Lundi 14 mars, la Cité des Livres a reçu Gérard Collomb pour la sortie de son livre Et si la France s’éveillait …(Plon) Venu défendre un projet social-réformiste pour la France, le sénateur-maire de Lyon s’est montré intarissable sur la genèse de son projet éditorial, né après le Congrès de Reims de novembre 2008, ainsi que sur sa conception du socialisme, tel qu’il devrait être pensé et appliqué au XXIe siècle. 

 

De la réflexion théorique, l’ouvrage de Gérard Collomb s’est orienté, après une maturation de deux années, vers davantage de pratique pour élaborer un projet socialiste adapté au monde d’aujourd’hui. L’origine d’une telle évolution ? Le constat, après le Congrès de Reims, que le socialisme est touché par une malédiction : une position "gauchisante dès que l’on n’est plus au pouvoir" de la part des élus socialistes. En résulte une inertie du débat politique français, marqué à droite par une pensée jacobine incarnée par la politique gouvernementale et Nicolas Sarkozy tandis que la gauche se retranche derrière une conception social-étatique dépassée. 

 

Gérard Collomb souligne la singularité de la pensée française, qui privilégie, encore aujourd’hui, l’Etat-nation plutôt que l’Europe et les collectivités territoriales. Pour le sénateur-maire, il est nécessaire qu’une articulation entre les Etats européens et les territoires soit opérée, faute d’aller de l’avant. L’Union européenne apparaît donc comme l’avenir de l’Etat français, et le couple franco-allemand comme le véritable piler de la construction européenne. Il ne faut donc pas "laisser le couple franco-allemand se détricoter", au risque de voir la politique diplomatique française définitivement paralysée.

 

Gérard Collomb est ensuite revenu sur la façon dont devrait aujourd’hui être raisonné le socialisme, à l’aube des primaires et de 2012 : il se doit d’être avant tout un socialisme d’entreprise, de production. Il est nécessaire de se détacher de l’influence guesdiste et d’embrasser la pensée de Jean Jaurès pour que le socialisme, enfin, réinvestisse le monde de l’entreprise. En puisant dans les écrits de Saint-Simon, il définit la grande voie à tracer vers l’entrepreneuriat. Soutenant que l’on peut aujourd’hui "être entrepreneur et de gauche", Gérard Collomb voit dans le monde de l’entreprise l’avenir de la France, qui doit se repositionner sur les marchés internationaux malgré ses difficultés financières évidentes et son retard technologique. L’Etat doit trouver en ses ressources la capacité de créer et de redistribuer, mais aussi de s’organiser, selon Gérard Collomb, qui s’inspire ici de la pensée de Charles Fourier. Aussi, sur la question des 35 heures, le maire de Lyon ne le cache pas : il n’en a jamais été "un grand fan". Adaptées à la conjoncture d’alors, mais mauvaises pour la compétitivité française, elles se révèlent aujourd’hui obsolètes et, n’en déplaise à Manuel Valls, "des 35 heures, il ne subsiste désormais que le nom". 

 

En tant que président de la communauté urbaine du Grand Lyon   , Gérard Collomb s’est également prêté au jeu des questions des deux animateurs du débat, Yassir Hammoud   et Barnabé Louche   , sur la politique de la ville, sur les banlieues et sur l’attractivité des territoires, questions peu abordées dans les programmes socialistes. Pour le sénateur-maire, il est primordial de faire coïncider la réalité institutionnelle et la réalité socio-économique. Aussi, des mesures s’imposent : "arrêter de vouloir faire la même réforme pour tous les territoires" et œuvrer pour que les régions soient davantage impliquées dans les grandes politiques transversales – économiques et universitaires notamment. 

 

La politique de la ville est, pour Gérard Collomb, l’un des enjeux sur lequel le Parti socialiste doit se positionner pour être vainqueur en 2012. Il définit deux priorités : favoriser l’innovation et la recherche   et œuvrer pour la dé-ghettoïsation des quartiers et "un rebrassage social" au sein des villes. Gérard Collomb insiste sur la nécessité d’impliquer davantage les collectivités territoriales, et notamment les villes dans cette vaste restructuration du paysage urbain français, encore trop subordonné à la politique très centralisée de l’Etat : "il faut revenir aux grassroots" et privilégier le militantisme de terrain où les élus locaux seraient davantage impliqués et gagneraient en responsabilités en termes de politique urbaine. De même, "il faut promouvoir les nouvelles générations au sein des équipes municipales. La jeune génération est trop dans l’ombre des grands élus, elle ne va malheureusement pas assez sur le terrain". 

 

Revenir aux sources du socialisme tel qu’il a été défini par les grands penseurs de la gauche, en les adaptant à la réalité sociale d’aujourd’hui et en appliquant concrètement les grandes idées, tel est le programme que définit Gérard Collomb pour le Parti socialiste, lequel a "l’obligation de réussir", au risque, sinon, d’agrandir encore davantage le "boulevard vers le Front national"