L’auteur, agrégé d’histoire, signe un roman historique enlevé et documenté sur un complot de 1718 visant à renverser le régent Philippe d’Orléans.

Camille Pascal, qui cite longuement ses sources à la fin de son livre, raconte dans ce roman le complot mené par la duchesse du Maine et le prince de Cellamare, ambassadeur du roi d’Espagne en France, pour préparer une guerre de succession entre Philippe V, roi d’Espagne et petit-fils de Louis XIV, et le Régent de la couronne de France, Philippe d'Orléans. Celui-ci a fait casser le testament de Louis XIV, selon lequel c’était le Duc du Maine, bâtard légitimé du roi élevé par Madame de Maintenon, qui devait devenir Régent, en attendant que le petit Louis XV, encore enfant, puisse accéder au trône, à l’âge de treize ans. Ce complot plein d’intrigues, de trahisons, d’espions et de tentatives d’enlèvement, fournit un cadre romanesque particulièrement riche à ce roman historique dont la trame se tisse sur une page peu connue de l’histoire de France.

L’art du portrait

En bon lecteur des Mémoires de Saint-Simon, qui fait partie de l’entourage du Régent, Camille Pascal donne des portraits saisissants des différents personnages, et notamment de la duchesse du Maine, femme extravagante, princesse de sang, petite-fille du Grand Condé, qui fait preuve d’un très grand orgueil et d’une ambition démesurée. Elle s’est entourée au château de Sceaux d’une cour qui multiplie les écrits satiriques et polémiques contre Philippe d’Orléans :

« Chacun s’écartait sur le passage de cette furie haute comme une enfant de huit ans, maquillée aussi violemment qu’une porcelaine de Saxe et vêtue, par pure provocation, d’une robe de visite taillée dans une de ces toiles peintes des Indes dont la vente était normalement proscrite. »

Le règne de la débauche

Le roman fait la part belle à l’atmosphère libertine et débridée qui caractérise la Régence, en faisant entrer le lecteur dans le cabinet particulier du duc d’Orléans, où l’alcool coule à flot pendant les orgies avec des prostituées, qui ont leur rôle à jouer, comme le personnage haut en couleur de la Fillon. Citons, parmi d’autres, cette scène, à « Paris, Palais-Royal, dans les petits appartements » :

« Le Régent s’était écroulé alors que, coiffé d’une couronne de papier doré, il s’apprêtait à prononcer le jugement de Pâris pour choisir celle qui devait sortir victorieuse du bal des Nudités et s’offrir à la joyeuse compagnie. Cherchant par un ultime réflexe à se retenir à la table, Philippe avait emporté la nappe dans sa chute. Les flambeaux, les plats d’argent, les pyramides de fruits confits, le petit édifice de massepain joliment orné de filaments de sucre, les fleurs de porcelaine peintes dans leur pot de vermeil, tout avait dégringolé dans un fracas de vaisselle brisée et de cris de femmes effrayées. Mme de Parabère, la maîtresse en titre ce soir-là, dont la résistance au vin de Champagne faisait toute la gloire, s’était aussitôt précipitée vers son amant pour dénouer d’une main experte sa cravate de dentelle pendant que, de l’autre, elle cherchait à lui donner un peu d’air à grands coups d’un éventail où des satyres culbutaient des nymphes. »

Le style vif et imagé fait partie du charme de ce roman, qui renoue avec la grande tradition du roman historique illustrée par Alexandre Dumas et Prosper Mérimée, et donne au lecteur une très plaisante leçon d’histoire, où toutes les phrases de dialogues entre guillemets sont tirées de sources authentiques, sans pour autant que le romancier renonce à son goût pour le romanesque et pour les morceaux de bravoure.