Le Centre d'études prospectives et d'informations internationales décrypte cette année encore les grandes tendances de l'économie mondiale.

Le « Repères » sur l’économie mondiale que le Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) publie tous les ans à La Découverte est cette fois particulièrement réussi. 

Le premier chapitre s’attache à donner une vue d’ensemble d’une économie mondiale qui s’est fortement dégradée ces derniers mois avec le retour de l’inflation, le ralentissement de la croissance, les crises énergétique et alimentaire provoquées par la guerre en Ukraine ; il aborde également le risque de crise financière que pourraient entraîner cette dégradation des perspectives et le resserrement des conditions de financement, ainsi que le risque de voir la transition énergétique retardée.

Le chapitre suivant analyse les plans de soutien budgétaires mis en œuvre en 2020 et 2021 en réponse à la pandémie dans les principaux pays de l’Union européenne et aux États-Unis. Ces mesures ont consisté dans des aides aux entreprises (qui incluent les aides à l’emploi), qui ont représenté de loin la plus grosse part dans la plupart des pays européens et tout particulièrement en France, des aides aux ménages et enfin des dépenses d’investissement et de fonctionnement supplémentaires (notamment dans le domaine de la santé).

En soutenant l'activité sur la durée, elles ont permis de contenir l’augmentation de la dette publique, ce que n’avaient pas permis les politiques de rigueur mises en place trop tôt lors de la crise précédente ; elles ont également eu des effets positifs sur le chômage. Toutefois, elles ont sans doute (même si ce point devra être regardé plus sérieusement lorsqu'on disposera des données pour le faire) eu moins d’effets en ce qui concerne la limitation des inégalités, échouant à corriger les impacts différenciés, selon le revenu et le patrimoine, des mesures de confinement et de restriction adoptées.

Le chapitre trois montre des gouvernements tiraillés entre des objectifs contradictoires (protection du pouvoir d'achat, maintien de la compétitivité externe, gestion de la dette publique, transition énergétique), face au retour de l’inflation.

Les chapitres suivants s’efforcent de tirer les conséquences de cette nouvelle situation. Michel Aglietta et Renaud du Tertre plaident ainsi en faveur d’une évolution radicale de la gouvernance d’entreprise pour réaliser la transition énergétique et écologique. Ils préconisent d’abandonner la gouvernance actionnariale au profit d’un modèle partenarial, où le contrôle est exercé par des actionnaires responsables (comme on peut le trouver en Allemagne ou dans les pays scandinaves). Et d'adopter, d'une part, une politique de responsabilité sociale qui conduise les entreprises à intégrer à leurs stratégies les objectifs de développement durable (définis dans le cadre du Global Compact des Nations unies) sur lesquels elles peuvent agir et, d'autre part, de mettre en place un référentiel d’indicateurs environnementaux et sociaux harmonisés au niveau européen, permettant de suivre les progrès réalisés et d’orienter massivement l’investissement vers des activités vertes.

Cependant, les entreprises, expliquent-ils, ne seront à la fois incitées et contraintes d'inscrire leurs stratégies dans la transition énergétique et écologique que si les États adoptent eux-mêmes des politques économiques allant dans ce sens. Les auteurs insistent en particulier sur l'importance de mettre en place, sans plus tarder, une double valorisation du carbone consistant à donner à la fois un prix au carbone incorporé et au carbone évité (pour inciter les entreprises à investir dans les technologies bas carbone).

Le chapitre suivant, particulièrement intéressant, explore les moyens de mettre la politique commerciale au service du changement climatique, après avoir détaillé les différents impacts, directs et indirects, parfois particulièrement difficiles à évaluer, du commerce sur celui-ci.

L’avant dernier chapitre explore la notion d’autonomie stratégique ouverte qui est devenue un axe structurant de la communication de la Commission européenne, traduisant la nouvelle prise en compte par celle-ci des conditions géopolitiques.

Un dernier chapitre enfin fait le point sur les réalités de l’immigration en Europe et le décalage qui peut exister entre celles-ci et la perception qu’en ont les Européens, qui peut conditionner les opinions politiques, et dont on peut se demander dans quelle mesure il n’est pas induit par la présentation qu’en donnent les médias.

Une présentation en ligne permet d'approfondir tous ces sujets.