Le mois de la « fierté gay » ne dure plus que quinze jours. Le mandat d’Obama sera-t-il suffisamment long pour faire évoluer les mentalités?

Lors de son passage en mai dernier à Paris, Judith Butler elle-même – sans conteste la plus experte des philosophes américaines quant aux questions de genre et de sexualité   – s’inquiétait de ce que Barak Obama ferait concrètement à propos des droits des minorités sexuelles : lesbiennes, gays, bi, trans (lgbt). Allait-il persister dans son mutisme ? Prendrait-il des mesures contre la fameuse loi du « don’t ask, don’t tell » qui imposait aux gays et lesbiennes engagés dans l’armée américaine le silence sur leurs vies privées ? Comment se positionnerait-il face à la ratification de la « proposition 8 » dans l’État de la Californie qui (18000 unions lgbt plus tard!) interdit purement et simplement le mariage entre personnes de même sexe ?

Quarante ans après les mythiques émeutes de Stonewall, qui réunirent un véritable mouvement de libération et de fierté parmi la communauté lgbt contre les oppressions répétées de la police new-yorkaise, le nouveau président des U.S.A., homme de toutes les attentes, a enfin pris clairement position. Bien que durant sa campagne électorale Obama, à l’instar d’Hillary Clinton, se soit montré plutôt froid quant à la possibilité d’un mariage entre personnes du même sexe, une déclaration datée du premier juin, consultable sur le site officiel de la Maison Blanche, affirme une véritable prise en compte et défense des droits des membres de la communauté lgtb: lutte contre l’homophobie, contre la discrimination sur le lieu de travail, révocation explicite de la politique du « don’t ask don’t tell », soutien des droits à l’adoption. Seule l’institution du mariage proprement dite semble manquer à ce tableau idyllique. En effet, Obama préfère continuer à parler « d’union civile » et de « droits fédéraux » pour les couples lgbt même si le mois de juin 2009 a été présidentiellement rebaptisé « mois des fiertés lgtb ».

C’est que la polémique autour du mariage bat son plein aux USA, notamment depuis l’épisode californien qui bannit de son sol tout mariage lgbt. Mais, selon un article du New York review, une nette tendance en faveur du mariage se dessinerait pourtant peu à peu aux USA. État après État, les différents avocats américains argumentent et démontrent comment le déni du mariage entre personnes du même sexe souffre d’une absence totale de fondements juridiques et de justifications scientifiques, à moins de cautionner une morale hétéro-puritaine qui confond systématiquement droit et convictions religieuses. Donc, même si Obama rechigne encore devant utilisation du terme, les cours et les lois des États de son pays semblent s’ouvrir à la reconnaissance de ce nouveau visage du mariage.

On ne peut que se réjouir de ces déclarations présidentielles et de ces différentes avancées légales. Reste à savoir, en ce mois de juin 2009 de la fierté et de l’orgueil lgtb, si les mentalités du peuple américain ont évolué en même temps que les réformes juridiques et, le cas échéant, si le mandat d’Obama sera suffisamment long pour les transformer. Quant au mystère ou à la magie qui poussent deux êtres à se lier pour « le meilleur et pour le pire », il reste complet...
 

* The White House, "Lesbian, Gay, Bisexual and Transgender Pride Month, 2009"

* David Cole, "The Same-Sex Future", New York Review of Books, volume 56, n°11, 2 juillet 2009