Sébastien Barrier, animateur du festival « Nous autres », présente le « Cabaret des savoirs», l'« Apéro des savoirs » et le grand jeu « La Macédoine (Big Battle 2) ».

* Cet entretien a été réalisé dans le cadre du partenariat de Nonfiction avec le festival Nous Autres de Nantes (14-16 juin 2019) qui réunit artistes, historiens, conservateurs et amateurs pour proposer une autre manière de faire de l'histoire. Retrouvez tous nos articles sur le sujet ici.

 

Sébastien Barrier dans son spectacle Gus

 

Nonfiction : Sébastien Barrier, vous allez animer le festival « Nous autres », ses intermèdes et ses circulations. Vendredi à 22h ce sera un « Cabaret des savoirs », dans le Hall du grand T ou dans son jardin ou dans son restaurant, où vous ferez parler les historiens ; samedi midi ce sera cette fois un « Apéro des savoirs » où les festivaliers qui auront participé à des ateliers du matin pourront prendre part ; et enfin samedi soir vous animerez un divertissement parodique, dans le style d’un grand jeu de télévision : Big battle 2 (nommé dans le programme La Macédoine). Concrètement, comment allez-vous vous y prendre ?

Sébastien Barrier : Les apéros des savoirs seront des temps de restitutions : les festivaliers qui auront participé aux différents ateliers du matin viendront nous en offrir le fruit et le résultat. Mon rôle sera de convier le public à ce rendez-vous, d’y faciliter la parole, de la lancer, de la faire tourner. Je serai une espèce de M. Loyal, présentateur, animateur et même ré-animateur ! Je serai là pour fluidifier les enchaînements, faire en sorte qu’il y ait à chaque fois un peu de répondant pour qu’on ne converse pas dans le vide. Essayer de reconduire d’une proposition à l’autre en tâchant de trouver des liens, des résonances entre chacune d’elles. J’arpenterai donc le hall et le parc du grand T pour prévenir que quelque chose va commencer puis j’essaierai d’offrir un peu de confort à ces personnes qui vont prendre la parole et qui, pour certaines, ne sont pas habituées à le faire.

Quant au cabaret des savoirs, il s’agit de mini-conférences données par des gens qui sont bien plus habitués à prendre la parole en public. Je serai le M. Loyal aussi de ces moments-là.

L’ensemble sera un peu touffu, assez dense et assez dispersé dans le grand site du grand T, avec un peu d’humour et pas mal d’improvisations. Dans ce festival, je suis un peu l’historien du présent, au sens où je fais l’histoire cinq minutes après qu’elle ait eu lieu. Il s’agit de collecter et de connecter le maximum de ce qui se sera passé ici.

Et puis ces prises de parole auront lieu un peu partout : il faudra que je puisse rassembler un public à chaque fois pour que les participants s’expriment devant lui. Le théâtre est niché dans un parc où se trouvent maintenant deux nouveaux bâtiments très réussis avec des marches dont on pourrait faire un magnifique petit gradin d’extérieur. On s’autorisera peut-être à quitter le hall ou le restaurant pour aller jusque là, en plein air.

 

Dans Gus

 

Enfin, samedi soir il s’agira d’un grand jeu sur le grand plateau de la salle du grand T : Big battle 2, en référence à Big battle 1, que nous avions donné dans l’édition précédente du festival. Sans hésiter nous nous inspirons là de l’esthétique, du rythme et des oripeaux des jeux de télévisions, pour y jeter les historiens. Ils pourront, dans ce jeu concours, inviter leur mauvaise foi, accepter les coups bas, autoriser tous les débords et l’humour. Il y a deux ans, ils se sont régalés de l’exercice, pour lequel leur maîtrise de la langue et leur grande culture les rend très adroits.

Cette année, ils sont une douzaine : des artistes, des historiens et des historiennes. Nous leur proposerons de nous livrer un récit sur un homme-monde ou une femme-monde, auquel, à l’issue d’un vote, on donnera la palme. Il faudra sélectionner le plus convainquant, le plus touchant, celui qui sera le plus beau récit-monde dont un homme-monde ait été l’objet.

 

Pourquoi un M. Loyal dans un festival d’historiens ?

Par-delà l’intérêt de lier les festivaliers et les événements du festival entre eux, Catherine Blondeau   est sensible au fait que parfois les propositions sont un peu sages. Elle compte sur moi pour qu’elles le soient un peu moins. Je respecte tout et rien à la fois. Je peux être un peu irrévérencieux, un peu caustique, un peu ironique, un peu piquant et drôle. Le principe de cette manifestation est de rendre la parole savante un peu plus accessible. L’idée est de faire descendre les historiens et les historiennes de leur possible piédestal pour qu’on désacralise un peu la discipline. Et comme je ne peux officier autrement qu’en étant à peu près drôle, il y aura nécessairement une place pour l’humour, une place pour l’autodérision, une place pour la moquerie, afin de rendre l’événement un peu moins grave et moins sérieux, sans pour autant lisser la qualité du propos historique et scientifique.

 

Dans Savoir enfin qui nous buvons

 

L’autre enjeu de la recherche historienne à ce festival, c’est le rapprochement de la recherche et de la création artistique. Votre participation s’inscrit dans ce rapprochement.

Le premier travail de Catherine est d’essayer de démocratiser, même si le mot paraît un peu essoufflé aujourd’hui. En l’occurrence, ramener au théâtre des gens par le biais de l’intérêt pour l’histoire. Beaucoup d’étudiants des universités nantaises seront là ce week-end.

Or quand Patrick Boucheron prend la parole au Collège de France, c’est un acte éminemment théâtral inscrit dans un contexte scientifique. Quand on le retrouve sur un plateau de théâtre – car Patrick Boucheron est attiré par le théâtre et y poursuit une expérience – il engendre un nouvel espace de rencontre entre les publics et sa parole. Cette parole prend une couleur, elle prend une dimension, une émotion qu’elle aurait peut-être moins dans le cadre d’un colloque d’historiens. Avec les atours du théâtre, avec les lumières, avec le son, avec la scénographie, elle prend plus de valeur et de poids, elle est entendue par d’autres personnes et un public plus large. Quand Catherine confronte Mohamed El Khatib, qui n’a pas attendu non plus pour se frotter aux historiens, elle sollicite un mélange fertile des savoirs-faire.

Et puis il faut rappeler que le théâtre est histoire. Le théâtre est narration. Il raconte, avec cette sensibilité qui lui est propre, avec cette place pour l’émotion, avec cette place aussi pour la fiction elle-même. C’est le moment de réunir ces deux pratiques et de faire en sorte qu’elles se nourrissent mutuellement.

 

INFORMATIONS PRATIQUES :

 

Cabaret des savoirs : Série de flash-conférences animées par Sébastien Barrier

(Vendredi 14 juin 2019, 22h00, Le Hall, Le Jardin, Le Resto)

Résumé : Toute la soirée, Sébastien Barrier, bonimenteur ré-animateur du festival, distribue la parole aux historiens invités pour des flash-conférences d’environ quinze minutes, qui explorent les facettes multiples de la notion d’homme-monde.

Les flash-conférenciers : Mélanie Traversier, Marie-Laure Crochant, Pierre Singaravélou, Quentin Deluermoz, Yann Lignereux, Romaric Perrocheau, Adrien Genoudet

 

Apéro des savoirs : État des lieux de l’homme monde à l’heure de l’apéro animé par Sébastien Barrier

(Samedi 15 juin 2019, 12h00, Le Hall, Le Jardin, Le Resto)

Résumé : Dans le hall du théâtre, dans le jardin, sur la petite scène installée dans le Resto, sous la houlette de Sébastien Barrier, artiste associé au Grand T, historiens et festivaliers rendent compte des ateliers du matin pour les spectateurs tout juste arrivés lors de courtes prises de parole ou de temps performés.

Intervenants : Rubén Constant, Jérôme Wilgaux, Jean Dytar, Samir Boumediene, Nicole Pellegrin, Pierre Singaravélou, Quentin Deluermoz, Nganga Daouda

 

La Macédoine (Big Battle 2) : Grand jeu de plateau animé par Sébastien Barrier

(Samedi 15 juin 2019, 21h30, La Grande salle)

Résumé : Sébastien Barrier orchestre une grand-messe des femmes et hommes-monde de toutes époques et tous horizons. Chaque participant, artiste ou historien, choisit un personnage dont il défend « l’homme-monditude » en essayant de faire mieux que les autres. Les récits s’enchaînent jusqu’à ce que tout cela finisse en délicieuse macédoine.