Le directeur du programme "Think tanks and civil societies" de l’université de Pennsylvanie, James G. McGann, vient de publier son deuxième classement annuel des think tanks les plus influents dans le monde. Disponible en ligne sur le site de la revue Foreign Policy , le rapport recense 5.465 think tanks à travers le monde dans près de 170 pays   .

Les trois pays en abritant le plus sont : les États-Unis (1.777), le Royaume-Uni (283) et l’Allemagne (186). La France se place en 4e position (165). À l’échelle mondiale, l’Amérique du Nord rassemble 34% des think tanks, l’Europe occidentale 22%, et l’Asie 12%. Viennent ensuite l’Amérique latine (10%), l’Europe de l’Est (9%), l’Afrique (8%), le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (4%), puis l’Océanie (1%). Le rapport présente également un aperçu de la distribution de think tanks par pays au sein de chaque zone géographique. Signalons une évidence : le nombre de think tanks par région du monde est fortement corrélé au niveau de développement et à la place des pays sur la scène internationale.

Si depuis 1980 le nombre de think tanks a doublé (plusieurs facteurs sont avancés : la révolution de l’information, la fin du monopole gouvernemental de l’information, la technicité croissante des problèmes politiques, la multiplication des acteurs, etc.), il est frappant de constater que le nombre de créations a quant à lui chuté de façon vertigineuse depuis 7 ans (l’environnement serait devenu plus hostile aux think tanks et aux ONG, les bailleurs de fond auraient changé de priorités, etc.).

Comme toujours, ce genre de classement dépend des critères de notation retenus   et de la méthodologie déployée. Sont ainsi pris en compte, par exemple, la capacité à attirer les meilleurs chercheurs et experts, la réputation académique, le nombre de recommandations débouchant sur des politiques publiques, le nombre de personnel nommé à des postes officiels (pensons par exemple à l’attribution, annoncée hier, de la direction générale de l’agence gouvernementale suédoise en charges des questions européennes – SIEPS – à Anna Stellinger, conseiller de la Fondation pour l’innovation politique), l’aptitude à devenir un lieu ou un acteur central du débat public, etc.

Le Global "Go-to Think Tanks" propose différents classements. D’un point de vue général, il sépare en deux résultats différents les think tanks états-uniens des autres. Pour les premiers, les trois think tanks les plus influents seraient la Brookings Institution   , le Council of Foreign Relations et le Canergie Endowment for International Peace   . Pour les autres : Chatam House   (Royaume-Uni), l’International Institute for Strategic Studies   (Royaume-Uni) et le Stockholm International Peace Research Institute   . Le premier think tank français (19ème) est l’Institut français des relations internationales (IFRI), fondé en 1979 par Thierry de Montbrial.

Les résultats sont ensuite présentés par aire géographique. On y retrouve aux premières places, en Europe occidentale, Chatam House et l’International Institute for Strategic Studies, suivis par le Stockholm International Peace Research Institute puis l’IFRI   (seul think tank français classé dans les 20 premiers).

Mais est-il pertinent de comparer des organismes qui ont des identités si distinctes ? Comme le rappelle James G. McGann dans son avant propos, les types de think tanks sont en effet multiples : certains ont une spécialité internationale, d’autre interne ; certains s’attachent à produire des analyses sur les problématiques environnementales, d’autres étudient l’économie ou la société ; certains sont très partisans, d’autres plus indépendants ; certains disposent de ressources faibles, quand d’autres ne peuvent compter que sur une poignée de personnes, etc. L’auteur a donc cherché à corriger ce défaut en ajoutant un classement supplémentaire, ordonné par thème de recherche, au niveau mondial. Celui-ci met en évidence une très nette domination américaine – d’aucuns, comme Think Tank Watcher, invitent les Européens à établir "leur propre baromètre d’influence". On regrettera que le rapport n’ait pu présenter ces classements par aires régionales. Il est en effet aussi intéressant de savoir quel think tank est supposé être le plus performant à l’échelle mondiale sur l’environnement   , par exemple, qu’à l’échelle européenne.

Think Tank Watcher a par ailleurs comparé les budgets des dix premiers think tanks états-uniens et des dix premiers non états-uniens (tous européens) : les premiers investissent 5 fois plus dans l’influence des idées… Thibaudet serait-il davantage lu Outre-Atlantique ?

Signe encourageant toutefois pour l’Europe : parmi les meilleurs think tanks récemment créés, deux belges occupent les deux premières places : l’European Council on Foreign Relations, et Bruegel

 

* À lire également sur nonfiction.fr :

- Qu’est-ce qu’un think tank ?

- Notre dossier sur les nouveaux think tank français.