En 2005, Nicolas Wild part en Afghanistan pour mettre en images la constitution afghane. Ce voyage donne naissance à l'excellent 'Kaboul disco'.

Dans ce reportage dessiné de son voyage en Afghanistan (2005-2007), Nicolas Wild choisit de représenter la vie du point de vue des expatriés. Sur un ton léger mais jamais caricatural, il décrit les premiers mois de ses aventures comme graphiste à Kaboul. Tout commence par une petite annonce "agence de communication afghane cherche auteur de bande-dessinée pour travailler à Kaboul", et qui emmène l'auteur sur un terrain inconnu, dans un pays qui sort péniblement de la guerre. Il est chargé de dessiner la constitution afghane pour l'expliquer aux enfants, cibles privilégiées d'un plan de communication visant à redonner, à la nouvelle génération, confiance dans les institutions et la politique (sic).

La bande-dessinée qu'il nous offre se présente comme un journal de bord, émaillé de petites anecdotes et de passages plus pédagogiques (l'histoire de la Constitution afghane). Le trait est clair, efficace, et rend la lecture très agréable, en pointant les petits détails que les yeux avisés repèreront tout de suite (le tablier "Viva peron" du chef argentin de l’entreprise ; la musique de Carla Bruni dans le restaurant français où se retrouvent les expatriés; la jeune fille qui lit Harry Potter dans la voiture en plein Kaboul...). Au fil de son séjour, Nicolas Wild renouvelle son contrat et passe de la constitution expliquée aux enfants à la création d'affiches de propagande pour l'armée afghane. Il expose ses états d'âme sur la nature de son travail, et les conditions de vie des expatriés. La très grande majorité du récit concerne donc les membres de l’entreprise venus de tous pays et leurs aventures sur place, la façon dont ils s'adaptent les uns aux autres et à leur environnement. Pour autant, l'Afghanistan n'est pas absent de la BD, les dessins de paysages ou de rues et les rencontres avec des Afghans ancrent l'ouvrage dans le pays. Le risque est double quand on part point du de vue des expatriés : tomber dans un néo-colonialisme bienveillant à l'égard du pays, ou à l'inverse donner une vision délocalisée de la communauté étrangère, qui pourrait tout aussi bien être ailleurs. Nicolas Wild évite ces deux écueils et offre un livre drôle, intéressant et personnel.

Certains lecteurs seront peut-être désappointés par l'absence d'analyse géopolitique et la rareté des Afghans dans ce premier tome. Pourtant c'est là la principale qualité de Kaboul Disco : ne pas s'inventer sociologue ou géopoliticien. C'est le récit d'un dessinateur dans une entreprise de communication en Afghanistan. Point. Et le contrat est très réussi.


* Pour découvir des planches inédites et connaître l'actualité de Nicolas Wild, vous pouvez vous rendre sur son blog.