Ce volume collectif montre comment les écrivains, de George Sand aux poètes russes de l’âge d’argent en passant par André Gide, se sont nourris de l’œuvre de Frédéric Chopin.

Pourquoi Chopin ? Voilà bien une question à laquelle il serait vain de prétendre répondre. Elle constitue pourtant en quelque sorte la problématique matricielle de ce volume : pourquoi tant d’écrivains ont-ils recours à Chopin quand il s’agit de penser leur propre esthétique, de combattre une esthétique adverse – celle de Wagner par exemple –, ou plus simplement d’évoquer leur amour pour la musique ? À quelle vertu singulière faut-il attribuer ce succès quasi universel ?

Du Chopin de George Sand et d’Eugène Delacroix à celui des auteurs de littérature populaire contemporains (parmi lesquels Frédéric Dard) en passant, entre autres, par le Chopin du librettiste Angiolo Orvieto, par celui des poètes russes de l’âge d’argent, par celui des écrivains ukrainiens Lessia Oukraïnka et Maxime Rylski, ou encore par celui de musicologues comme Alfred James Hipkins ou Thérèse Marix-Spire, cet ouvrage collectif tente de montrer combien le monde des lettres éclaire le monde des sons, et comment l’écriture dialogue avec la musique de Chopin, l’une enrichissant l’autre.

Voici quelques-uns des axes qui structurent cette réflexion collective sur la façon dont la figure et la production du compositeur ont alimenté nombre d’œuvres littéraires :

– En quoi la littérature a-t-elle contribué à la formation de la figure (pour ne pas dire du mythe) de Chopin ?

– Qu’apporte l’œuvre de Chopin à la littérature ? Peut-on écrire à la manière de Chopin ? L’œuvre de Chopin est-elle l’expression d’un ethos artistique qui serait praticable en littérature ?

– Ces mêmes questions peuvent tout aussi bien s’appliquer à la peinture : car le portrait du compositeur par Delacroix a, c’est une évidence, concouru à la création de ce qu’on peut appeler un imaginaire Chopin. En outre, l’œuvre de Chopin a directement inspiré les peintres – à commencer par Delacroix justement.

Ce qui ressort de ce parcours à travers les textes consacrés à Chopin, c’est l’image d’un compositeur constitutivement intime, qui se laisse volontiers réduire à l’état de spectre, mais qui est aussi capable de se transformer en héros populaire, et par conséquent hante plus d’une poétique littéraire, du romantisme épique des écrivains polonais qui furent ses contemporains à la truculence concertée de San-Antonio en passant par le classicisme presque austère d’André Gide.