Depuis novembre 2011, la polémique autour du film Le mur  de Sophie Robert a réintroduit, sur la scène médiatique, la question du soin et de la prise en charge des autistes. Le documentaire, porteur d’une critique virulente du traitement psychanalytique de l’autisme, a été condamné le 26 janvier par le tribunal de grande instance de Lille pour « dénaturation des propos » des interviewés. Pour autant, dans l’attente de la publication des « recommandations de bonnes pratiques sur l’autisme » par la Haute Autorité de Santé (HAS) le 6 mars prochain, le débat se poursuit.

Enfin le débat… Le mot est bien loin de refléter la réalité. Car les médias ne nous offrent rien d’autre à voir que le triste spectacle de deux professions se livrant un combat stérile pour l’hégémonie d’un champ médical. A cet égard, les titres des articles sont éloquents. Le Monde titre ainsi  "Guerre ouverte contre la psychanalyse dans le traitement de l’autisme " et le Nouvel Obs " Autisme, pourquoi les psychanalystes ont perdus " . Les adeptes des méthodes comportementalistes, appuyés par les pouvoirs publics, ouvrent un procès en règle contre les psychanalystes. Ces derniers tentent de contre-attaquer en se justifiant , ou en appelant à une évolution de leurs pratiques . Dans cette guerre insensée, tous les coups sont permis et les arguments frôlent parfois l’absurdité. Les uns criant au scandale quant à la technique du Packing, les autres qualifiant les traitements comportementalistes, fondés sur l’apprentissage et l’éducation, de " dressage ". Partout, on crie à la religion d’état. Tout le monde s’épuise dans des discussions qui ne mènent nulle part, et on en oublie les autistes.

A dépasser le vernis passionnel et sensationnaliste de ces querelles de chapelle, force est de constater que le débat sur l’autisme est symptomatique de certaines évolutions de la médecine et de la santé publique. " La fin du règne de la psychanalyse " - dira-t-on pour reprendre les mots du Point – n’est pas propre au traitement de l’autisme : c’est du champ entier de la psychiatrie que cette discipline tend à disparaître. Les recherches cognitivistes et les avancées de la médecine aidant, on fantasme de pouvoir un jour tout expliquer par la physiologie, et réduire par là à néant la part d’inconnue intrinsèque à toute affliction. Substituer un traitement comportementaliste à un traitement psychanalytique pour les autistes, c’est faire de leur maladie un handicap mental. C’est réduire à la génétique un enchevêtrement autrement plus complexe de causalités. Face à cette maladie qui les laisse encore largement démunis, les thérapeutes, quels qu’ils soient, ne feraient-ils pas mieux de faire preuve d’humilité et d’unir leurs forces ?