Cet ouvrage présente les thérapies comportementales mises en pratique sur les enfants malades, essentiellement ceux qui sont hospitalisés.

A l'heure où différents modes de prise en charge psychologique s’affrontent, comme entre les Thérapies Cognitives et Comportementales (TCC) et des approches psychodynamiques issues de la psychanalyse   , van Rillaer, connu pour sa participation au Livre noir de la psychanalyse   et van Broeck proposent un livre censé faire le point sur ce que peut être, essentiellement en pédiatrie hospitalière, un accompagnement par un  "psychologue scientifique".

Il ressort de l’ouvrage que le psychologue de cette "psychologie pédiatrique"   travaille, non pas avec, mais pour l'hôpital auquel il apporte son soutien et que, surtout, grâce à sa technique "d'intervention psychologique" (p.53), le rôle du psychologue est finalement d’assurer la bonne adaptation de l'enfant hospitalisé à l'hôpital.

Ces conclusions, si elles semblent avoir pour elles la force de l’évidence, ne peuvent toutefois qu’interpeller le clinicien dans les fondements et l’éthique de sa pratique, jusqu’à le rendre mal à l’aise face à certaines préconisations de l’ouvrage.

De l’accompagnement à l’adhésion

Par exemple, après avoir évoqué la "procédure d'extinction" des comportements indésirables (p.145) comme le fait pour l'enfant hospitalisé de se renfermer sur lui-même, de refuser de coopérer ou encore de se révolter, les auteurs nous indiquent que "Les enfants qui apprennent assez rapidement à se passer de la présence de leurs parents s'adaptent plus facilement à l'hospitalisation" (p.145). Passée la fausse évidence de la proposition, on pourrait s’interroger sur le fait que l’approche de ces auxiliaires du traitement médical que sont alors les psychologues, tels que les auteurs les décrivent, n'est finalement pas tout à fait dénuée de cynisme.

Dans un sous-chapitre intitulé "Améliorer l'adhésion au traitement", les auteurs écrivent : "La grande majorité des recherches ayant montré que l'adhésion de la plupart des patients laissait en réalité à désirer (sic), nous proposons ici une série d'interventions psychologiques favorisant ce comportement". Cette proposition apparaît dans une nudité théorique confondante car, s’il s'agit donc de produire l'adhésion au traitement, le livre ne dit rien de l’examen critique, éthique ou déontologique de cette procédure d'adhésion. Le "C'est pour ton bien" semble ici l'avoir définitivement emporté sur toute autre considération.

Souhaitant fonder la légitimité de l’approche, les auteurs précisent que "Les recherches sur les effets des procédures relatives à l'adhésion au traitement sont encourageantes (La Greca et Bearman, 2003)", tout en reconnaissant paradoxalement dans le même temps "que la plupart de ces recherches présentent des faiblesses méthodologiques. Beaucoup d'entre elles ne sont que des études de cas (n+1)" (p.65). Aussi, on est en droit de s’interroger sur la mise en cause des présupposés méthodologiques par l’auteur, finalement similaires à d’autres approches théorico-cliniques décriées par van Rillaer lui-même.

Redoubler la demande de l’autorité

On lira avec intérêt le cas de Louis, enfant accompagné lors d’un cancer par une psychologue comportementaliste   . On y voit le psychologue redoubler la demande parentale de retour à l’école, comme un écho adhésif. La pression sur l’enfant semble très forte et légitimée par des procédures de "désensibilisation systématique" (p.152) issues du conditionnent pavlovien ou encore d’auto-instructions pour affronter des situations de plus en plus stressantes (p.153). Ainsi, face à une demande globalement très forte, portée et accentuée par chacun des acteurs (médecin, psychologue, école, etc.) et en tous temps (loisirs éducatifs, etc.), le psychologue propose l’apprentissage et l’auto-instruction. Le psychologue ne serait il là que pour lubrifier la machine thérapeutique, ajoutant, pour faire bonne mesure, quelques conseils sur la stratégie de l’étude et le suivi du travail scolaire, mais évacuant l’interrogation et toute dimension liée au désir de l’enfant et à ses représentations ? A 18 ans, Louis, travaillant chez un fabricant de vélos, meurt d’une récidive.

Freud nous disait ses patients guéris. Ils ne l'étaient pas toujours. Quant au livre de van Rillaer et van Broeck, il nous laisse insatisfait au seuil d'une réflexion sur la guérison à laquelle il ne se risque pas. Ce récit de l'accompagnement de Louis, nous pousse donc à faire remarquer l'urgence d'une réflexion éthique qui irait jusqu'à faire remarquer qu'être guéri, c'est autre chose qu’être subjectivement mort.