La réforme des universités est récemment devenue un enjeu majeur aussi bien au niveau national qu’européen. Mais dans quel sens aller ? Doit-on se méfier de ces gigantesques usines à étudiants ? se concentrer sur les premiers cycles ? favoriser la sélection des étudiants ? laisser une autonomie financière à l’administration ? rémunérer les chercheurs à la performance ? Toutes ces questions donnent lieu à des débats fortement teintés d’idéologie rendant une approche quantitative rigoureuse nécessaire pour éclairer le débat.

 

C’est à ce débat que s’est attelé un collectif de chercheurs, chacun parmi les plus en vue dans leur domaine, dont deux professeurs de Harvard : le spécialiste de la croissance Philippe Aghion et l’économiste de l’éducation Caroline Hoxby. A partir des résultats du classement de Shanghai, ils ont étudié les éléments déterminants de la réussite des universités. Plusieurs de leurs résultats sont éloquents. D’abord, les universités américaines ont des performances en moyenne largement supérieures à celles présentées par le classement chinois, d’autant plus si l’on se concentre sur le haut du classement. Un autre constat massif et moins connu des non-spécialistes est que les Etats-Unis dépensent en niveau relatif trois fois plus que l’Europe ou que la France pour leurs universités (3,3% du PIB contre 1,2%). La différence est encore plus spectaculaire en prenant comme indicateur les sommes dépensées rapportées au nombre d’étudiants (8.700 euros en moyenne en France contre 36.000 aux Etats-Unis). Même en se restreignant au soutien public, les Etats-Unis font plus d’efforts budgétaires dans le financement public que l’Europe. Bref, une partie de la solution est purement quantitative, et les auteurs conseillent une augmentation de la part de l’éducation supérieure dans le PIB européen de 1% sur dix ans.

 
La deuxième partie du papier est un peu moins solide méthodologiquement, puisqu’elle part d’un sondage effectué auprès des universités aboutissant à des statistiques plus approfondies mais moins représentatives. Malgré cela, les auteurs en tirent un constat massif : l’autonomie de gestion est une caractéristique importante des universités qui réussissent. Un euro investi est deux fois plus efficace s’il l’est dans une institution qui contrôle son propre budget. La conclusion politique est alors simple : la sélection des étudiants et le recrutement des professeurs sont peut-être à réformer, mais ils sont cependant loin d’être les éléments les plus importants quantitativement. Si l’on suit les conclusions statistiques de cette étude, la prescription serait de laisser les universités contrôler un budget très largement augmenté.


Philippe Aghion, Mathias Dewatripont, Caroline Hoxby, Andreu Mas-Colell, André Sapir, « Why reform Europe’s universities ? », Bruegel Policy Brief, Septembre 2007. Disponible sur le site internet de Bruegel : www.bruegel.org