La surprise Foxcatcher tient à son mélange réussi entre film psychologique, sportif et historique. Bennett Miller, après Truman Capote et Le Stratège, parvient à conjuguer une réflexion sur la construction identitaire, un point de vue rare sur la lutte olympique et un rapport ambigu à la géopolitique de la Guerre froide.

Les frères Schultz, médaillés d’or aux jeux Olympiques de 1984, sont invités à préparer les prochaines échéances sportives dans une grande propriété du Delaware, sous la houlette de John E. Du Pont, milliardaire héritier de la famille d’industriels Du Pont de Nemours. L’équipe Foxcatcher, nommée en hommage à la chasse au renard que pratique la mère du bonhomme, a pour ambition de défendre la fierté des Etats-Unis dans la rivalité qui l’oppose à l'URSS, en particulier dans la lutte gréco-romaine ! Cette opération est autant une ambition personnelle de John qu’une opération de relations publiques et de promotion de l’Amérique pour ce vendeur d’armes philanthrope. La combinaison de nylon et les cargaisons de bombes, voilà les produits de l’entreprise Dupont de Nemours pour la défense de l’Amérique.

La lutte, cette embrassade musclée manquant à chaque instant de basculer, se présente comme la grande métaphore du film, rappelant, par son rapport au corps et à la matière, l’aspect éminemment cinématographique du sport. Plus loin, Foxcatcher pose la question du patriotisme et réinscrit le sport de haut niveau dans les logiques d’influences géopolitiques qui caractérisent encore aujourd’hui les JO. La superposition des enjeux dont rend compte le film affine la réflexion et contribue à réactualiser intelligemment cette problématique typique de la Guerre froide, pas si fréquemment bien traitée au cinéma