La discussion sur le projet de loi pour réviser la loi de bioéthique de 2004 a commencé mardi 8 février 2011.

 

 

Les députés ont enfin commencé à examiner le projet de loi sur la bioéthique. Rappelons qu’un premier projet de loi avait été déposé le 20 octobre 2010 alors que Mme Bachelot-Narquin était ministre de la Santé. Le projet de loi a ensuite été envoyé devant une commission spéciale présidée par M. Alain Claeys et dont le rapporteur est Jean Leonetti. Le rapport final de la commission a été déposé à l’Assemblée Nationale le 26 janvier 2011 et c’est sur la version modifiée par la commission qu’aura lieu le vote des députés.

Comme souvent lorsque le thème de la loi comporte des enjeux sociaux importants, de fortes crispations apparaissent. La singularité du débat bioéthique est de cristalliser des points de vue de groupes politiques auxquels se superposent des vues personnelles. Les clivages ne sont pas non plus forcément là où on les attend. Ainsi, certains parlementaires sont à la fois contre la gestation pour autrui et pour l’autorisation de la recherche sur les embryons humains, ou pour la levée de l’anonymat en matière de dons de gamètes et contre l’élargissement de l’assistance médicale à la procréation aux couples de même sexe. Bref, il y a presque autant de personnalités qui s'expriment sur ces questions que de points de vue divergents, parfois dogmatiques, parfois issus d’une expérience personnelle, et parfois nés d’un simple questionnement, ce qui a aussi toute sa place dans un débat éthique.

A droite, comme à gauche, les positions ne sont pas unanimes, en témoignent les différents dossiers publiés par la fondation Terra Nova dans lesquels deux grands courants s’opposent à gauche : une partie plutôt favorable à une extension des modes de filiation en autorisant notamment le recours aux mères porteuses, et une autre partie qui s’oppose à une réification du corps de la femme et donc à l’utilisation des mères porteuses. C’est à l’honneur de la gauche d’avoir porté son débat interne sur la “toile publique“ et fait entendre ses différentes composantes. Le Parti socialiste a finalement tranché en se prononçant notamment contre la gestation pour autrui et contre la levée de l’anonymat dans le don de gamètes.

 

Petit tour d’horizon des principales révisions proposées, qualifiées de révision a minima par un certain nombre d’acteurs de la bioéthique.

 

Le projet de loi prévoit une nouvelle procédure d’information de la famille dans le cas de la découverte d’une maladie génétique chez un des apparentés qui ne souhaite pas informer directement ses proches.

Un article est proposé afin d’autoriser les dons d’organes croisés, c’est-à-dire que si un donneur vivant n’est pas compatible avec la personne de sa famille qu’il souhaite aider, il pourra donner son organe à une autre personne compatible dans la même situation et la personne de sa famille recevra l’organe de l’autre donneur. De nombreux amendements ont été déposés visant à favoriser la pratique du don d’organes, sur personne vivante ou décédée.

Une mesure est prévue pour ne pas autoriser la création de banques de sang de cordon à des fins individuelles (ou autologues). Le développement des banques de sang de cordon allogéniques doit être renforcé.

Il est prévu un renforcement des mesures d’informations dans le cadre du diagnostic prénatal. Plusieurs amendements ont été déposés visant à rappeler, selon certains, le risque eugénique qu’il y aurait à proposer de façon systématique un dépistage de la trisomie 21. Cela dénote une vision parcellaire de la pratique du dépistage prénatal en France.

La commission a supprimé les articles du projet de loi concernant la levée de l’anonymat dans le cas du don de gamètes. Seuls deux amendements ont été déposés sur ce thème. Il est donc peu probable qu’un véritable débat sur ce sujet ait lieu sur les bancs de l’Assemblée, tout comme il n’est pas prévu de débat sur la gestation pour autrui puisqu’aucun projet n’a été retenu.

Plusieurs amendements ont été déposés, certains visant à faciliter l’état civil des enfants déjà nés d’une gestation pour autrui légale à l’étranger, d’autres pour autoriser les mères porteuses avec un encadrement adéquat.

Le projet de loi réaffirme une vision médicale de l’assistance à la procréation, refusant par conséquent l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de même sexe. Le transfert d’embryon post-mortem serait possible sur autorisation de l’Agence de la Biomédecine.

Le principe de l’interdiction de la recherche sur l’embryon humain serait maintenu, avec un régime dérogatoire, sans limitation de durée cette fois.

Enfin, la loi ne devrait plus être révisée tous les 5 ans.

Pour accéder au projet de loi complet après le passage devant la commission, se reporter au dossier de l’Assemblée Nationale.

Au final, il y a des aménagements techniques qui étaient pour la plupart nécessaires, mais aucune vision de la bioéthique pour les années à venir, ni aucun projet d’évolution sociétale