Aux États-Unis, les pouvoirs exécutif et législatif viennent tant bien que mal de réussir à se mettre d’accord sur la nécessité de réduire, dans les mois et les années à venir, le déficit public fédéral, ainsi que la dette. Le temps étant désormais venu de faire des arbitrages, Barack Obama a précisé qu’aucun poste de dépense n’était à exclure a priori du champ des coupes budgétaires.

 

Diminuer les finances publiques… sans mettre en péril la sécurité du pays


Le 15 avril dernier, dans un article publié sur son site Internet intitulé "We don't need to bankrupt America's security to balance the budget ", le think tank néoconservateur Foreign Policy Initiative (FPI) craignait que les coupes en question n’épargnent pas la défense, mettant donc en péril la sécurité tout entière du pays. Pour Jamie Fly, le directeur exécutif du FPI, les parlementaires républicains ont, contrairement au Président, au moins eu le mérite de faire de la défense un poste de dépenses "à part".

 

Selon le FPI, même Robert Gates, le secrétaire à la Défense, aurait convenu dès l’an dernier que la Maison Blanche avait eu "la main lourde" en matière de diminution des budgets militaires en 2009 et 2010, alors que précisément les menaces contre le pays étaient majeures au niveau international : réseaux de terrorisme islamiste, États voyous ("rogue states") en possession de l’arme nucléaire (ou en passe de l’être), sans parler des pouvoirs militaires émergents et "de beaucoup, beaucoup d’autres choses…". Et encore, c’était avant les révolutions arabes ! Hélas, toujours pour le FPI, B. Obama avait préféré écouter la Commission Bowles-Simpson sur les déficits que son propre secrétaire à la Défense…

 

Néanmoins, explique J. Fly, les soulèvements populaires récents en Afrique du Nord, l’engagement militaire de l’OTAN en Libye et l’aide humanitaire au Japon vont coûter beaucoup d’argent aux États-Unis. Et de citer à nouveau R. Gates dans un discours prononcé en janvier dernier, et dont les accents très néoconservateurs rappellent le Francis Fukuyama de The End of History – de fait, R. Gates était déjà en poste sous George W. Bush. "Depuis plus de 60 ans, disait-il, les États-Unis, grâce au soutien de leur force militaire incontestée, ont été le garant de la sécurité de la majorité des pays du monde libre. Les bénéfices en termes de stabilité, de prospérité et d’expansion régulière de la liberté politique et de la croissance économique en reviennent non seulement à nos alliés e à nos partenaires, mais avant tout au peuple américain".

 

Dès lors, si l’on en croit J. Fly, diminuer aujourd’hui le budget de la défense ne ferait que répéter des erreurs et les égarements du passé… (Lesquels ? Il ne le précise pas).

 

Ce n’est pas la première fois que les néoconservateurs expriment, par le biais de leurs think tanks, leurs peurs sur le sujet, avec toujours le même ton dramatique, sinon apocalyptique. En matière géopolitique, leur sentiment envers le Président Obama a, depuis le début de l’année 2011, oscillé - parfois en l’espace de quelques jours - entre la satisfaction et la frustration. En outre, en janvier, le parti républicain s’est notamment divisé sur le budget de la défense. D’un côté, les Tea Party, majoritairement isolationnistes, ont fait de la diplomatie le cadet de leurs soucis, sauf à dire qu’elle doit coûter le moins d’argent possible. Ils n’ont cessé de réaffirmer que le budget militaire américain avait, depuis les années Bush (fils), coûté plus cher que prévu : le Pentagone, peut-on lire sur le site de Freedom Works, l’un de leurs think tanks, aurait ainsi "gaspillé des milliards"... De l’autre, les néoconservateurs, depuis l’élection de B. Obama, exigent de celui-ci une politique de défense active, voire agressive, et le maintien d’un budget militaire conséquent. 

 

 

Or, comme l’explique Bob Woodward dans son dernier livre, Les guerres d’Obama, le Président semble, plus que jamais peut-être, très conscient des dangers extérieurs qui menacent l’Amérique. On sait ainsi qu'Al Qaida préparait de nouveaux attentats contre les Etats-Unis. Mais il ne cède ni à la panique, ni à la tentation de la théorie du déclin qui semble aujourd’hui, comme au moment de la chute du mur de Berlin, revenir en force aux États-Unis. Même après la mort de Ben Laden