Jusqu'où le Web 2.0 va-t-il bousculer nos modes de communication et d'action collective? Dans le dernier numéro de la Revue européenne des médias, Francis Balle expose une réflexion intéressante sur le rôle politique et médiatique de Twitter. Cet outil de communication, simplement destiné à servir de messagerie instantanée dans l'esprit de ses concepteurs, a multiplié ses fonctions depuis sa création en 2006. En effet, ses utilisateurs, qui s'élevaient à 18 millions de personnes pour le seul mois de mai 2009, en ont fait "le premier représentant du micro-blogging ", d'après Francis Balle.

 

Twitter serait à la fois plus rapide et plus incontrôlable que n'importe quel autre média. C'est à travers cette plate-forme qu'on avait appris les attentats de Mumbaï de novembre 2008, le crash d'un avion d'USAirways dans l'Hudson River de New York en janvier 2009. C'est la crise iranienne de juin 2009, cependant, qui lui donna une force politique inégalée. Instrument de contournement de la censure et de dénonciation de la répression, Twitter servit à alerter l'opinion mondiale sur les événements qui déchiraient la société iranienne là où les médias traditionnels étaient condamnés au silence.   Les tweets, micro-messages de moins de 140 signes transmis d'utilisateur à utilisateur, n'avaient plus seulement pour but de raconter ce que chacun faisait ou pensait, mais créaient une communauté de résistance démocratique.

 

Twitter nous incite donc à repenser le rôle des médias dans la vie politique de nos sociétés. C'est une interface indissociable du Web 2.0 puisque des sites comme Twitter, Facebook ou YouTube ne cessent de relayer, de partager et d'amplifier des informations, et les images de révolte dans les rues iraniennes en étaient une nouvelle illustration. Ce réseau lui-même trouve une caisse de résonance dans les médias audiovisuels qui prolongent les buzz et autres effets de chaîne.

 

Pour autant, il faut s'interroger sur les multiples usages et objectifs de ce type de support. Porte-voix des faibles pour les uns, objet de manipulation des puissants pour les autres, Twitter a en tous cas révélé encore un peu plus le potentiel de transformation politique d'Internet

 

*Francis Balle, "Juin 2009 en Iran: l'effet Twitter", La Revue européenne des médias, n°12, 2009