Un outil incontournable pour comprendre une matière qui est de plus en plus exposée à l’actualité.
L’ouvrage “Droit médical” du professeur de droit Jean-René Binet se décompose en deux parties, l’une intitulée “Cours” rédigée par l’auteur et l’autre intitulée “Travaux dirigés” rédigée par ses collègues et doctorants.
Dans l’introduction, Jean-René Binet indique que “le droit médical est l’ensemble des relations juridiques dans lesquelles est engagée le médecin, représentant d’une profession comprenant, en France, 260 000 membres” (p. 3). La santé ayant une place de plus en plus croissante, ce droit a évolué. S’il trouve un fort ancrage dans le droit civil, il est devenu “une véritable branche du droit avec de puissantes racines et de nombreuses ramifications” (p.2), parmi lesquelles figure le droit des activités biomédicales. Avant d’approfondir le contenu de ce droit, l’auteur étudie ses sources, qu’elles soient juridiques (supranationales et internes) ou d’origine professionnelle (il différencie ainsi des notions voisines, à savoir la déontologie et la bioéthique et pose l’épineuse question du passage de l’éthique au droit).
La partie “Cours” comprend deux sous-parties. La première sous-partie est relative à la relation médicale, c’est-à-dire cette “situation faite de confiance et de confidences entre le médecin et son patient” (p. 29). Elle est consacrée d’abord à ses acteurs, à savoir médecin et patient. Le premier jouit ainsi d’un monopole pour exercer sa profession, qui reste cependant soumise au respect d’un certain nombre de principes déontologiques et de certaines formes juridiques. Le second, quant à lui, bénéficie d’un certain nombre de droits, en tant que personne malade et usager du service de santé (droit à la protection de la santé, droit au respect de la dignité, droit au respect de l’intégrité corporelle) et en tant que malade en fin de vie (depuis la loi du 22 avril 2005 qui doit s’articuler avec le droit aux soins palliatifs).
Cette sous-partie est ensuite consacrée à la formation et au contenu de cette relation bipartite (supposant le consentement des deux acteurs et fixant leurs obligations respectives) et enfin aux activités biomédicales. Ces dernières sont abordées avec des intitulés libellés sous forme interrogative et rédigés de manière volontairement provocatrice : “Produire l’homme ?”, “Améliorer l’espèce humaine ?”, “Disposer de soi ?”, “Décoder l’humain ?”. Un tel choix a cependant pour mérite d’inviter le lecteur à s’interroger sur les questions éthiques posées par la médecine et les limites éventuelles de l’appréhension de l’éthique par le droit.
La seconde sous-partie intitulée « Responsabilité et indemnisation des dommages » se divise en trois sous-titres : la responsabilité civile, la responsabilité pénale et disciplinaire, et les régimes spéciaux d’indemnisation et assurances. C’est l’occasion pour Jean-René Binet de présenter les conditions de mise en œuvre de chaque régime et leur éventuelle articulation. On distingue ainsi les régimes de responsabilité civile pour faute des régimes de responsabilité sans faute (responsabilité du fait des infections nosocomiales, du fait des produits de santé, du fait des recherches biomédicales). Le système de réparation des victimes de dommages causés par la faute d’un médecin ou d’un établissement est dual. Il existe désormais une voix amiable depuis la loi du 4 mars 2002 devant les CRCI et une voix contentieuse devant le juge. On regrette l’absence d’évaluation de ce système. Malgré des objectifs affichés louables (notamment celui de faciliter l’indemnisation des victimes), la voie amiable n’est, en effet, pas exempte de critiques (opacité des avis, faiblesse des montants d’indemnisation, sous-représentation des patients par un avocat contrairement aux médecins et aux laboratoires).
De même, le développement relatif à la responsabilité du fait des produits défectueux apparaît succinct, même si la question est éminemment complexe et tributaire de nombreuses conditions. En revanche, l’auteur présente de manière concise les régimes spéciaux d’indemnisation et d’assurance et la responsabilité pénale et disciplinaire. La responsabilité pénale, rare en pratique car dissuasive, est mise en œuvre en cas d’infraction du médecin, telle l’atteinte à la vie et à l’intégrité corporelle, la mise en danger d’autrui, l’omission de porter secours, la violation du secret médical, les infractions relevant des pratiques biomédicales.
Indéniablement l’auteur veille à replacer chaque axe du droit médical dans son contexte et à présenter les évolutions tant jurisprudentielles que législatives.
Les annexes aussi variées que ciblées permettent d’éclairer les réflexions précédemment émises, puisqu’elles comprennent des documents de références (serment d’Hippocrate, Code de Nuremberg, Déclaration d’Helsinki, Code de déontologie médicale), des questionnements (liste des avis rendus par le CCNE), des modes juridiques d’exercice de la profession médicale (Modèle de statuts de SELARL de médecins, contrat de cession de cabinet, contrat entre praticiens et cliniques privées, contrat-type d’activité libérale en secteur hospitalier), des modalités de saisine des CRCI et de leur fonctionnement (formulaire de demande d’indemnisation auprès de la CRCI, barème d’évaluation du taux d’incapacité).
En outre et toujours dans un souci pratique, cet ouvrage comprend une partie intitulée “Travaux dirigés” qui constitue une réelle valeur ajoutée. Les nombreux conseils méthodologiques et les corrigés permettent ainsi de mieux appréhender la matière à travers différents exercices aussi divers que la dissertation, la consultation, le commentaire d’arrêt.
Cet ouvrage, principalement destiné, mais pas seulement, aux étudiants de master en droit, mais aussi aux étudiants en médecine, médecins et juristes, constitue un précieux outil pour appréhender une matière qui devient de plus en plus complexe. En alternant entre théorie et pratique, son auteur la rend plus facilement accessible