Le Conseil Economique et Social vient de publier un avis sur le rapport de Laurent Bérail à propos du travail des étudiants. Le CES s’est saisi d’un phénomène dont l’ampleur est mal connue et qui, par conséquent, n’est pas au cœur des politiques en direction des étudiants. Il concerne 3 étudiants sur 4 au cours de l’année universitaire, y compris l’été : plus de 40% exercent une activité rémunérée pendant l’année universitaire et 15 à 20% des étudiants travaillent de façon régulière pendant leurs études.

Comme souvent, cette honorable institution développe une analyse et émet des propositions innovantes qui ne considèrent pas le phénomène uniquement d’un point de vue financier mais aussi sous l’angle de l’autonomie, de l’expérience, de l’insertion professionnelle. À bien des égards, une prise en compte accrue du travail étudiant par les universités, par les entreprises et par les pouvoirs publics pourrait avoir des conséquences bénéfiques sur la globalité du système d’enseignement supérieur français.


La réalité du travail étudiant

Le CES fait un constat intéressant de la situation actuelle du travail étudiant. Si les motivations sont principalement financières, elles peuvent également être fondées sur d’autres considérations : le souhait d’autonomie et de reconnaissance sociale, la volonté de découvrir le monde du travail ou la recherche d’expérience professionnelle. Selon des études, le volume horaire de travail, inférieur à 15 heures hebdomadaire, porte peu préjudice à la réussite universitaire ou à la santé physiologique et psychologique des étudiants.


Faire du travail étudiant un atout

Dans un souci de réduire les injustices sociales, le CES affirme qu’il faut minimiser la nécessité du travail étudiant – notamment en rendant le système d’aides sociales en direction des étudiants plus efficace - mais ne s’y oppose pas par principe. À vrai dire, les étudiants eux-mêmes ne s’y opposent pas, sous certaines réserves. L’avis du CES propose donc le développement des atouts du travail étudiant par le rapprochement mutuel du monde du travail et du monde éducatif.

Les universités doivent transformer leur approche de la situation des étudiants salariés. Parmi de nombreuses propositions très concrètes, le CES propose à raison de tirer pleinement parti de la nouvelle mission d’insertion professionnelle des universités : en intégrant le travail étudiant dans le module de projet professionnel ou en le reconnaissant par l’attribution de crédits ECTS. Et pour que cette nouvelle mission d’insertion professionnelle devienne une réalité pour chaque étudiant, l’assemblée détaille les nombreux préalables en termes de moyens matériels et de compétences nécessaires dans les universités.

À la lecture de cette analyse experte de la situation, il ne faut pas oublier que les obstacles, notamment politiques, pour permettre de répondre à ces exigences sont nombreux dans les universités. La prise en compte du salariat étudiant dans le cursus universitaire afin d'en faire un atout est un des principaux combats de la Confédération Etudiante. L’Unef, quant à elle, s’oppose à ces propositions. Pour ce syndicat, l’insertion professionnelle ne peut se faire que grâce au diplôme ou à la qualification et n’envisage le salariat étudiant que sous l’angle financier. Dans les entreprises, les spécificités des salariés étudiants doivent être prises en compte, notamment par une évolution du droit social, avec l’instauration d’un "congé de droit pour les examens".

Cette volonté de valoriser le travail des étudiants est toutefois limitée. Pour le CES, le système d’aides sociales doit être suffisamment performant pour qu’aucun étudiant ne soit contraint de travailler au-delà de 15 heures par semaine.

Ce rapport est, en somme, une mine de propositions très concrètes pour améliorer les conditions d’études et de vie des étudiants et pour créer les ponts indispensables entre le monde du travail et le monde éducatif.


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