Du franc-parler mais peu d'idées nouvelles.

 "À Lionel, Claude et Daniel". Cela commence par une dédicace à ses trois compères du XVIIIème, l’arrondissement de Paris où se sont rencontrés Jospin, Estier et Vaillant, liés d’amitié, et qui ne se sont jamais perdus de vue. Voilà pour le passé. Puis dans les quelques pages d’introduction liminaire, tirant les conclusions des échecs et des insuffisances du PS, le maire de Paris fraîchement réélu ne manque pas de se déclarer disponible pour les prochaines échéances qui vont agiter le Parti socialiste dans les semaines à venir   .

De l’audace ! est un livre personnel, comme l’a été le précédent La vie, passionnément, où Bertrand Delanoë dévoile une part de sa vie avant ou en dehors de la politique. Le maire de Paris est issu d’une famille installée de longue date en Tunisie. Son grand-père maternel a pris part activement à l’administration du système colonial en tant que haut fonctionnaire de la Régence. Son père, "un homme d’ordre, autoritaire et très à droite"   , travaille là-bas comme coopérant ; sa mère, infirmière, était une "démocrate-chrétienne, à droite elle aussi". Le retour en France a eu raison de la cohésion familiale. Les parents se séparent, la vie est moins facile. Malgré l’athéisme de son père, le jeune Delanoë vit avec sa mère. Son enfance est marquée par la religion catholique : jusqu’à l’âge de 14 ans, il reste très croyant, très pratiquant jusqu’à être Petit Chanteur à la Croix de Bois.

"Fils de la Tunisie", Delanoë évoque Bizerte, ces événements sanglants qui l’ont marqué très jeune (il avait onze ans) et ont fait germé en lui son intérêt pour la chose politique. En 1961, la France de De Gaulle rechigne à laisser à la Tunisie, indépendante depuis 1956, la base militaire de Bizerte :

"J’ai vue l’armée française débarquer, les jeunes Tunisiens manifester, se battre et les soldats tirer. Il y a eu des dizaines de morts. J’ai assisté à tout cela de chez moi ; j’ai vu les tirs, les corps qui tombent, le sang : un choc inouï pour un enfant. Et puis tout de suite j’ai été saisi par l’absurdité de l’affrontement. (…) la mort de ces jeunes gens me paraissait d’autant plus révoltante qu’ils étaient nos voisins, nos frères. (…) Cette tragédie de Bizerte m’a tout de suite plongé dans les questions politiques, collectives."  

Après le lycée, dans une institution catholique en Aveyron, Delanoë rejoint les bancs de l’université pour faire des études d’économie puis rejoint l’Institut d’études politiques de Toulouse. À l’heure où certains se trouvent une vocation pour l’engagement politique, Bertrand Delanoë profite de sa jeunesse mais conserve toujours un intérêt pour la longue marche de la gauche vers le pouvoir.

Le moment décisif dans l’itinéraire politique de Delanoë, ce n’est pas Mai 68, mais le Congrès d’Épinay en 1971. Il adhère, après réflexion, en 1972, et tout va très vite. Six mois après, à vingt-trois ans, il devient secrétaire fédéral de l’Aveyron. Mitterrand demande à rencontrer ce jeune responsable et les deux hommes se rencontrent pour la première fois dans la propriété du futur président à Latché.

À Paris, Delanoë gravit les échelons. En 2001, il affronte Jack Lang à l’investiture socialiste pour la mairie de Paris. Les coups bas ne manquent pas : certains adversaires font circuler le bruit que Delanoë est pédophile, une rumeur bien-sûr totalement infondée. Le manque de fair-play, pire l’intolérance, il s’y attend et pas nécessairement de la part de l’opinion, qui est plus ouverte d’esprit qu’on ne le croit, sur le sujet de l’homosexualité notamment   .



Les convictions de Delanoë

Comme pour beaucoup de personnages politiques de sa génération, la prise de conscience politique du jeune Delanoë est née de l’indignation face aux injustices du système colonial. S’il considère le bilan de la colonisation plutôt négatif   , le maire de Paris retient des aspects positifs aux échanges humains nés de cette situation, fût-elle injuste   .

L’itinéraire politique de Delanoë trouve ses racines dans sa compréhension de l’histoire. Devenu gaulliste en découvrant l’histoire de la Libération (p.23), il s’intéresse ensuite à Mitterrand et surtout à Lecanuet   , moins par adhésion aux idées de celui-ci qu’à son image d’homme honnête.

Mai 68 est aussi à ranger parmi les événements qui ont marqué la première génération de l’après-guerre. Bertrand Delanoë vit ses premières expériences d’action politique : lycéen à Rodez dans une institution catholique, Delanoë n’est pas peu fier d’avoir fait mettre en grève toutes les écoles catholiques de l’Aveyron : "Ce n’est pas si mal."   . Le futur maire de Paris à vécu cet épisode en province et il nous livre un point de vue intéressant des événements : "En province, ce printemps-là, c’était un vent de liberté qui soufflait sur des habitudes devenues normes et sur des servitudes de pensée qu’il était temps de briser, par l’insolence, par l’irrévérence." Bertrand Delanoë porte un regard globalement positif sur Mai 68 : il s’agit pour lui d’une révolte réformiste qui nous a légué "une certaine idée de la liberté"   Et de trancher en visant Sarkozy : "Ceux qui veulent 'liquider' cet héritage représentent donc un ordre social daté".

Pendant tout son itinéraire en politique, et ce dès le début, Bertrand Delanoë n’a jamais goûté au gauchisme : "Jamais gauchiste ?, lui demande Laurent Joffrin. – Jamais !". Il raille, sans détour, le leader de l’extrême-gauche française que d’autres au Parti Socialiste tente de séduire : "Parce que si la France avait choisi de rompre avec l’Europe, le capitalisme financier n’aurait pas vu le jour sur la planète ? C’est une plaisanterie. Et si nous avions choisi la voie castriste, comme Besancenot le préconise encore puisqu’il nous propose comme modèle Che Guevara, la mondialisation aurait-elle reculé ? On rêve…"

Le maire de Paris se place, tout au long de l’entretien, dans le sillon de la social-démocratie dont il dresse un bilan élogieux   . Il définit une politique de gauche, aménageant le capitalisme et l’économie de marché au service de l’égalité et de la justice sociale, qui selon lui constituent le seul système économique permettant d’honorer ces valeurs. Il condamne clairement le communisme avec ses crimes et ses contradictions. Et Delanoë fait ressurgir le débat qui semblait avoir été tranché par la devise de la République française : "Liberté, Egalité, Fraternité" : "Il n’y a pas de chemin vers l’égalité sans la liberté."  

Qu’on se le dise, Bertrand Delanoë se réclame du libéralisme, et du libéralisme politique : "je ne réfute pas mécaniquement ce vocable, 'libéral'. Et quand il s’applique à une doctrine politique, au sens global, je crois même qu’un militant socialiste devrait le revendiquer." La distinction avec le libéralisme économique peut paraître ambiguë dans ses propos : s’il affirme qu’il est "inacceptable pour un progressiste de hisser le 'libéralisme' au rang de fondement économique et même sociétal"   , il affirme quelques lignes plus haut : "À gauche, nous sommes les défenseurs de la liberté, y compris dans le domaine économique."

Le plaidoyer de Delanoë pour le libéralisme est cohérent, clair, implacable :
 
"Qu’est-ce que le libéralisme ? C’est une doctrine d’affranchissement de l’homme, née dans l’Europe des Lumières. C’est, comme son nom l’indique, une idéologie de la liberté, qui a permis l’accomplissement de grandes conquêtes politiques et sociales. Le principe en est simple : il n’y a pas d’oppression juste, il n’y a pas de chaîne qui ne doive être brisée, il n’y a pas de légitimité, ni donc de fatalité, à la servitude. Et le libéralisme, c’est dans le même temps l’idée que la liberté est une responsabilité, qu’être libre ce n’est pas faire ce que l’on veut mais vouloir ce que l’on fait. Au nom de cet héritage intellectuel-là, celui de Montesquieu, de John Locke, au nom de ceux qui ont su dresser contre le confort mortel de l’habitude pour dire non, je suis libéral. Je suis libéral parce que j’aime la liberté. Pour moi-même : j’ai toujours voulu être un homme libre de toutes les puissances et de toutes des dominations. Et pour les autres : j’aime les peuples libres qui défient la rigueur de l’histoire, j’aime que, collectivement, s’exprime le désir d’avancer fièrement dans la voie que l’on s’est souverainement tracée. Et ce que je dis des peuples vaut pour les personnes. Chaque individu a droit au bonheur, et il a le droit de rechercher par les moyens qu’il souhaite. Avec une seule limite, celle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme, qui définit l’idée que je me fais du libéralisme : "(…) l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société de la jouissance de ces mêmes droits.". Le libéralisme est donc d’abord une philosophie politique et j’y adhère. Ce sont les conservateurs qui l’ont dévoyé au service d’une idéologie du laisser-faire économique et de la perpétuation des rentes et des privilèges dont ils bénéficient déjà. Au nom d’un principe de liberté, leur dessein est en réalité celui de l’immobilisme, qui prolonge leurs avantages et reproduit toujours les mêmes inégalités. C’est une supercherie à la fois intellectuelle et idéologique, dont la gauche ne doit pas, ne doit plus, s’accommoder. Je suis donc libéral ET socialiste."



Au nom de ce crédo libéral, Bertrand Delanoë donne des exemples de réalisations qui seraient selon lui conformes à cet idéal en citant l’idée de Martine Aubry de verser les allocations familiales sous conditions de ressources. Il ne récuse pas non plus la flexibilité de l’emploi, mais une flexibilité encadrée par des garanties au bénéfice des travailleurs, ni l’autonomie des universités, ni l’aménagement des 35 heures   .

Cette définition du socialisme du XXIème siècle appelle évidemment des changements à gauche et au Parti socialiste : "Certains à l’intérieur même du PS d’aujourd’hui, n’accepteront peut-être pas cette révolution de pensée. Qu’à cela ne tienne, qu’ils proposent leurs solutions, et l’on choisira, car il faut choisir : la synthèse est morte. La synthèse, ce sont les différences effacées. Voici venu le temps des différences assumées. Et c’est le meilleur chemin, le plus courageux et le plus efficace pour se rassembler. Le PS a été trop conservateur."

Pragmatique, Delanoë n’a pas pour autant oublié les utopies mais celles qui se réalisent, au moins en partie, qui font vraiment changer le monde et le cours des choses car il ne suffit pas de "psalmodier des discours altermondialistes sans leur donner de vrai contenu". L’accès à l’eau, la protection du patrimoine naturel et les solidarités intergénérationnelles sont autant de défis à relever pour les responsables politiques et les générations futures.

Pour relever cette tâche immense, à l’échelle de la planète, le maire de Paris applique une méthode déjà bien élimée, notamment par Lionel Jospin : agir à l’intérieur du Parti socialiste européen, chose pour le moins délicate au vu du gouffre idéologique entre les différents partis nationaux ; contribuer à l’Internationale socialiste ; travailler avec les organisations internationales (FMI, OMC) ; s’allier avec le mouvement syndical. En France, il faudrait concevoir différemment l’action politique pour que celle-ci obtienne concrètement des résultats : "Les socialistes doivent devenir entrepreneurs en progrès social. Ils doivent être les managers du changement, pragmatiques et idéalistes en même temps." Cela impose par exemple d’assumer la réforme de l’État, une nécessité au bénéfice des plus modestes.

Plusieurs fois débattus, très largement partagés à gauche pour certains d’entre eux, les propos de Bertrand Delanoë ont le mérite d’éclaircir son cheminement politique et intellectuel, sans être tout à fait iconoclastes. N’oublions pas que Ségolène Royal revendiquait déjà le mot "libéral" en 2006. Homme d’action, le maire de Paris démontre qu’un véritable responsable socialiste met ses valeurs et ses idées en œuvre. Plus que dans le discours, c’est à l’audace dans l’action que Delanoë appelle ses camarades socialistes : "pour gouverner à nouveau, il faudra que le Parti socialiste redevienne un parti de gouvernement".


Figures de la gauche d’hier et d’aujourd’hui


Même s’il se trouve idéologiquement très proche de DSK, Bertrand Delanoë a loyalement contribué à la campagne de Ségolène Royal désignée candidate du PS. Il reste toutefois critique : la démarche de la candidate "n’a pas abouti", son choix de renverser les alliances vers le centre n’était pas le bon et Delanoë s’attribue même la paternité de la démocratie participative, développée à Paris. Le manque de préparation du PS a été néfaste : "ce n’est pas accabler Ségolène Royal que de dire que si le parti n’a pas bien travaillé, sa candidate n’a pas non plus pallié ses insuffisances." La critique de la défaite de 2002 est, quant à elle, plus légère et peut-être pas assez sincère : "Mais l’absence de souffle, de créativité, dans notre campagne a fait naître ce désenchantement et même une forme d’imprudence de nos électeurs, qui ont conduit au 21 avril."

S’il parle des personnalités politiques qui animent aujourd’hui le PS, Bertrand Delanoë n’omet pas de parler des grandes figures de la gauche dans le sillon desquelles il souhaite se placer. Il y a bien sûr son ami Jospin dont il souligne volontiers l’orgueil comme les grandes qualités morales et intellectuelles. Plus anciens dans la lignée, il y a Mendès-France et Delors dont il admire le courage et l’honnêteté dans l’action politique. Quant à Mitterrand, les références sont nombreuses tout au long de l’entretien. Loin d’être un admirateur béat de l’ancien président de la République, Delanoë en connaît toutes les facettes, la part de lumière et la part d’ombre qui font la complexité d’un tel personnage.


Un homme d’action…


"Manager et socialiste" : les deux mots ne sont pas antinomiques et le maire de Paris le prouve, bilan à l’appui. La rigueur dans la gestion a permis de dégager des marges de manœuvre pour renforcer l’effort d’investissement à Paris et pour augmenter sensiblement les dépenses de solidarité même si Bertrand Delanoë omet de préciser qu’une grande partie de l’augmentation des dépenses sociales est dû au désengagement de l’État dans ce domaine. Les exemples de réalisations par le maire de Paris, pour impressionnants qu’ils sont, s’avèrent répétitifs : les résultats en matière de logement ou de transports sont cités plusieurs fois.


… et un opposant


Le président de la République fait l’objet d’un chapitre qui porte son nom. Le maire de Paris lui reconnaît une qualité, "l’énergie" et, avec des réserves, quelques bonnes réformes : les universités, certaines mesures de la réforme institutionnelle, les régimes spéciaux de retraite. L’éloge se limite là.

"Un bonapartisme modéré par la désinvolture", voilà la définition que donne Bertrand Delanoë du sarkozysme. Et la critique ne se borne pas au plan idéologique, elle porte aussi sur son mode d’exercice du pouvoir qui dévoierait la fonction présidentielle.



Médias et démocratie

Bertrand Delanoë aborde sa relation avec les médias. Il leur reproche d’avoir joué un rôle, conscient ou inconscient, dans la campagne sécuritaire de Chirac en 2002, causant la défaite de Jospin. La critique du maire de Paris à l’égard des médias s’avère plutôt classique : une hiérarchisation de l’information contestable, qui laisse trop de place à l’émotion et attache trop d’importance à la vie privée des personnalités politiques. Face aux mutations profondes et aux bouleversements que connaît le secteur de la presse, Bertrand Delanoë souhaite encadrer les prises de participation d’entreprises qui dépendent des commandes étatiques dans le capital des groupes de communication. L’État doit intervenir dans ce domaine mais "à dose homéopathique"   .


Une société plus ouverte


Bertrand Delanoë est le maire de tous les Parisiens, dans leur diversité avec laquelle il a su composer depuis son arrivée à l’Hôtel de Ville. Une diversité bien vécue suppose une politique d’immigration claire et ambitieuse : il faut s’attaquer aux filières d’immigration plutôt qu’aux sans-papiers eux-mêmes (même si les expulsions ne sont pas un tabou), traiter simultanément la question des flux migratoires et du co-développement, conditionner l’accès au territoire à la possibilité de trouver un logement et un emploi. Diversité doit rimer avec République : il faut rétablir l’autorité de l’État et bannir toute forme de communautarisme, garantir les droits fondamentaux comme le droit au regroupement familial. Lorsqu’il aborde la question de l’euthanasie, c’est encore la République qui inspire sa réflexion : "Si un individu souffre trop, si sa vie devient une torture et s’il veut l’abréger, faut-il faire droit à sa demande ? Telle est la question. La religion voit parfois quelque chose de sublime dans la souffrance. La République, non. La République garantit la liberté et la défense des droits. Mourir dans la dignité, c’est un droit." Quant aux évolutions indispensables que doit connaître l’islam en France, la réponse de Delanoë est teintée d’ouverture et de fermeté : "La République n’a aucune raison de stigmatiser l’islam, mais la République ne doit rien céder sur ses principes. Ce qui ne signifie pas, bien sûr, qu’elle doive être indifférente. Si plus de la moitié des imams de France ne parlent pas la langue de la République si de trop nombreux musulmans de France ne disposent pas de lieux de cultes dignes de ce nom, c’est aussi à la puissance publique de s’en préoccuper. 'La République assure la liberté de conscience', dit la loi de 1905 : ce n’est pas une tolérance passive, c’est une garantie active.".

Bertrand Delanoë entend prouver que les socialistes, s’ils ont pu être jugés inefficaces en matière de sécurité au gouvernement, peuvent attacher une attention particulière au "droit à la sécurité" : si la gauche revenait au pouvoir, il faudrait évaluer les lois sécuritaires de la droite avant de les abroger éventuellement, rénover les prisons françaises et développer les alternatives à la privation de liberté. Au travers du récit de son action à la mairie de Paris, Delanoë démontre sa préoccupation pour ces questions : renforcement de la coopération avec la préfecture de police, notamment au niveau financier, mise en place de correspondants de nuit…

L’expérience de Bertrand Delanoë ne se limite pas la politique de sécurité. Le maire de Paris veut nous montrer qu’il s’y connaît en écologie, fort de sa collaboration avec les écologistes : à Paris, paraît-il, ils sont "parfois excessifs et idéalistes"   . Les objectifs de la majorité municipale parisienne en la matière ne sont pas minces : réduire de 15% d’ici à 2014 les émissions de CO² dans le cadre du Plan climat. Les socialistes, qui pendant longtemps n’ont pas considéré la préservation de l’environnement comme un enjeu digne d’intérêt, portent aujourd’hui beaucoup d’attention à ce domaine. Le socialisme et l’écologie sont, pour la maire de Paris, tout à fait conciliables : "Pour un socialiste, l’homme prime sur la nature. Mais il doit la respecter pour y vivre heureux. Son projet écologique est au centre de réflexion. Cependant, la finalité, c’est l’Homme."



Un socialiste dans le monde

Le terrorisme est à compter parmi les autres défis planétaires à relever dans les prochaines années. Bertrand Delanoë tient sur ce sujet des propos mesurés qui condamnent les actes de terrorisme et souligne l’unité de ceux qui en sont les cibles   . Delanoë ne cède à aucune vision angélique du monde et considère les questions internationales dans leur complexité. Bertrand Delanoë est favorable à la guerre en Afghanistan et ne s’oppose pas "par principe" à la guerre en général.   .

L’angélisme chez Delanoë cède sa place au réalisme : à propos de la situation au Pakistan, le maire de Paris affirme que tout ne peut être considéré du seul point de vue des droits de l’homme. Les enjeux doivent être hiérarchisés, quitte, parfois, à négliger certains principes démocratiques pour empêcher les intégristes d’accéder au pouvoir   . Mais cela ne vaut pas dans les démocraties occidentales où la lutte contre le terrorisme ne saurait restreindre les avancées de l’État de droit. Ceci n’empêche pas de s’opposer à toute forme de relativisme culturel car les droits de l’homme "édictent des principes universels qui valent pour tous les hommes et toutes les femmes"   .

Delanoë s’intéresse aux problèmes du monde et il le montre, mais là encore, sans grande variation dans ses solutions : il propose une "européanisation" des interventions militaires destinées à pacifier l’Afrique et se prononce pour la création d’un État palestinien à côté d’Israël. Et il montre une connaissance approfondie des questions de défense et de stratégie dont il était spécialiste lorsqu’il était sénateur.

Le rendu de l’entretien avec le directeur du quotidien Libération, Laurent Joffrin, témoigne d’échanges francs. Le journaliste joue pleinement son rôle et pousse la subversion jusqu’à lancer, au nez du maire de Paris : "Les bobos à vélo, les prolos dans le métro".

Bertrand Delanoë parvient à prouver qu’il a les qualités d’un futur responsable socialiste : de fortes convictions de gauche, une expérience plutôt réussie de la gestion des affaires publiques et une bonne connaissance des questions internationales. Toujours cohérent, le discours est franc, direct et sans détour. Finalement, c’est là qu’est l’audace dans le livre de Delanoë. Pour les idées audacieuses, la gauche et le PS devront attendre