Un ouvrage pédagogique pour comprendre la caricature de presse, en en retraçant l'histoire.

Plutôt qu’un ouvrage de caricatures, voire de défense de la satire et de la caricature, ainsi qu’il en existe tant, ces derniers temps, et pour des raisons légitimes, cet ouvrage tente d’en expliquer le fonctionnement à destination des scolaires, non sans les défendre simultanément. La démarche est non moins légitime, puisque de nombreux lecteurs et contemplateurs de caricature ont du mal à en saisir le sel. Le terme « caricature », rappelle l’auteur, est emprunté à l’italien caricatura, et du verbe qui y est attaché et qui signifie « charger, mettre du poids dans un char », autrement dit « charger le trait dans un dessin », le trait n’étant rien d’autre non plus qu’une arme qu’on lance ! Mais c’est moins la surcharge et l’excès qu’il convient surtout de retenir de la caricature que le rôle qu’elle joue, et la flèche qu’elle décoche : à l’égard de qui ? Sous quel mode ? Avec quelle efficacité ? Comment lire une caricature ?

C’est là que le dossier que comporte cet ouvrage peut être utile aux scolaires ou aux enseignants, ainsi qu’à tous ceux qui se trouvent en posture de proposer l’analyse de caricatures diverses, et évidemment récentes, à telle ou telle personne. Il montre d’emblée qu’une caricature ne se juge pas dans la minute, elle doit être examinée, fouillée, rapportée à son contexte et à une constante des traits de la caricature.

La présentation de 40 images – gravure, eau-forte, publication de presse, voire tract, parmi lesquelles nombre d’entre elles sont bien connues (Louis XVI en glouton, Louis-Philippe en forme de poire, l’affaire Dreyfus dans les familles…) – permet au lecteur de se mettre dans une première disposition, celle de ne pas confondre la caricature avec une représentation du réel, mais la faire entrer directement dans le jeu de l’interprétation. Ainsi, le débat sur la caricature ne tient-il plus à une quelconque atteinte à la dignité de la personne visée, puisqu’elle répond surtout d’une pensée politique concernant les actes de cette personne ou du régime qu’elle représente. Cette distanciation est fondatrice de ce type d’art.

Le dossier qui accompagne ces analyses des 40 images, évitant soigneusement la période actuelle, contournant ainsi l’émotion et les polémiques en cours, ancre plutôt la caricature dans une histoire européenne qui commence avec l’héritage grec et latin : n’oublions pas que le dieu Momos, divinité de la moquerie et des sarcasmes, distrayait les autres dieux ; ne faisons pas non plus l’impasse sur le rire et la satire dans le contexte ouvert par la modernité. Mais ce dossier ne se referme pas sur ces considérations historiques, au risque de noyer la caricature dans un flot antique, il entreprend, dans un deuxième temps, une étude des modalités de la caricature : bestiaires, physionomies, anthropométries, sans oublier de signaler que la caricature peut aussi se laisser entraîner dans des dérives raciales, dont chacun peut se souvenir. La caricature n’est pas en soi valorisable, elle requiert aussi le discernement du regardeur. Enfin, le dossier se penche sur le fonctionnement politique et social de la caricature : ses rapports avec la censure et la question de la loi sur la liberté d’expression, en ce qui regarde les temps républicains.

L’ouvrage se termine classiquement, dans le registre des ouvrages pédagogiques, par un dossier comportant à la fois des textes de référence sur la satire et la caricature, et des questions de compréhension (directement liées au public scolaire).
Il n’en reste pas moins vrai que cet examen général fait toute sa place au mordant de la caricature, il peut donc introduire de nombreux lecteurs à la compréhension de cette forme de pensée en images