Mêlant anecdotes personnelles et construction européenne, l'auteur pose les bases historiques et humanistes de l'Union; pour y croire toujours.

Descendant de la génération 68 et parent de la génération Z, Guillaume Klossa appartient à celle qui a grandit au même rythme que la Communauté puis l’Union européenne. « Une jeunesse européenne » retrace son parcours, où chaque étape de sa vie est décrite et corrélée aux avancements de la construction européenne. Cet essai relate quarante années de faits européens et de détails personnels, parfois peu révélateurs. Retenons surtout un récit empreint d’humanisme; l’humanisme qui porte les convictions de l’auteur, le même qui fonde notre Histoire et qui pourrait animer notre avenir.

Né à la fin des Trente Glorieuses, il évoque la maturation pleine d’enthousiasme qu’est l’enfance au même titre que la construction européenne d’alors. En effet, en Europe occidentale, malgré les contrecoups de la décolonisation et des chocs pétroliers, les coopérations sont florissantes et laissent présager un jeu collectif prometteur. Suit la signature des accords de Schengen puis de l’Acte unique européen durant les années 80. Quelques doutes apparaissent mais tous les espoirs sont encore permis ; Guillaume Klossa traverse l’adolescence. Le projet européen prend son envol en cherchant à concilier unité et diversité sur la base de grands principes démocratiques. La Chute du Mur de Berlin conforte la vocation de la construction européenne comme outil de réconciliation.

À partir des années 90 – la vingtaine de l’auteur et ses premiers engagements - le mouvement d’unification s’accélère et prend de l’ampleur. Le nouveau citoyen européen (statut apparu avec le traité de Maastricht) ne comprend pas toujours le rôle et les enjeux de ce vaisseau appelé Union européenne, mais il y voit une construction profitable pour l’avenir du continent : sécurité, prospérité, rapprochement des peuples...C’est à l’orée du troisième millénaire que l’opinion publique se dégrade, le consensus européen est mis à mal. Pour Guillaume Klossa, la trentaine est ponctuée par de grandes déceptions. Tout d’abord, l’élection présidentielle du 21 avril 2002 qui porte le candidat du parti le plus anti-européen au second tour, signifiant l’exaspération des électeurs pour le monde politique. Trois ans plus tard, le 29 mai 2005, le rejet français du projet de Constitution européenne marque définitivement le décrochage populaire envers le grand dessein collectif qu’est l’Union européenne.

C’est durant cette même période que l’engagement de l’auteur, présent depuis le premier jour, se concrétise par la naissance d’EuropaNova, un laboratoire d’idées fédérant décideurs et leaders d’opinion de demain à travers le continent. Cette organisation, son « rejeton », engage des réflexions et des actions ayant pour but d’influencer le débat politique et de projeter les citoyens européens dans le futur, celui d’un projet singulier et inédit construit sur des valeurs telles que la liberté, la fraternité et la dignité de la personne humaine. Dans ces conditions, ce projet collectif fait de l’Union européenne une communauté économique et surtout politique, sociale et culturelle écrivant la page de la démocratie de demain à l’échelle d’un continent.

En plus de mêler son histoire à l’histoire récente de l’Europe et de l’Union européenne, l’auteur a une approche multiscalaire qui offre une mise en perspective historique et géopolitique. Le lecteur peut se situer dans un cadre contextuel moins réducteur et moins anxiogène. Ainsi, malgré un examen de la situation actuelle qui reste sommaire, la simplicité de l’écriture et la probité du propos permettent à chacun de s’identifier et d’engager une réflexion introspective sur les questions européennes : l’intérêt général face à son intérêt personnel, la solidarité face au repli sur soi, l’altérité caricaturée face à son assurance. Toutefois, il est malaisé de trouver des éléments de réponse, les idées neuves et singulières sont rares et le lecteur reste avec ces interrogations, ses doutes. Trouver sa voie dans une « œuvre littéraire non identifiée », entre récit autobiographique, analyse politique et discours fédérateur peut être difficile.

Finalement, on peut lire le récit de Guillaume Klossa en commençant par la fin et remonter le cours de l’histoire de l’Union, de l’Europe et même de la civilisation européenne. Il nous amène alors à (re)prendre conscience de qui nous sommes, nous autres, Européens. Nous faisons la somme de nos histoires individuelles, familiales, locales, mais aussi citoyennes, nationales et régionales. Résultat ? Certes, les crises, les guerres et les tragédies ont abîmé, parfois dévasté, notre continent mais l’Europe est, et reste, un creuset où s’inventa la démocratie, l’État, la nation, la citoyenneté, les droits de l’homme... Dans un sens ou dans l’autre, on achève sa lecture en ayant repris goût à l’Europe voire le goût de l’Europe. Rien ne nous retient alors d’être des citoyens européens courageux, engagés et responsables et de faire entendre notre voix, quelles que soient nos idées politiques. « À nous maintenant d’écrire la suite de l’Histoire »