Des instances représentatives du personnel désormais davantage assujetties au pouvoir de l'employeur.

La Revue de l’IRES consacre un numéro spécial aux comités d’entreprise (CE) au moment où ceux-ci sont en passe d’être remplacés par les comités sociaux et économiques (CSE). Les auteurs des articles qui composent ce numéro reviennent ainsi, sous divers angles, sur cette institution centrale de notre système de relations professionnelles. Ils s’interrogent également sur ce qui pourrait changer avec la mise en place des CSE,  prévue au plus tard au 1er janvier 2020.

Carole Giraudet, auteure d'une thèse Théorie de l'institution et droit du travail, présente la façon dont le CE a été pensé en droit du travail en consacrant l’existence d’un collectif de salariés aux intérêts propres, formant une composante à part entière de l’entreprise, avant que les évolutions législatives de ces dernières années ne mettent à mal cette conception. Depuis 2013, les lois et les ordonnances récentes ont en effet encadré et sensiblement restreint, sous prétexte de rationalisation, les possibilités d’action autonome des CE, et désormais des CSE.

Tristan Haute analyse les résultats des élections aux CE. Il montre que la prise en compte de la taille de l’établissement mais surtout du secteur d’activité et de la catégorie d’appartenance des salariés, avec l’affaiblissement des catégories ouvrières, déterminent pour une large part les évolutions récentes du paysage syndical, même si celles-ci ne semblent pas pouvoir expliquer en totalité le recul de la CGT.

Sophie Béroud et François Duchêne s’intéressent aux activités culturelles et de loisirs proposées par les élus des CE, contraints de composer avec la volonté de satisfaire la majorité des salariés et néanmoins porteurs, dans un (trop ?) petit nombre de cas, d’initiatives originales.

L’article suivant, signé d’un nombre plus important d’auteurs, est tiré d’un rapport financé par la DARES   qui portait sur les nouveaux outils de consultation issus de la loi de sécurisation de l’emploi de 2013, en particulier en ce qui concerne les orientations stratégiques. L’article souligne les difficultés d’appropriation de ces outils de la part, aussi bien, des directions d’entreprise que des élus de CE, comme la limitation des ressources et des moyens à disposition de ces derniers. Il pointe notamment le risque de surcharge de représentants du personnel en nombre limité et de plus en plus sollicités, en lien avec la centralisation du dialogue social qui accompagne l'hypercentralisation des décisions des entreprises. On peut alors craindre que ce risque soit plus avéré encore avec la mise en place des CSE, qui vont absorber les prérogatives des CHSCT   , qui étaient, contrairement aux CE, encore souvent exercées au plus près du terrain, et verront une diminution importante du nombre de représentants du personnel.

Enfin, Kevin Guillas-Cavan et Marcus Kahmann s’intéressent, dans un article à valeur d'exploration sur un sujet encore mal connu    aux rôles que peuvent jouer les experts auprès des comités d’entreprise, en distinguant entre celui de pédagogue, de conseiller ou de consultant, de diplomate, pour aplanir les tensions entre organisations syndicales, ou encore de coordinateur.