Après le unanimement catastrophique second mandat de G. W. Bush, la présidentielle 2008 apparaît pour beaucoup comme l’heure du probable retour aux affaires  des démocrates face à une opposition républicaine encore friable. Le renouveau qu’incarnent B. Obama, premier candidat afro-américain viable, et H. Clinton, apparaît dès lors comme l’occasion inespérée pour infléchir durablement la politique intérieure et extérieure des Etats-Unis. Aujourd’hui, les deux candidats sont au coude à coude après le retrait de John Edwards, et chaque soutien public leur est précieux.

Les thèmes de campagne ont aussi évolué alors qu’une nouvelle génération d’électeurs commence à peser sur les débats et demander des positions claires sur des questions comme les nouvelles technologies et internet.


L’homme des Creative Commons. 

Il n’est guère étonnant que beaucoup se précipitent pour marquer leur soutien à ces deux nouvelles coqueluches de la politique américaine ou plus sérieusement proposer une alternative à la politique menée par les républicains depuis 2000. Cette affirmation ne concerne cependant pas uniquement la politique étrangère, où la guerre d’Irak monopolise la quasi totalité des débats, mais également d’autres domaines comme la propriété intellectuelle. Elle reste, à ce jour, un sujet sensible et difficilement réformable face aux lobbies des grands majors telle Walt Disney. Ainsi, la question des brevets ne touche pas seulement des domaines comme l’audiovisuel et les nouveaux médias, mais également d’autres, beaucoup plus sensibles, comme la recherche médicale. Ces dernières années ont ainsi été marquées par des extensions, à n’en plus finir, de la durée des patentes avec tous les problèmes que cela pose, comme un frein évident à la recherche, notamment sur le cancer, où des entraves à la diffusion de médicaments, souvent de première nécessité.

Le combat pour la limitation drastique de la durée des brevets a longtemps été symbolisé par Lawrence Lessig. Ce professeur de droit à la Stanford Law School est le fondateur du Center for Internet and Society, il fut également l’un des inspirateurs des Creative Commons qui libèrent de droits certaines productions originales.  Après  avoir mené une longue et pénible lutte qui fut marquée par plusieurs actions en justice, notamment celle qui s’est terminée en 2003 devant la Cour Suprême des Etats-Unis et qui portait sur l’extension du 1998 Sonny Bono Copyright Term extension Act, Lawrence Lessig, supporter déclaré de B. Obama dans la course à la présidentielle, vient d’affirmer qu’il allait désormais privilégier un autre thème: la lutte contre la corruption du système politique américain. 


La voie Barack Obama.

Aujourd’hui B. Obama est considéré comme le candidat, aussi bien démocrate que républicain, le plus à même de mener une politique réaliste dans le domaine des nouvelles technologies. La réorientation plus "politique" de Lawrence Lessig est à percevoir dans ce contexte alors qu’on lui prédit déjà une place au sein d’une future administration démocrate menée par B. Obama. Une hypothèse plus que plausible alors que la communauté internet et l’énorme réussite de plusieurs entreprises dans ce qui n’est plus vraiment les nouvelles technologies deviennent des thèmes de campagne de plus en plus importants. Il est ainsi assez amusant de voir défiler tous les candidats, démocrates et républicains, à la présidentielle dans les bureaux de Google, modèle vivant de la nouvelle réussite d’entreprises américaines.

Mais Lawrence Lessig n’est pas seulement un homme de l’ombre, on l’a vu récemment mettre littéralement son blog au service de Barack Obama, devenant  l’un de ses défenseurs les plus virulents contre les attaques menées par le couple Clinton. Il a aussi pris parti pour dénoncer les provocations et les remarques populistes qui commencent à pleuvoir dès lors que Bill Clinton devient de plus en plus présent dans la campagne de sa femme. Une façon pour l’universitaire d’affirmer clairement que la campagne, en tout cas du côté démocrate, ne doit pas se résumer à un concours de popularité et que les techniques de swiftboating ne doivent pas prendre le pas sur un véritable débat. Aujourd’hui, après que Edward M. Kennedy lui ait apporté son soutien, Barack Obama semble plus que jamais avoir une carrure de présidentiable et Lawrence Lessig se positionne déjà comme l'un de ses plus fidèles alliés.


Voir aussi:

"Taking the copyright fight into a new arena" par Noam Cohen (New York Times, 2 juillet 2007).

"The intellectual imperialists" par Adam Cohen (New York Times, 4 avril 2004).

"In the 'Idea Wars', a fight  to control a new currency" par Amy Harmon (New York Times, 11 novembre 2001).

Le Blog de Lawrence Lessig

(On y trouve entre autres le livre de L. Lessig, The future of ideas en libre téléchargement.)


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Crédit photo: www.flickr.com/ "maderacanto"

 

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