Trente ans après sa mort, Romain Gary reste l’un des auteurs les plus fascinants du XXe siècle. Deux beaux livres essaient de percer le mystère Gary/Ajar.

De Romain Gary, on ne retient souvent que sa grande “prouesse”, celle d’avoir réussi à mener de front deux carrières littéraires en publiant quatre romans sous le pseudonyme d’Émile Ajar, et en obtenant, sous ce nom, un deuxième prix Goncourt. Mais ce jongleur de talent a également joué bien d’autres rôles que celui d’Ajar ou, même, de Gary. La parution de deux beaux livres qui lui sont consacrés vient, une nouvelle fois, le rappeler.

L’un, intitulé Lectures de Romain Gary, paru aux éditions Gallimard/Musée des lettres et manuscrits, est le catalogue d’une exposition qui s’est tenue au Musée des lettres et manuscrits, l’autre, Romain Gary l’enchanteur, de Myriam Anissimov, est une biographie illustrée publiée aux éditions Textuel. Ces deux ouvrages, d’approche différente, tracent un triple portrait de Romain Gary : à travers sa biographie, par la présentation critique de ses œuvres et à travers ses manuscrits.

Le portrait le plus classique, purement biographique, est proposé par l’ouvrage de Myriam Anissimov. Déjà auteur d’une vaste biographie de Romain Gary (Romain Gary le caméléon, Denoël, 2004), elle se penche une nouvelle fois sur la vie de l’écrivain en proposant une déclinaison de sa biographie à l’américaine, où elle disséquait la vie de Gary, en s’appuyant sur de nombreux documents et témoignages pour reconstituer avec précision les étapes de son existence mouvementée. Gary, en vrai caméléon, a beaucoup joué avec sa propre identité, se réinventant sans cesse, tant à travers des pseudonymes que par des réaménagements de sa propre histoire. La Promesse de l’aube, son autobiographie, où il évoque sa vie depuis sa petite enfance jusqu’à la mort de sa mère et la fin de la Seconde Guerre mondiale, a ainsi longtemps été considérée comme un document fiable, avant que son aspect romancé ne soit peu à peu révélé.

Romain Gary l’enchanteur permet de rappeler les grandes lignes de la vie personnelle, professionnelle et littéraire de cet enchanteur aux nombreux talents, qui fut, entre autres, Compagnon de la Libération, diplomate, écrivain, auteur d'articles pour une presse très variée, cinéaste ou dramaturge. Myriam Anissimov commence, en préface de l’ouvrage, par raconter sa rencontre avec Gary, début sans doute d’un intérêt sans cesse renouvelé pour l’écrivain et sa vie. Le volume, divisé en six parties, se développe ensuite de manière globalement chronologique et pourra constituer une porte d’entrée pour les lecteurs désireux de découvrir quelques facettes de l’homme intriguant se cachant sous le nom de Romain Gary. Le texte reconstitue, de manière factuelle, la chronologie de sa vie, en un mélange de faits et d’anecdotes, à travers un choix de thématiques, que viennent compléter des paragraphes resituant le contexte historique, politique, littéraire et culturel de l’époque.

La première partie (1914-1928) concerne l’enfance polonaise de celui qui s’appelait encore Roman Kacew. Anissimov, insistant sur les racines juives de Gary, fait la part des légendes inventées par l’écrivain ; pour cette période initiale de sa vie, elles sont particulièrement nombreuses, notamment autour de son père, qu’il choisit d’écarter de sa biographie, préférant suggérer de possibles liens filiaux avec l’acteur Ivan Mosjoukine. Malgré les documents nombreux et précis présentés par Anissimov, certains éléments restent encore flous : Gary conserve une partie de son mystère.

Dans la deuxième partie (1929-1945) sont réunis de nombreux événements fondateurs : le départ pour la France, patrie mythique idéalisée par sa mère ; la guerre et l’entrée dans la Résistance, au sein du groupe Lorraine ; les premiers écrits publiés, deux nouvelles dans la presse   puis un premier roman, Éducation européenne ; le mariage avec Lesley Blanch, sa première femme. La brève troisième partie (1946-1951) évoque rapidement l’arrivée de Gary au Quai d’Orsay et ses débuts dans la carrière diplomatique, entre Paris, Sofia et Berne, en parallèle de sa carrière romanesque.

La quatrième partie (1952-1967) suit Gary en Amérique, à New York puis à Los Angeles, où le conduisent ses fonctions diplomatiques. Illustré des dessins souvent ironiques de Lesley Blanch et de Sylvia Agid et de nombreuses photos, le texte s’appuie sur quelques anecdotes évoquant le quotidien de Gary, de sa vie maritale à sa découverte de Hollywood et de ses stars, en passant par ses nouveaux succès littéraires (l’obtention du prix Goncourt pour son roman Les Racines du ciel ou le succès de son autobiographie romancée La Promesse de l’aube) et ses incursions discutées dans le théâtre et le cinéma.

Témoin de ses années américaines, Chien blanc – même si Myriam Anissimov en présente surtout son évocation de Mai 68 – ouvre une cinquième partie (1968-1974) intitulée “Célèbre et seul”, qui cherche à présenter Gary à l’heure des bilans. On y perçoit, en même temps, la force de créativité garyenne, avec la publication simultanée de nombreux romans au cours des années 1970.

La dernière période (1975-1980) débute par une renaissance, celle de Gary qui s’invente un nouveau double, Émile Ajar. Myriam Anissimov expose les grandes étapes de cette aventure littéraire, la surprise suscitée par la publication de Gros-Câlin, les tentatives d’identification de son auteur, le Goncourt refusé pour La Vie devant soi et les succès remportés par cet écrivain dont l’identité présumée se dévoile peu à peu. En parallèle, Gary publie toujours des romans sous son nom, jusqu’en 1980, où, un an après Jean Seberg, il met fin à ses jours. Un an après sa mort, comme une ultime pirouette, la véritable identité d’Émile Ajar sera révélée.

L’iconographie occupe une place importante dans l’ouvrage, qui s’approche presque, par son format et sa mise en page, d’un album photographique commenté : photographies de Gary et de ses proches à diverses époques, extraits de correspondance, pages de manuscrits, articles de presse. Certains de ces éléments sont déjà connus, apparus dans d’autres projets consacrés à Romain Gary, d’autres le sont moins et complètent cette plongée haute en couleurs dans la vie de l’écrivain par des témoignages de son passé qui rendent sa biographie d’autant plus vivante. Plusieurs beaux documents y figurent comme cette reproduction de la dédicace apposée par Gary lui-même sur son exemplaire des Racines du ciel : “À mon cher Romain Gary, mon bon compagnon de lutte, en témoignage de ma profonde affection”.

L’œuvre romanesque de Gary ne joue finalement pas un rôle central dans le texte. Elle vient compléter son portrait sans en être le principal trait. Cette moindre présence de ses écrits pourra être regrettée. Par exemple lorsque, dans un chapitre pourtant intitulé “Au-delà de cette limite et Charge d’âme”, le premier texte est juste mentionné en un court paragraphe qui néglige l’œuvre elle-même pour parler uniquement de sa (mauvaise) adaptation cinématographique et de l’accueil froid que lui réserva le public. La publication de ce texte traçant le portrait d’un homme fatigué et vieillissant, dans lequel certains se sont empressés de reconnaître Gary, l’année même où il se réinventait en Ajar, est pourtant d’une belle ironie. Il semble également dommage que le texte dévie parfois de son sujet – certains développements et certaines illustrations n’ont qu’un rapport ténu avec Gary – et qu’il se fasse, par moments, plus imprécis (légendes inexactes, explications floues, etc.).

Lectures de Romain Gary ajoute de nouvelles facettes à ce portrait de l’homme Gary. Pour qui s’intéresse à l’écrivain, ce bel ouvrage est un riche complément à l'exposition organisée au Musée des lettres et des manuscrits. Il se divise en deux parties complémentaires : une partie critique et une partie centrée sur les manuscrits mêmes de Gary.

La première partie comporte des articles critiques et des témoignages, qui offriront aux lecteurs de Gary un outil supplémentaire pour la compréhension et l’analyse de son œuvre. Il vient s’ajouter aux précieux ouvrages critiques qui se sont, ces dernières années, multipliés ; une bonne partie des “lecteurs de Romain Gary” qui proposent dans ce volume leur regard sur l’œuvre de l’écrivain ne seront d’ailleurs pas inconnus des connaisseurs de son œuvre. Un ensemble varié de photographies de Gary et de reproduction de pages de ses manuscrits ou d’extraits de sa correspondance vient illustrer les articles.

Pierre Assouline ouvre ces lectures en traçant un portrait en creux de l’écrivain ; évoquant les passions que Gary suscite encore aujourd’hui parmi ses critiques et biographes, il rappelle la complexité et les mystères du personnage Gary, ses contradictions et multiples talents : il n’y a pas un Romain Gary, unique et facile à décoder, Gary est multiple et insaisissable, ce que le reste de l’ouvrage contribuera à montrer.

Le texte de Roger Grenier pointe l’une des caractéristiques de l’œuvre de Romain Gary, son lien très fort avec l’histoire en marche. Roger Grenier parle ainsi du reportage qu’il fit, trois ans après la parution des Racines du ciel, sur les traces de Raphaël Matta, un garde-chasse zélé mort depuis peu qui ressemblait beaucoup au Morel imaginé par Gary. Gary a également, dans le magazine Paris Match, tracé un beau portrait de cet homme bien réel qui avait si bien incarné le héros de son roman. Comme lui, il avait tenté de défendre les éléphants, suscitant l’incompréhension des tribus africaines pour qui les éléphants et autres animaux de la brousse étaient simplement un gibier à chasser, une source de viande (“Matta a donné sa vie pour les éléphants”, Paris Match, 7 mai 1960).

Elle-même auteur et bilingue, Nancy Huston se penche sur une thématique centrale dans l’œuvre de Gary : celle de la langue et de la traduction. Elle rappelle que Gary, multilingue, a assuré ou supervisé la traduction de plusieurs de ses œuvres entre le français et l’anglais. On ne peut qu’adhérer au vœu qu’elle émet de voir un courageux chercheur bilingue s’attaquer à une “analyse systématique des différences entre les versions française et anglaise des romans de Gary” : le résultat en serait certainement passionnant et très révélateur du mode de d’écriture de Gary, en même temps que de son appréhension différente de ces deux langues qu’il maîtrisait si bien. Nancy Huston en propose une illustration convaincante en établissant un début de comparaison entre la version française de La Danse de Gengis Cohn, parue en 1967, et sa traduction anglaise, The Dance of Genghis Cohn, parue en 1968 aux États-Unis.

Bernard Fauconnier propose ses souvenirs de lecteur, d’auditeur et de spectateur, traçant un portrait de Gary, l’homme tel qu’il apparaissait à la télévision, à la radio ou en photographie, et l’écrivain dont il avait lu avec intérêt les romans. Son portrait affectueux est complété par l’évocation de deux œuvres, La nuit sera calme, pseudo entretien dont Gary a rédigé les questions et les réponses et L’Affaire homme, recueil posthume qui rassemble des articles et entretiens que Gary donna à la presse. Il offre une bonne introduction à la personnalité et à l’apparence de l’écrivain ainsi qu’aux thèmes centraux de son œuvre.

Répondant au titre général, plusieurs “lectures” d’œuvres de l’écrivain sont également proposées. Sous forme d’entretiens avec des critiques et spécialistes, elles offrent des points d’entrée intéressants dans plusieurs textes – peu de romans signés Gary apparaissent finalement dans cette liste où, en dehors de son dernier roman, Les Cerfs-volants, figurent ses deux autobiographies romancées, La Promesse de l’aube et La nuit sera calme, un entretien fictif avec son ami d’enfance François Bondy, deux romans signés Ajar, Gros-Câlin et La Vie devant soi, ainsi que le court texte testamentaire publié de manière posthume et reconnaissant la paternité garyenne de l’œuvre d’Ajar, Vie et mort d’Émile Ajar.

Mireille Sacotte s’intéresse à La Promesse de l’aube, l’un des textes les plus connus de Gary, où il parle de son enfance et de l’amour inconditionnel de sa mère ; elle souligne que, si Gary y respecte la définition formelle de l’autobiographie, il y suit en même temps de manière très libre le fil de son enfance et explique certains de ses choix, son parti-pris général et l’humour omniprésent dans tous ses écrits.

En se penchant sur La nuit sera calme, Tzvetan Todorov insiste sur l’originalité de la pensée garyenne, en en soulignant des thèmes essentiels : la résistance, la féminité ou la fraternité. Dans ce texte, qu’il a tout d’abord écrit comme un exposé sans interlocuteur, avant d’y ajouter les questions de François Bondy, Gary livre ses analyses sur lui-même et sur le monde, du communisme à la société américaine, avec, toujours, la même lucidité. Refusant d’adhérer à un courant politique, conscient des paradoxes du monde qui l’entoure, Gary, comme le souligne Todorov, est “unique”.

Déjà auteur de plusieurs textes sur l’œuvre de Gary, Paul Audi analyse Gros-Câlin. Il y retrouve cette quête des personnages garyens, la recherche de leur humanité. Cousin, le narrateur de Gros-Câlin, en s’approchant du serpent qu’il a adopté, trouve son humanité dans la faiblesse. Audi souligne le lien entre Gros-Câlin et Kafka, notamment à travers la méthode d’inversion sujet/objet exploitée par les deux auteurs. Le premier roman d’Ajar est, ajoute-t-il, le roman de l’angoisse, à laquelle Gary répond par son arme préférée, l’humour. Il est également celui de la mise en question du langage et de l’incommunicabilité ; Cousin tout au long de ce texte écrit dans ce style si particulier qu’Audi surnomme le “cousinisme”, se heurte au langage et à l’impossibilité d’être compris. Jusqu’au chapitre inédit, coupé dans la première version du texte et publié en 2007, où sa quête trouve enfin un aboutissement et où il trouve les mots pour s’exprimer et se faire entendre.

Hervé Le Tellier raconte sa rencontre avec La Vie devant soi, à une époque où l’identité entre Ajar et Gary n’était pas connue. Parcourant l’œuvre, il en rappelle la genèse – Gary l’avait tout d’abord intitulé La Tendresse des pierres avant de s’apercevoir qu’il avait déjà mentionné ce titre dans l’un de ses romans, Adieu Gary Cooper ; l’illustration originale, dessinée par André François, en garde la trace –, l’histoire et certains thèmes, du désir d’aimer qui traverse le texte à la marche vers la mort et le vieillissement qui l’accompagne. La tendre histoire de Momo et Madame Rosa, écrite dans ce style “ajarien” si particulier figure, nous apprend-il, dans la liste officielle pour le programme de la classe de seconde, parmi les “œuvres moins attendues pouvant susciter la curiosité et l’intérêt des élèves”.

Évoquant le dernier roman de Gary, Les Cerfs-volants, publié l’année de sa mort, Jean-Marie Rouart parle de l’humanisme de Gary, qu’illustre sa conviction de la perfectibilité de l’homme : une part de mal existe en chacun. Les nazis ont été une incarnation cette part négative. Jean-Marie Rouart ne voit pas, pour autant, dans le refus garyen d’un manichéisme historique une tentation de relativisme ; Gary cherche, au contraire, à rendre à l’Histoire toute sa complexité.

Pierre Bayard, qui s’est tout d’abord intéressé à Gary à travers la question du double, met en perspective l’affaire Ajar et les deux textes atypiques que Gary a y consacré, Vie et mort d’Émile Ajar et Pseudo : “À l’autobiographie de l’écrivain qui n’est plus répond celle de l’auteur qui n’a jamais existé.” Il rappelle que Vie et mort d’Émile Ajar a été écrit pour une publication posthume et que Gary s’y adresse donc à ses lecteurs par-delà la mort. Il rejoint ainsi les personnages de fantômes de son œuvre, qui naviguent entre l’Histoire, la mort et la mémoire, le plus marquant étant le fantôme d’une victime de la Shoah narrateur de La Danse de Gengis Cohn.

Adélaïde de Clermont-Tonnerre se penche sur le même texte, qu’elle aborde de manière plus légère à travers une anecdote familiale : elle est la fille de Laure Boulay dont Gary dit, dans Vie et mort d’Émile Ajar, être tombé “éperdument amoureux” le temps d’un entretien où elle lui démontra “en deux coups de cuiller à pot, que Romain Gary et Émile Ajar étaient une seule et même personne”. Cet épisode a contribué à nourrir son intérêt pour Gary et son œuvre.

Cette série de lectures s’achève sur un entretien avec Bernard-Henri Lévy qui, entre souvenirs et analyses, rend hommage à Gary en regrettant que son œuvre n’ait pas encore été redécouverte par la postérité, attribuant ce désintérêt relatif à “la longueur de l’ombre que projette un grand vivant sur son œuvre”.

La deuxième partie de l’ouvrage compose le catalogue proprement dit : les différents documents présents dans l’exposition et les archives du musée sont décrits de manière systématique. La lecture n’en serait pas forcément passionnante si ces pages n’étaient pas illustrées par ce qui trace peut-être le portrait le plus fidèle de Romain Gary, loin des questions de dates ou de vérité historique : des extraits des manuscrits d’un bon nombre de ses œuvres. Ils dessinent, à leur manière, une forme de biographie littéraire de l’écrivain. Les textes sont présentés par ordre alphabétique, depuis A Night in the Life of Harry Smithovitch, une pièce de théâtre inédite datant sans doute des années 1960, jusqu’à La Vie devant soi, le deuxième roman signé Émile Ajar, paru en 1975.

Cet ensemble de documents commentés propose, au-delà même de l’intérêt pour Romain Gary, une captivante immersion dans le processus même de la création. Son écriture y apparaît, selon les textes et les périodes, parfois appliquée, parfois plus difficile à déchiffrer – par exemple lors de la rédaction de L’Angoisse du roi Salomon, où le texte n’est, tout d’abord, pas très lisible, avant d’être recopié de manière plus appliquée pour pouvoir être relu. Les différentes versions des textes laissent entrevoir sa manière de travailler : écriture manuscrite ou dictée, multiples corrections et réécritures, traduction et auto-adaptation avec, souvent, l’appui d’un traducteur non mentionné dont Gary reprend et complète le travail. Certains repentirs de l’auteur pourront même faire sourire, comme ces corrections apportées par Gary au début d’Adieu Gary Cooper pour y atténuer la familiarité du vocabulaire.

De nombreux textes inédits, achevés ou non, apparaissent également, révélant que, même si Gary a beaucoup publié de son vivant, son œuvre est loin d’être entièrement connue. L’intérêt malheureux de Gary pour le théâtre   y est notamment rendu apparent par les nombreux manuscrits inédits de pièces tirées de ses romans (par exemple celui d’Au-delà de cette limite votre ticket n’est plus valable ou La Belle Dame sans mercy, une version théâtrale de La Danse de Gengis Cohn) ou d’adaptation de pièces d’autres auteurs (notamment une traduction du Balzac de Stanislaw Kotwicz ou l’adaptation de Scuba Duba, une pièce de Bruce Jay Friedman).

Le classement des textes par ordre chronologique n’est pas toujours pleinement convaincant : il permet certes d’identifier et de distinguer rapidement les différentes œuvres, en y incluant les écrits non datés, mais il rend, en même temps, plus difficile la mise en perspective des textes selon le moment de leur écriture. L’analyse explicative qui situe les manuscrits présentés dans l’œuvre et la vie de l’auteur y incitait pourtant.

Romain Gary a choisi de mettre fin à ses jours le 2 décembre 1980. Ces deux parutions s’associaient à l’hommage rendu à l’écrivain à l’occasion de l’anniversaire de sa disparition. Si l’occasion n’était pas la plus positive, elle a, en tout cas, permis d’ajouter de nouveaux éléments à une actualité garyenne qui connaît, depuis quelques années, une nouvelle vitalité. Gary, qui se présentait, selon sa formule célèbre, comme un “minoritaire-né”   avait su se rendre insaisissable, toujours là où il n’était pas attendu, difficile à ranger dans une case bien définie. On avait donc, souvent, préféré l’oublier. Il commence, heureusement, depuis quelques années, à être redécouvert et son retour sur le devant de la scène ne semble que mérité. Ces deux récentes parutions montrent que Gary, trente ans après sa mort, a encore beaucoup à révéler.