À la veille du lancement officiel de la maison d’édition Mordicus, voici le compte-rendu d’un entretien accordé par Emmanuelle Duverger, rédactrice en chef de la revue Médias, et fondatrice des éditions Mordicus.

Mordicus (adv.) : obstinément, opiniâtrement, sans démordre   .

En lançant sa maison d’édition, l’équipe du magazine Médias sait ce qu’elle veut : créer le débat sur un sujet précis entre deux personnalités fortes afin que le grand public se forge sa propre opinion. "On en a marre que les intellectuels nous disent ce que l’on doit penser", s’insurge Emmanuelle Duverger, rédactrice en chef de Médias à la tête de ce projet, créé en partenariat avec les éditions Panama, et qui peut se voir comme un complément élargi de ce que propose la revue trimestrielle spécialisée dans la vie des médias.

"Nous nous sommes rendus compte que les longs entretiens (grand atout de la revue Médias) intéressaient par-dessus tout nos lecteurs, or il est difficile de trouver des supports (Internet en tête) qui permettent ce contenu, cette épaisseur. On s’est alors demandé : pourquoi ne pas les étendre à des sujets de sociétés ?"

Les deux premières publications, dont les sorties sont programmées pour le 16 octobre, traitent de sujets plutôt brûlants. Le premier ouvrage, publié à 10 000 exemplaires, s’intitule sobrement "Faut-il avoir peur des religions ?" et confronte les points de vue de Tariq Ramadan, de Monseigneur di Falco et d’Élie Barnavi. "Ce trio n’était pas gagné d’avance, mais il est intéressant car ces trois personnes possèdent toutes les trois une expérience de terrain. Ce ne sont ni des philosophes ni des théoriciens. On avait envie de quelque chose de concret." Simultanément sortira "Faut-il être plus sévère avec nos enfants ?", un opus tiré à 25 000 exemplaires qui réunira deux têtes aux positions bien affirmées, Aldo Naouri et Edwige Antier.

Deux livres qui, comme les nombreux suivants ( 300 sujets sont sur le feu), ne dépasseront pas les 100 pages réunies dans un format réduit et pratique. Peut-on réellement cerner un sujet aussi complexe en si peu de pages ?

Emmanuelle Duverger en est persuadée : "Je peux vous assurer que les problèmes ne sont pas simplifiés outre mesure. Et on ne peut pas faire des livres de 600 pages, personne ne les lirait… On veut donner à nos lecteurs la possibilité de se faire une idée sur un thème polémique mais en un temps assez court." Les entretiens seront à chaque fois menés par de jeunes journalistes, "pour laisser la vedette aux personnes interviewées". Aucun risque pourtant que ces derniers ne se laissent déborder par la virulence des débats : les entretiens seront successifs, afin de ne pas dévier sur des joutes oratoires stériles. De quoi perdre la vitalité constructive d’une confrontation d’idées, peut-être ?

Mordicus a d’autres idées de sujet dans les cartons, le racisme et la crise de confiance des médias en font partie. La maison d’éditions table sur un rythme éditorial de 6 à 10 parutions par an. Le visuel des livres s'aligne sur le graphisme très particulier de la revue, dans l’espoir d’attirer de nouveaux lecteurs par le biais des deux supports.

La presse française se vend mal, les débats ont désormais lieu à la télévision ou sur Internet, mais Emmanuelle Duverger n’en démord pas : « Je pense qu’il y a une vraie attente du public"