Une série, non concertée, de manifestations autour du thème Arts et Sciences peut mobiliser le public ces temps-ci. Le Cube, le centre de création numérique d’Issy-les-Moulineaux propose un spectacle et une conférence de l’artiste Don Foresta ; la revue Théâtre-Magazine offre la lecture de plusieurs textes conçus autour de cette question ; enfin, Universcience (Palais de la Découverte et Cité des Sciences) invite le public à visiter une exposition portant sur les Survivants de l’extrême. Ces trois manifestations, qui ne sont pas les seules répertoriables, donnent à penser, moins sur les rapports Arts et Sciences, que sur la manière dont les uns et les autres conçoivent ce rapport relativement aux problèmes structurels de nos sociétés.

On sait que dans l’enseignement, sciences et arts représentent le plus souvent les deux extrêmes de l’orientation des élèves. Les collaborations entre ces deux domaines relèvent presque toujours de l’exotisme. Il est manifestement difficile de trouver une surface d’échange entre Arts et Sciences qui ne vire pas à la domination de l’un sur l’autre.

On peut relever de même que la division du travail dans la société, et les spécialisations instaurées, ont imposé une large domination des techniques, liées aux sciences, sur la société et les mœurs. Certes, les problèmes artificiels de la société en sont sans doute devenus plus maîtrisables, mais sans que les citoyens aient été appelés à la réflexion. D’un autre côté, les arts n’ont pas été impliqués de la même manière dans cette division. C’est probablement pour cela qu’ils ont pu, avec brio, se concentrer toujours plus sur l’analyse et la mise au jour de leurs propres conditions de travail et d’expression.

Cependant, les uns et les autres ne se sont pas rapportés de la même manière à l’espace public. Les sciences se sont retirées dans leur superbe, et les institutions scientifiques se sont longtemps coupées du débat public. Tandis qu’à l’inverse, les arts, quoique autotéliques, se sont laissés prendre à parti par le public. Les médias ne se sont pas fait faute de profiter de cette situation. Vis-à-vis des sciences, ils ont affirmé tout et n’importe quoi. Vis-à-vis des arts, ils ont renforcé le public dans ses convictions.

La conséquence : non seulement les deux domaines ont maintenu le fossé qui les séparait, mais encore l’espace public de discussion autour de ces questions est resté muet. Aussi est-il temps, effectivement, de multiplier les manifestations qui peuvent mettre en rapport les Arts et les Sciences, dans une société bloquée par l’enfermement dans des spécialisations. Mais sans doute sans tomber dans les pièges à chaque pas tendus : le schéma exalté d’une nouvelle Renaissance, la réduction des sciences aux usages quotidiens, les simplifications imposées par une offensive sur les techniques destinées à combattre le désespoir anti-technique, la confusion entre Sciences et Techniques, le maintien d’une conception de l’art relevant d’une époque antérieure au mépris des travaux des artistes, une épistémologie de l’alliance, ...