] Il n'a jamais été question que les chefs de bureaux de tel ou tel ministère fassent la politique étrangère. Les diplomates font de la diplomatie, le gouvernement fait de la politique étrangère"

 

* Le collectif Marly, "La voix de la France a disparu dans le monde", Le Monde, 23 février 2011.