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Le livre de Thomas Fontaine affiche clairement son intention : il ouvre un tombeau pour les cheminots victimes de la répression nazie et de ses alliés vichystes pendant la Seconde Guerre mondiale. Il se veut en quelque sorte leur cimetière et décentre le regard habituellement porté sur ceux qui travaillèrent pour la SNCF durant les années d’Occupation. Car si on insiste souvent sur le rôle joué par cette entreprise dans la collaboration avec le nazisme, mettant à la disposition des autorités allemandes ses trains et ses hommes, les cheminots ont aussi été un des rouages essentiels de la Résistance intérieure. Plus largement, les multiples agents du transport ferroviaire ont payé un lourd tribut à la répression de l’occupant : plus de 2 000 d'entre eux sont morts en raison de la répression nazie, fusillés ou autrement exécutés de manière collective, auxquels s’ajoutent les presque 500 cheminots morts dans les maquis.
Les communistes et les autres
Le travail de Thomas Fontaine est remarquablement conduit. Il a coordonné une équipe d'une trentaine de contributeurs, historiens professionnels ou chercheurs indépendants, et signe une très bonne introduction qui met en perspective les biographies. Les statistiques fournies recoupent les caractéristiques générales des formes de la répression politique au cours de cette période. Les principales victimes de la répression sont communistes, ce qui s’explique par deux raisons. D’abord, parce que depuis la grande grève de 1920, le PCF a été particulièrement bien représenté dans le monde des cheminots, à l’image de son ancien secrétaire général, Pierre Sémard, fusillé en 1941 comme otage, ou à l’instar de Gaston Monmousseau, l’un des membres du parti qui a marqué par sa longévité à la tête des instances dirigeantes avant de devenir l’un des animateurs de la Résistance communiste en zone sud – même si l’on se doit d’ajouter que nombre d’entre eux n’étaient plus cheminots mais permanents politiques depuis longtemps. En deuxième lieu, à partir de 1941, les forces communistes, qui en termes d’effectifs étaient particulièrement importantes, se sont lancées à corps perdu dans la résistance. Cependant, la lecture des notices montre également que tous les cheminots n’étaient pas communistes, loin s’en faut, et Thomas Fontaine insiste sur cette pluralité des engagements.
Une image de la Résistance en France
Ce livre mémorial permet aussi de voir saillir divers aspects de la condition ouvrière et de la répression par l’occupant, soit directement, soit en creux. Ainsi, la structure et la répartition selon l’âge des victimes de la répression donnent une mesure des formes du recrutement de la SNCF. Il en est de même pour l’origine géographique des victimes. Elle indique la densité du réseau ferroviaire à l’échelle locale, et surtout, elle explique en partie l’ampleur de la participation des cheminots à la Résistance selon un prisme régional.
L’analyse des motifs d’arrestation est une donnée également importante. Près de la moitié des cheminots victimes de la répression sont arrêtés, fusillés ou déportés parce qu’ils participent à un réseau de Résistance, soit dans la lutte armée, soit par l’adhésion à une organisation politique hostile à l’occupation. Nombre de cheminots sont également victimes de la politique des otages à partir de l’été 1941 ou des exécutions sommaires du printemps et de l’été 1944.
Biographies et archives
Ces considérations d’ordre général montrent combien cette somme constitue une ressource particulièrement riche pour l’analyse de la tragédie des destinées individuelles ou pour étayer la violence de l’occupation. Ce qui en fait un outil important pour toute personne travaillant aussi bien sur la résistance que sur le monde ouvrier. Une remarque cependant s’impose au sujet des sources, qui proviennent pour l’essentiel des dossiers qui ont permis aux familles d’obtenir le statut de victimes, et qui ne permettent pas de connaître l’action réelle des résistants concernés. Cette remarque ne minimise en rien la qualité du travail, mais elle incite à poursuivre les recherches
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