La famille des think-thanks accueille un nouveau venu à gauche. Guillaume Bachelay, nouveau secrétaire national du PS à l'industrie et créateur du Labo 76 a répondu aux questions de nonfiction. Entre ses champs de réflexion et la description de son projet, ce proche de Laurent Fabius et maire adjoint de Cléon (Seine-Maritime) n’oublie pas d’évoquer la perspective de 2012. Il reste cependant flou quant à la question de l’ouverture de son "Labo" aux militants hors PS.


nonfiction.fr : Aujourd'hui, les think-thanks fleurissent de partout, Terra nova semble être le plus armé à gauche, pourquoi un de plus ?

Guillaume Bachelay : Abondance de biens ne nuit pas. Je préfère le bouillonnement des idées de la gauche au désert intellectuel de la droite. Le Labo76 est complémentaire des autres think-tanks progressistes. Mais deux différences font sa singularité et, je l’espère, sa valeur ajoutée.

D’abord, il s’appuie sur la réalité d’un territoire. La Seine-Maritime aujourd’hui, ce sont 16 000 personnes qui vont passer les fêtes de fin d’année au chômage technique et 3 000 salariés qui ont été licenciés ces derniers mois. La crise de l’automobile, qui frappe General Motors ou Chrysler aux États-Unis, qui atteint Toyota dont les résultats sont dans le rouge pour la première fois de son histoire, n’a rien d’une abstraction chez nous ! Cette réalité donne une connaissance humaine autant qu’une expertise sur la crise de l’automobile et, plus largement, le risque de désindustrialisation de notre économie.

La seconde spécificité du Labo 76, c’est qu’il est un vrai collectif militant. Je n’ai rien contre les hauts fonctionnaires et les universitaires, bien au contraire. Mais je pense que les adhérents du Parti Socialiste n’ont pas seulement vocation à désigner leurs candidats, à trancher entre les motions du Congrès ou à coller des affiches. Nous disposons d’un vivier d’expériences, de talents, d’idées utiles pour l’élaboration d’un véritable projet socialiste. Notre Labo seino-marin est porté par une équipe de jeunes socialistes qui pensent que la bataille de 2012 se gagnera sur les idées et qu’elle se prépare maintenant.


nonfiction.fr
: "Clarté", "fermeté", "conviction", "précision", "exigeant", "critique", "renouvelé", "actif", "ouvert", "décloisonné"… tous ces mots sont employés dans le manifeste de Labo 76, pouvez vous développer réellement trois d’entre eux ?

Guillaume Bachelay : Je développerai trois adjectifs : renouvelé, ouvert, actif.

Si vous allez sur le site internet du Labo76, vous ne trouverez pas beaucoup de noms connus du grand public. Nous sommes nombreux à nous reconnaître dans les combats portés ces dernières années par Laurent Fabius, je pense à la loi sur la laïcité en 2004, à l’exigence de réorientation sociale de l’Europe en 2005, à la priorité aux salaires en 2006, au refus de la TVA sociale en 2007. Mais nous voulons aussi mettre en évidence le formidable renouvellement qui s’opère, à chaque congrès, au sein de la fédération PS de Seine-Maritime, l’une des plus dynamiques de France. Personne ne le sait car personne ne l’écrit, mais les sections socialistes des deux plus grandes villes du département, Rouen et Le Havre, sont animées par des militants qui ont moins de 30 ans.

Ensuite, nous avons besoin de renouer le dialogue avec les syndicalistes, les universitaires, les responsables d’associations, les chefs d’entreprises, les artistes. Être "ouvert", c’est un objectif essentiel du Labo76. Le PS doit être dans la rue et dans les têtes : dans la rue aux cotés des Français qui souffrent de la politique de Nicolas Sarkozy, dans les têtes en proposant un projet alternatif crédible. Le PS de Martine Aubry va redevenir une ruche. Ici, disons que nous travaillons à rendre le miel de gauche… bien de gauche.

Enfin, le Labo76 est avant tout un outil "actif", un outil de production. Pour chaque thème abordé – l’automobile, la santé, l’énergie – nous présenterons, à partir de notre expérience locale, des pistes concrètes d’action pour une autre politique au plan national. Le PS doit être le parti de gouvernement dans les mouvements, le parti dans l’opposition qui fait des propositions pour ne pas y rester une législature de plus.


nonfiction.fr : Le Labo 76 est implanté dans votre région et a pour objets de réflexion ceux de votre nouveau poste au secrétariat national du PS. A-t-il vocation à se développer sur d'autres territoires et champs de réflexion ?

Guillaume Bachelay : Le Labo76 ne se limitera pas à aux sujets dont j’ai la responsabilité au Parti Socialiste. Par exemple, nous plancherons dès le premier trimestre de 2009 sur les inégalités de santé dans les territoires, avec en ligne de mire la réforme de l’hôpital programmée par le gouvernement pour le début de l’année. C’est un sujet dont on parle peu dans les grands médias et qui est pourtant explosif pour notre vivre ensemble.

Quant à savoir si le Labo fera des petits dans les autres départements, nous le souhaitons et espérons modestement servir d’aiguillon pour d’autres camarades. En tout cas, je me réjouis que la direction du PS ait d’ores et déjà repris le concept en créant un laboratoire des idées au niveau national, qui est animé par le député Christian Paul.


nonfiction.fr : Qu'en est-il de l'ouverture aux élus et militants hors PS ?

Guillaume Bachelay : Notre manifeste est clair : le Labo76 est ouvert aux militants comme aux sympathisants. Nos réunions et les résultats de nos travaux seront publics. Pour convaincre, le PS doit travailler et s’ouvrir. C’est la double vocation du Labo

 

* Propos reccueillis par mail le 23 décembre 2008.