Jérémie Cohen Setton inaugure une revue des blogs économiques.

 

Obama et sa politique commerciale

D’abord confiant dans les projets économiques du nouveau président, Jagdish Bhagwati  (un des spécialistes mondiaux de l’économie internationale, et défenseur invétéré de l’ouverture commerciale) a changé d’avis avant même la prestation de serment. Son article dans Vox explique que la liste des conseillers d’Obama, ainsi que ceux qu’il a nommés à des postes officiels, inclue des protectionnistes notoires. Le problème est en fait qu’Obama n’a rien fait pour montrer qu’il s’était détaché des vieilles idées protectionnistes, comme le projet de sauvetage de l’industrie automobile, qui rappelle les mesures douanières Smoot-Hawley, dans les années 1930. Pour Bhagwati, il est important qu’Obama déclare sans ambiguïté que toute action qu’il prendra sera cohérente avec les engagements des États-Unis vis-à-vis de l’OMC.

 

Réinventer la politique monétaire

Willem Buiter définit "l’assouplissement quantitatif" comme l’accroissement de la taille du passif d’une Banque centrale, via sa composante monétaire, la composition de l’actif restant identique ; et "l’assouplissement qualitatif" comme un mouvement vers des actifs moins liquides et plus risqués, la taille restant alors constante. Dans un discours récent à la London School of Economics, Ben Bernanke a utilisé une distinction similaire, opposant la politique japonaise dans les années 2000, qui ressemble davantage à la première stratégie, au chemin qu’aimerait prendre la Fed actuellement, pour maintenir le canal du crédit. D’après Buiter, cela a des conséquences importantes sur la manière dont le Trésor devrait réagir, la seconde stratégie pouvant avoir des conséquences importantes sur les budgets publics.

 

Les risques de déflation

Paul Krugman note que les dernières projections du Bureau du Budget (CBO) concernant le chômage pour les années de 2008 à 2012 ressemblent beaucoup à celles des  années 1980 à 1986, période connue sous le nom de "Grande désinflation". Alors que l’inflation était passée de 10 à 4%, Krugman s’inquiète qu’une même évolution conduise l’inflation actuelle, 2,5% à des chiffres dramatiques de déflation de -3,5%.

 

Les plans de relance budgétaire

Il y a eu beaucoup de discussions la semaine dernière au sujet des évaluations officielles du plan économique de l’équipe d’Obama, publiées par ses conseillers Christina Romer et Jared Bernstein. Le principal débat concerne la taille des effets d’entraînement : le nombre de dollars privés dépensés que permet un dollar public. Pour les économistes proches des Républicains, représentés ici par Greg Mankiw, il vaut mieux pour cela se servir du levier des réductions d’impôts, plutôt que de celui de l’investissement public, tandis que Bradford DeLong affirme l’inverse, chiffres à l’appui (d’ailleurs tirés des précédents travaux de Christina Romer). Mankiw s’inquiète par ailleurs que davantage de dépenses ‘temporaires’ ne conduisent à une augmentation permanente de la place de l’État dans l’économie.

Martin Wolf, du Financial Times, pense quant à lui que le plan Obama ne sera pas suffisant. Il pointe plusieurs dimensions : le risque "japonais" d’une trappe à liquidité et de crise longue, la réduction nécessaire des importations et de la consommation pour éliminer le déficit commercial persistent, et la crédibilité du gouvernement à mener des politiques rigoureuses pendant plusieurs années.


Menzie Chinn répond à ceux qui s’inquiètent du temps de réaction des investissements publics. La peur qu’ils mettent trop longtemps à s’activer et n’aboutissent finalement qu’au moment où l’activité repart est selon lui infondée, puisque la crise sera profonde et durera plusieurs années. Qu’un programme ne s’active qu’en 2010 est donc, un non-problème. Au contraire, Nicholas Bloom and Max Floetotto, se montrent optimistes dans un article paru dans Vox, en se basant sur leur indicateur d’incertitude (celle-ci gèle les comportements de prise de risque des entreprises et des consommateurs, et par là la dépense, les investissements, les recrutements) qui a diminué. Ils pensent que la croissance repartira dès l’été 2009. Pendant ce temps, le discours de Ben Bernanke à Londres, et un post de James Kwak sur le blog Baseline Scenario rappellent que les plans de relance ne pourront produire des effets qu’une fois que les banques seront complètement remises sur pied.

 

Le déficit public américain, jusqu’à quand et à quel prix ?

Brad Setser n’est pas optimiste : en 2008, les États-Unis ont émis plus de 1 500 milliards de dollars d’obligations, sans que les taux d’emprunt aient augmenté. Mais ce n’est pas la même chose de faire cela dans un contexte de crise globale : les facteurs qui poussaient les Banques centrales étrangères à acheter ces titres sont en train de disparaître, et les implications pourraient s’en faire assez vite sentir.

 

La zone euro peut-elle vraiment éclater ?

Willem Buiter ne croit pas au raisonnement selon lequel la probabilité d’un non-remboursement de la dette publique par un membre de la zone euro serait égale à celle d’un éclatement (voir Jean Quatremer pour une telle opinion). Il avance deux arguments : du point de vue du pays qui ne peut plus rembourser ses dettes, il vaut mieux appartenir à la zone euro qui minimise le risque monétaire (attaque spéculative par exemple). Du point de vue du Marché unique, les différences dans les taux d’emprunt des différents États est plutôt le signe que les marchés fonctionnent : ils ne font plus l’hypothèse que la signature grecque (par exemple) est similaire à la signature allemande, ce qui est une bonne chose.


Un choc pétrolier sans conséquences

Alan Blinder et Jeremy Rudd essaient de comprendre pourquoi les récents pics du prix du pétrole n’ont pas eu les mêmes conséquences catastrophiques que dans les années 1970. Ils voient quatre raisons possibles : cette source d’énergie n’est plus aussi déterminante, l’industrie automobile occupe une place relativement moins importante dans l’économie, les salaires sont plus flexibles, et la politique monétaire a une cible qui n’inclut plus le prix du pétrole

 

* Traduction et adaptation : Martin Kessler.

* Sources:

http://www.eurointelligence.com
http://www.voxeu.org
http://blogs.ft.com/wolfforum/
http://www.economist.com/blogs/freeexchange/
http://blogs.ft.com/maverecon/
http://rodrik.typepad.com/dani_rodriks_weblog/
http://content.ksg.harvard.edu/blog/jeff_frankels_weblog
http://blogs.cfr.org/setser
http://economistsview.typepad.com/economistsview/
http://blogs.wsj.com/economics
http://www.econbrowser.com/
http://mpettis.com/
http://baselinescenario.com/
http://www.petersoninstitute.org/realtime/
http://krugman.blogs.nytimes.com/
http://www.rgemonitor.com/globalmacro-monitor/
http://www.calculatedriskblog.com
http://gregmankiw.blogspot.com/
http://delong.typepad.com/