Les jeunes américains le jurent : ils lisent.  Ils ne vont pourtant plus à la bibliothèque, non : quel intérêt ? Internet suffit bien. Des millions de jeunes, comme par exemple Nadia Konyk, une Américaine de 15 ans, passent en moyenne six heures par jour sur Internet. À l’instar de beaucoup de jeunes américains, Nadia Konyk est connectée en moyenne 6 heures par jour. Elle fréquente les sites comme myyearbook.com (où elle met en jour son humeur), fanfiction.net et quizilla.com (sites de réseaux littéraires), ainsi que YouTube. Bien qu’elle lise des histoires en ligne, pour sa mère, une lecture plus "classique" serait préférable : "lire ouvre les portes vers d’autres lieux, (...) vers des cultures, des mondes, et des gens". Malheureusement, les histoires sur les sites comme fanfiction.net sont parsemées d’erreurs de grammaire  et d’orthographe. Nadia publie même ses propres histoires sur le site, et veut poursuivre des études d’anglais à l’université. Mais elle ne lit jamais de romans.

Les associations américaines ne cessent de débattre à propos des effets de la lecture numérique. Les partisans du web ont récemment proposé l’instauration d’une épreuve de compréhension d’un texte en ligne, mais si l’initiative a été suivie dans quelques pays, elle ne s’est pas encore concrétisée aux États-Unis. L’association National Endowment for the Arts (NEA, agence culturelle fédérale) a publié une enquête inquiétante : les résultats des examens de compréhension sont de plus en plus mauvais, même pour les enfants qui indiquent qu’ils lisent volontiers. Pour Dana Gioia, le dirigeant de la NEA, survoler des articles en ligne ne vaut pas lire un bon vieux bouquin. En outre, certains professeurs s’accordent à dire que les textes en ligne, comme la lecture qu’on en fait, sont superficiels.

D’autres préfèrent mettre en avant les bénéfices qu’induit la Toile sur les habitudes de lecture des jeunes gens, qui lisent en ligne au lieu de regarder la télévision, support désespérément vide de texte. Un professeur de Michigan State University souligne lui qu’Internet permet de multiplier des points de vue différents en un rien de temps, tandis que d’autres insistent sur l’aspect multimédia des informations en ligne (texte, audio, vidéo…). Par contre, pour Ken Pugh, chercheur de sciences cognitives à Yale, "lire un livre, en prenant le temps d’y réfléchir (…) enrichit plus l’intellect que feuilleter des petits articles en ligne". De plus, la qualité des informations que l’on trouve sur Internet est largement discutable, notamment en termes de fiabilité. L’expérience menée par Donald J. Leu est un cas d’école : ce chercheur de l’université du Connecticut a tout simplement inventé un animal dont il mit en ligne la description. 90 % des étudiants piégés y ont cru, et peu d’entre eux ont fait l’effort de pousser plus loin leur curiosité, ne serait-ce que pour vérifier la vraisemblance de ce qu’ils lisaient.

Il est clair que l’avis du ministère de l’Éducation américain va largement peser sur le débat.  Les élèves américains apprendront-ils à utiliser Internet à l’école ? Impossible à dire : la majorité des Américains fait confiance aux parents pour contrôler les pratiques de leurs enfants.

* Lire l'article de New York Times