* Critique publiée sur le site Les 5 Pièces, qui propose tous les mois une sélection de cinq pièces incontournables à Paris.
Lorsque Rodrigo Garcia écrit, il ne pense pas au théâtre. Peu importe s'il se fait obstacle à lui-même, et peu importe si cela part souvent dans tous les sens, et toujours trop loin. C'est précisément ce qui fait son génie. Dans son dernier spectacle, 4, il nous demande expressément de trouver un sens à ce qu'il nous jette en pleine face : des coqs chaussés de petites baskets de running, un drone à grelots, une partie de tennis sur L'Origine du monde de Gustave Courbet, des passages de dessins animés, des poèmes, et une mémorable bataille amoureuse entre deux personnages aspergés d'eau sur un savon de Marseille géant. Rodrigo Garcia cherche à nous parler autrement qu'en mettant deux comédiens face à face, il veut que nous entrions dans son univers avec le sentiment d'être en train de vivre un rêve étrange, peuplé de souvenirs aussi difformes que réalistes. Pour aimer cette pièce, il faut accepter la gêne, le bruit, la violence verbale et l'incohérence.
Une nouvelle fois, Rodrigo Garcia essaye de se surprendre lui-même, et d'aller là où il ne s'attend pas. C'est sans doute pour cette raison que l'on a l'impression d'assister à un spectacle qui n'est pas à proprement parler du théâtre, mais davantage une performance visuelle et auditive composée d'un agrégat d'idées saugrenues s'additionnant les unes aux autres. Les comédiens vivent chaque scène avec une intensité rare, et semblent former un tout cohérent là où Rodrigo Garcia nous dévoile une fois de plus une de ses multiples personnalités.
Théâtre de Nanterre-Amandiers