Blue Texan sur Firedoglake fait un tour des sites conservateurs après l’annonce la semaine dernière de l’arrestation par le FBI de 9 membres d’une milice d’extrême-droite dans le Michigan qui préparait le meurtre d’un policier. Blue Texan voit dans ces arrestations le signe de la présence de terroristes sur le sol américain, ce qui devrait logiquement paniquer les conservateurs qui ont soutenu Bush dans sa guerre contre le terrorisme : "Those are some serious charges. Attempted use of WMD. Seditious conspiracy. America’s vigilant Anti-Terror Warriors on the right will certainly be relieved and grateful that the FBI nabbed these guys, right? Nope. [les chefs d’accusation sont sérieux: tentative d’utilisation d’armes de destruction massive, complot séditieux…. Les vigilants guerriers anti-terroristes de la droite américaine vont certainement se sentir soulagés et heureux que le FBI a chopé ces mecs, hein ? et bien non]”

Effectivement, les principaux blogueurs de droite se sont montrés très sceptiques après le raid du FBI. Pour Classical Values, la police n’avait pas le droit d’intervenir car “Last time I looked, wanting to start a civil war (insane as it is) was not a crime. [Il faut garder à l’esprit qu’essayer de déclencher une guerre civile (même si cela semble fou) n’est pas un crime]” Un lecteur du site conservateur NRO voit dans cet évènement le déclenchement de la dictature obamienne : "We have to take a stand against creeping totalitarianism. I'll take the risk that the regime will somehow get the NRO donation list and use it to round up the freedom-loving counterrevolutionaries [Il nous faut réagir contre ce totalitarisme qui se propage. Je suis prêt à prendre le risque que le régime va mettre la main sur la liste de ceux qui ont fait un don au site pour arrêter tous les contre-révolutionnaires qui aiment la liberté]”. Même son de cloche sur le site FreeRepublic, où les internautes annoncent gravement "its starting...[ça commence…]" ou "0bama DEFINES who the legitimate authority is, and any opposition to this/him IS 'sedition' [Obama DEFINIT ce qu’est l’autorité légitime, et toute opposition devient une ‘sédition’]”. La droite américaine a toujours eu un substrat paranoïaque, comme l’a démontré le célèbre politique Richard Hofstadter. À l’évidence, le vote de la réforme de la santé confirme cette thèse : la blogosphère conservatrice semble de plus en plus paniquée et convaincue d’animer un mouvement réellement révolutionnaire. Son destin est de sauver la démocratie américaine des griffes de Barack Obama, par clavier interposé.

Une guerre civile unilatérale

Pour l’instant, le ton grandiloquent des blogueurs de droite ne rencontre pas vraiment d’écho dans la blogosphère libérale. La vision de la guerre civile en train de se déclencher est un délire circonscrit à la droite pour l’instant. Bien sûr, les bloggueurs pro-Obama voient la colère monter à droite, mais ils gardent une approche assez zen de la situation. La grande victoire sur la santé leur a incontestablement donné confiance et sérénité, leur prose est donc très calme. Ils continuent à pester contre les élus du parti républicain et leur éternelle hypocrisie quant à leur conception du rôle de l’Etat, cette fois à propos des milliards en argent public qu’Obama a investi dans l’économie américaine dans le cadre de son grand plan de relance. Ainsi, Steve Bennen sur le site du Washington Monthly dénonce une nouvelle facette de l’hypocrisie républicaine, celle des "highway hypocrites", les "hypocrites des autoroutes". Il souligne bien les rapports très compliqués entre les républicains et le rôle de l’Etat : “In February, around the time of the first anniversary of the Recovery Act, there was a fair amount of talk about 'highway hypocrites' -- congressional Republicans who voted against the stimulus, said the stimulus would fail, and said the stimulus has failed, but who nevertheless sought, received, and bragged about stimulus investments that they ostensibly opposed [En février, au moment du premier anniversaire de la grande loi de relance d’Obama, on a beaucoup parlé des ‘hypocrites des autoroutes’, ces élus républicains qui ont voté contre le plan de relance en disant que le plan allait échouer et qui continuent à dire qu’il a échoué, tout en demandant de l’argent public et en se vantant d’avoir permis les investissements publics dans leurs circonscriptions alors qu’ils étaient en réalité contre]. The phenomenon has grown since [le phénomène n’a fait qu’augmenter depuis]… There are only 177 House Republicans in Congress; when 128 of them try to claim credit for job-creation programs they opposed and fought to prevent, that's quite a bit of hypocrisy [Il y a seulement 177 républicains à la Chambre. Quand 128 d’entre eux se vantent d’être responsables des programmes de création d’emploi auxquels ils étaient opposés, et bien, c’est de la belle hypocrisie]. These same GOP officials said the stimulus is simply incapable of creating jobs and generating economic growth. But their letters to the administration prove that they actually believe recovery funds are capable of creating jobs and generating economic growth -- in their states and districts [Ces mêmes républicains qui disent que le plan de relance est tout simplement incapable de créer des emplois et de générer de la croissance économique envoient des lettres au gouvernement [pour demander de l’argent], des lettres qui prouvent qu’ils croient en réalité que les fonds de relance peuvent créer des emplois et générer de la croissance dans leurs États et leurs circonscriptions]. How can the party that created the fire, and then fought like hell to keep it burning, claim credibility over those who put it out? [Comment le parti qui a allumé le feu et qui a ensuite tout fait pour qu’il continue à brûler peut-il maintenant reprendre à son compte les résultats de ceux qui l’ont en réalité éteint?]”


Les blogueurs libéraux n’en restent pas moins fascinés par la révolte anti-Obamienne de la base conservatrice. Digby, sur Hulaballo, revient longuement sur une interview de David Letterman sur CBS, où ce présentateur de talk-show a reçu Pam Stout, une grand-mère de l’Idaho de 66 ans, membre du Tea Party Movement, ce tout récent mouvement ultra-conservateur apparu aux Etats-Unis après l’élection d’Obama et dont le héros est Glenn Beck, un présentateur de Fox News. Digby ressent un mélange d’horreur et de fascination pour cette femme: “She was pretty amazing. She was the best tea party representative I've ever seen [Elle était assez géniale, la meilleure porte-parole du mouvement tea party que j’ai jamais vue]--- I was blown away by this interview and frankly, a little bit chilled [j’ai été estomaquée par son interview, et aussi un petit peu effrayée]. She's mild-mannered, reasonable, utterly sincere, decent and true [elle est bien élevée, raisonnable, complètement sincère, décente, honnête]. Yet, she watches Beck because he 'makes her think' and she reveres Jim DeMint, the most radical of all the rightwing Senators [Bien sûr, elle regarde Beck parce qu’il 'la fait penser' et elle adore Jim DeMint, le plus radical des sénateurs conservateurs]. This lovely woman believes in the raw, violent politics of the Hobbesian jungle in which it's every man for himself. I'm sure she doesn't see it that way [cette femme adorable croit en une vision Hobbesienne de la politique, où tout est violence pure, où c’est chaque homme pour lui-même. Mais je suis sure qu’elle ne le réalise même pas]. Her politics aren't grounded in real life but in abstract concepts [son idéologie n’est pas basée sur la vraie vie, mais sur des concepts abstraits]. She certainly doesn't seem defensive or even aware that her political heroes are considered radical extremists [elle n’a pas du tout l’air d’être sur la défensive ou de réaliser que ses héros politiques sont tous considérés comme des extrémistes radicaux].” Pour ces blogueurs de gauche, la lutte contre la droite anti-obamienne passe donc encore par la traditionnelle communication politique, pas par les armes et la révolution