A l’occasion des Etats généraux de l’industrie, la fondation Terra Nova publie une note et propose des axes de réflexions pour la mise en œuvre d’une "nouvelle politique industrielle". L'auteur de cette note, Stéphane Israël, magistrat à la Cour des comptes, fait d’abord le bilan d’une "décennie noire" pour l’industrie française, où sa part dans la population active est passée de 16% à 13% et sa part dans la valeur ajoutée a chuté de 22% à 16%. De plus, il rappelle que depuis la crise économique, 269 000 emplois - hors intérimaires - ont été détruits dans l’industrie et que cette tendance devrait se poursuivre en 2010.

Cette désindustrialisation n’est pas propre à la France. Elle touche l’ensemble de l’Europe, à l’exception notable de l’Allemagne. L’industrie dans ce pays représente aujourd'hui encore 30% du PIB, mais Stéphane Israël rappelle, fort à propos, que ce "succès" allemand est dû, en partie, à une contraction de la masse salariale. Ainsi, l’Allemagne ne peut compter que sur ses exportations – notamment de machines-outils – pour accroître son PIB, car l’appauvrissement des travailleurs allemands a pour conséquence une chute de la consommation. La stratégie choisie par l’Allemagne n’est donc pas viable socialement et repose sur un équilibre économique précaire, en raison de sa dépendance à l’international.

L’existence d’un euro fort, handicapant pour les exportations, et l’absence d’une politique industrielle européenne ont permis aux pays émergents d’occuper le terrain de la compétition internationale. Face à ce constat, il faut relancer une politique industrielle, ce qui passe d'abord par une nécessaire rupture avec trois mythes : le mythe d’un pays sans industrie – aberrant du point de vue social, écologique et économique ; celui d’une industrie sans Etat – et l’auteur de rappeler le rôle de l’Etat dans l’histoire industrielle de tous les pays, occidentaux et émergents ; et enfin, le mythe d’un projet industriel exclusivement national.

Plusieurs pistes existent pour construire une nouvelle politique industrielle capable de faire face aux défis du XXIe siècle. A l’échelle nationale, il faut un sursaut technologique pour atteindre l’ « économie de la connaissance ». Celle-ci ne peut se faire que par l’investissement massif dans l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation. A l’échelle européenne, il faut, dans le cadre de la stratégie « Union Européenne 2020 », recentrer les priorités sur des grands projets industriels qui doivent être mis en œuvre conjointement par les pays de l’Union Européenne et remettre en question la politique monétaire de la BCE. Enfin, à l’échelle internationale, il faudrait que l’Europe, dans le cadre du G20, propose une nouvelle régulation monétaire.

Terra Nova ébauche, avec cette note, des propositions intéressantes pour faire face au déclin industriel qui touche la France mais aussi beaucoup de pays européens. Cette « nouvelle politique industrielle » a le mérite de dégager des axes d’actions clairs même si elle peine à se démarquer des propositions formulées par Nicolas Sarkozy en conclusion des Etats généraux de l’industrie. De plus, on peut regretter que la dimension écologique ne soit pas prise en compte, l’auteur se refusant à remettre en cause la mondialisation des échanges et l’utilisation massive des transports

 

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