Deux ouvrages collectifs qui viennent apporter des éclairages complémentaires et novateurs sur l’extermination des Juifs.

La publication de ces travaux vient traduire les écritures possibles, par le récit ou par la documentation, de l’histoire de la Shoah et son renouvellement documentaire, qui a provoqué une évolution historiographique depuis les années 1990.

Les thèmes évoqués dans les deux volumes se répondent et se complètent. Le volume documentaire (La Shoah: Au coeur de l'anéantissement) remonte aux origines antisémites du nazisme, mélange d’antijudaïsme religieux catholique et protestant. S’y adjoint par la suite l’anticapitalisme qui dénonce la « puissance juive », surtout en Allemagne où les nationalistes allemands attribuent la responsabilité aux Juifs. Les illustrations choisies soulignent ces thèmes de propagande, avec une innovation dans la propagande avec l’introduction du judéo-bolchevisme. C’est cette propagande qui favorise les lois antisémites, puis la nuit de cristal, avant que les Juifs ne soient prisonniers de la forteresse européenne avec les débuts de la guerre. Le volume d’articles (Nouvelle histoire de la Shoah) rappelle également que le processus d’extermination a été expérimenté sur les handicapés et les malades mentaux.

Les deux livres s’accordent sur les étapes du processus d’extermination des Juifs et des Tsiganes. Ils commencent par l’extermination par la faim avec l’enfermement dans les ghettos à partir de 1939 dans la partie occidentale de la Pologne. La deuxième étape est constituée par la Shoah par balles qui accompagne la guerre à l’Est suite à l’invasion de l’URSS le 22 juin 1941. Enfin la conférence de Wannsee organise les centres de mise à mort. La Shoah au cœur de l’anéantissement laisse une large place aux différents textes et aux documents de la Gestapo pour montrer, par les archives, les processus de mises à mort et leur réalité physique. Il propose également un nombre important de photographies méconnues. La combinaison de ces trois méthodes de mises à mort de masse entraîne la disparition de six millions de Juifs, dont la Nouvelle histoire de la Shoah donne un décompte précis et détaillé.

Les thématiques des ouvrages divergent partiellement ensuite. Le livre documentaire porte sur la question de la résistance juive à l’extermination à travers des exemples fournis comme le groupe des frères Bielski,  qui a regroupé plus de mille partisans juifs en Biélorussie, le nombre total de combattants juifs dans les forêts de l’Est de l’Europe atteignant, semble-t-il, 20 000 personnes. L’autre livre se penche davantage sur la France reprenant des études maintenant sérieusement balisées sur Vichy, la déportation, la Résistance juive et l’organisation des sauvetages.

À la toute fin, les deux livres finissent par se rejoindre sur la question mémorielle. Elle est particulièrement développée dans la Nouvelle histoire de la Shoah où les auteurs explorent des pistes importantes notamment pour le monde enseignant. Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, la mémoire de l’extermination existe, mais prend une place importante dans l’espace public à partir des années 1960, pour devenir centrale dans les années 1990. Parallèlement, plusieurs contributions examinent l’importance des voyages scolaires et mémoriels, puis du rôle de l’enseignement. Les trois articles arrivent à une conclusion similaire. Ils sont essentiels, mais doivent être sans cesse réexaminés pour atteindre la meilleure efficacité et répondre aux chiffonniers de l’histoire qui pullulent entre les négationnistes et autres conspirateurs.

 

Les deux ouvrages sont importants bien qu’ils constituent davantage des synthèses utiles des différentes avancées que des contributions originales.