Il était temps : doucement mais sûrement, l’industrie du livre se prépare au numérique. Il faut dire que la révolution déjà survenue dans le monde de la musique et du cinéma a été plus longue à venir pour l’édition. Mais les perspectives d’avenir proche sont suffisamment claires pour que deux rapports réfléchissant à la question soient publiés quasi simultanément : le rapport Accueillir le numérique ?, d’abord, réalisé par la profession des libraires et paru vendredi dernier, et le rapport sur le livre numérique, dirigé par Bruno Patino   et remis ce lundi 30 juin à la ministre de la Culture et de la Communication Christine Albanel.


Ce dernier document, très fourni, devrait poser les bases d’une politique publique offensive à l’égard des détenteurs d’accès et de réseau visant à "rééquilibrer le dialogue" entre ces nouveaux acteurs du monde du livre et les détenteurs de droits (auteurs et éditeurs).

Les recommandations s’articulent  autour de quatre axes. Le rapport préconise d’abord la promotion d’une offre légale de qualité, en s’appuyant sur l’expérience des révolutions numériques éprouvées par les industries du cinéma et de la musique.  Deuxième axe, le renforcement de la propriété intellectuelle, qui selon le rapport "doit demeurer la clé de voûte de l’édition", mais s’adapter au numérique par des discussions interprofessionnelles, sans pour autant être remise en cause. Ensuite, le rapport souhaite confirmer le rôle central des détenteurs de droits dans la détermination des prix. À ce titre, l’absence de définition juridique du livre numérique est pointée du doigt : l’enjeu est bien d’appréhender  le passage du "livre objet" au "livre droit" dont les formats sont multipliés. Enfin, le rapport a rappelé la faiblesse sinon l’inexistence du lobbying en faveur de la propriété intellectuelle, et l’importance de la mise en place d’un groupe de pression capable de lutter contre la puissante activité des industries de télécommunications auprès des instances communautaires. La création du Conseil du livre, inauguré ce même jour par la ministre Culture et de la Communication, ambitionnant de réunir l’ensemble des acteurs du secteur, publics comme privés, pourrait aider à défricher ces dossiers pour le moins touffus.

L’objectif affiché par le rapport est donc bien de valoriser la propriété intellectuelle, déterminant exclusif de la diversité culturelle, au détriment des acteurs technologiques. De la part de la puissance publique, on ne pouvait s’attendre à autre chose.

 

* À lire également sur nonfiction.fr : le dossier livre 2.0.