Alors que l’équipe de France de rugby fait pâle figure en Nouvelle-Zélande, le musée du quai Branly a inauguré mardi dernier une exposition conçue par des Maori et initialement présentée à Te Papa Tongarewa, le musée de Nouvelle-Zélande. Divisée en trois parties – identité et interconnexion, prestige et autorité, protection et préservation -, "Maori, leurs trésors ont une âme " se veut l’illustration du proverbe maori : "le passé est devant, l’avenir est derrière " . En mêlant objets anciens et contemporains, tels les outils ancestraux du TaMoko (art du tatouage) et le matériel désormais utilisé pour ces tatouages du visage, Te Papa Tongarewa et ses conservateurs ont souhaité mettre en scène l’importance de la filiation dans la culture maori. Importance symbolisée par le taonga, trésor sacré assurant la connexion du passé au présent, représenté sur l’affiche. Malheureusement, insuffisamment documentée, l’exposition manque de peu son ancrage dans le présent. En effet, si l’origine du combat maori contre l’aliénation de leurs terres en 1975 est expliquée, rien n’est dit des suites de la requête présentée au Premier ministre, Bill Rowling, par les participants à la « Land March ». Rien non plus sur l’aboutissement de l’incroyable protestation de fin 2004 pour dénoncer le Foreshore and Seabed Act. Faute d’éclairage sur les récentes batailles politiques et géographiques des Maori, les trésors exposés au Quai Branly perdent beaucoup de leur mana (force), laissant au visiteur l’impression d’avoir raté l’occasion d’un dialogue avec une culture pourtant bien vivante, ne serait-ce qu’à travers le terrifiant haka des All Blacks.
Le lendemain, le Grand Palais a ouvert ses galeries à la plus parisienne des familles américaines : les Stein. Organisée conjointement par la Rmn-Grand Palais, le Museum of Modern Art de San Francisco et le Met de New York, l’exposition retrace "l’aventure des Stein", une fratrie de collectionneurs avant-gardistes installée à Paris au début du XXe siècle. De la rue Madame à la rue de Fleurus, de l’aîné Michael et sa femme Sarah aux cadets, Léo et Gertrude, est retracé, à travers les toiles qui jadis composaient leur collection, le fabuleux rôle de précurseurs et de protecteurs des arts joué par chacun des membres de la famille Stein. Chacun avec sa préférence : Renoir pour Léo, Picasso pour Gertrude et Matisse pour Michael et Sarah. A ceux-là était réservée une place de choix parmi les toiles de maître, de Cézanne à Picabia, accrochées aux murs surchargés. Comme en témoignent les photographies de l’époque, c’était une véritable esthétique de l’abondance picturale qui régnait dans les deux appartements parisiens. Une esthétique oubliée par la scénographie de l’exposition qui profite de la superficie des galeries du Grand Palais pour aérer les cimaises. Mais, s’il n’est pas historiquement fidèle, cet espace permet tout de même au visiteur de jouir notamment d’un recul formidable sur le dialogue de trois majestueux nus de Bonnard, Matisse et Vallotton. En huit salles, les chefs d’œuvre et les trésors se succèdent : Les Cinq Baigneurs de Cézanne, le Nu bleu de Matisse, sa Femme au chapeau, les études préliminaires de Picasso pour Les Demoiselles d’Avignon, ... Pourtant, à l’image de bien d’autres avant lui, l’empire des Stein s’est peu à peu affaibli et dispersé. Il a connu des affres, telle " l’affaire Gurlitt " ou la perte d’une partie de la collection de Michael et Sarah, saisie à Berlin en 1914; ainsi que des luttes de pouvoir, comme en 1933, année de la parution de L’Autobiographie d’Alice B. Toklas, récit autobiographique de Gertrude qui la brouilla définitivement avec son frère aîné, Léo. Romanesque, l’aventure des Stein séduira en France comme elle a déjà séduit Outre-Atlantique

Maori, leurs trésors ont une âme
04 octobre 2011 – 21 janvier 2012
Musée du Quai Branly

Matisse, Cézanne, Picasso… L’aventure des Stein
05 octobre 2011 – 16 janvier 2012
Grand Palais Galeries Nationales