Un journal qui ne parle pas des candidats, pas de la campagne, pas des meetings, pas des sondages, pas plus des petites phrases que des grands discours : c’est 6 semaines avant l’élection. Le décompte a commencé à 9, avec la première parution le 29 février ; mercredi ce sera déjà 5 et ça s’arrête à 1. Le canard, fondé par Frédéric Pajak, se veut "incrédule, révolté, rêveur, insupportablement grave, absolument pas sérieux et irrésistiblement intelligent".

On y trouve un peu tout ça, dans une composition de bric et de broc. En l’absence de tout autre ligne éditoriale que celle d’éviter de parler des candidats, credo inscrit en une du journal, il se produit une bizarre alchimie ; cet ensemble hétéroclite de dessins, chroniques, humeurs et exercices de style s’assemble en un tout cohérent, drôle, agréable, très pertinent et d’une appréciable finesse. Le secret de fabrication : la qualité des plumes et crayons convoqués. Geneviève Brisac, Delfeil de Ton, Sempé, Willem, etc. ; Pajak s’est bien entouré.

Le quatrième numéro, 6 semaines avant l’élection, est consacré au plaisir. En vrac et entre autres, on y trouve une discussion sur la jambe féminine, un pamphlet contre Bataille, un hommage à Karen Bach.   Dans une pseudo-liste de signatures, l’auteur Jérôme Leroy invoque le parrainage spirituel de 158 grandes figures littérairo-historiques – Karl Marx, Arthur Rimbaud, Olympe de Gouges, etc. Comme quoi, ne pas parler élection ne veut pas dire ne pas parler politique. D’ailleurs, un précédent numéro publiait des lignes où le philosophe Peter Sloterdijk se demandait "payer des impôts, pourquoi faire ?". Le journal est parsemé de d’illustrations, strips comiques et très beaux dessins. La double page centrale est toujours occupée par une image grand format ; cette semaine, c’est une reproduction d’une toile d’Olivier O. Olivier . De tout, on vous dit !

Un intermède rafraîchissant dans le brouhaha de la campagne, pour encore 6 semaines avant l’élection. Six numéros. Encore ou seulement six semaines avant l’élection ?